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Intervention de Rémi Delatte

Réunion du 2 novembre 2010 à 9h30
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 projet de loi de finances pour 2011 — Santé

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRémi Delatte, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, pour la santé et les systèmes de soins :

S'agissant de l'Aide médicale de l'État, les dotations prévues s'élèvent à 588 millions d'euros pour répondre à la progression des dépenses. Une concertation fructueuse entre la majorité et le Gouvernement a permis de dégager quelques pistes de maîtrise de la dépense, tout en préservant le caractère solidaire et humanitaire de l'aide. Sans anticiper sur l'examen des amendements, pourriez-vous nous faire part de votre position de principe sur une telle démarche ?

J'en viens maintenant au thème de la régulation de la démographie médicale. Ce sujet reste malheureusement toujours d'actualité, en dépit des nombreux rapports de grande qualité auxquels il a donné lieu. Le constat démographique est désormais bien connu de chacun : le vieillissement du corps médical pose la question de son renouvellement, tandis que sa féminisation emporte des conséquences en matière de contraintes de disponibilité et donc de mode d'exercice. Les disparités territoriales sont importantes, non seulement entre régions, mais aussi à l'échelle infrarégionale. Des spécialités sont en voie de désaffection. Je pense, en particulier, à l'anesthésie-réanimation, à la gynécologie obstétrique et à la chirurgie. Mais la médecine de premier recours semble aussi de moins en moins attirer les étudiants.

Enfin, l'exercice solitaire et en libéral est désormais très peu plébiscité, tandis que la pratique regroupée, le salariat et le remplacement progressent fortement.

Le problème est donc non pas le nombre total de médecins, mais leur répartition par rapport aux besoins en santé de la population. À cet égard, madame la ministre, vous avez mené une action volontariste et déterminante, que je tiens à saluer, en tentant de mieux adapter la formation initiale à ces besoins par le biais de trois leviers : le stage en cabinet généraliste pour les étudiants de deuxième cycle, la régulation de l'internat afin de « fidéliser » les étudiants à certains territoires et la mise en oeuvre, pour la première fois en 2010-2011, du contrat d'engagement de service public. Nous attendons beaucoup de ce dernier instrument. Pouvez-vous faire le point sur sa mise en oeuvre ? Rencontre-t-il le succès escompté auprès des étudiants ?

La volonté de rééquilibrage s'est aussi traduite par des mesures à destination des médecins pour les inciter à s'installer ou se maintenir en zones sous-dotées. Dans la pratique, des aides foisonnantes ont été instituées. Les auditions que j'ai menées me laissent à penser que ces aides sont mal connues des professionnels et n'ont pas toujours été adaptées. Je suis par ailleurs convaincu que, si les mesures coercitives peuvent sembler a priori séduisantes, elles ne sont probablement pas la voie à privilégier : c'est en suscitant l'adhésion que l'on parviendra à orienter durablement les comportements.

Dans les pistes d'avenir, j'ai d'abord retenu la nécessité d'adapter plus encore la formation médicale aux besoins des territoires. Il me paraît indispensable de favoriser l'immersion en milieu libéral pendant les études afin de préparer les futurs médecins à ce mode d'exercice qu'ils connaissent très mal, leur formation se déroulant essentiellement en CHU.

Pour cela, il faut poursuivre le développement de terrains de stage en médecine générale en deuxième cycle, envisager la création de postes d'internes ou de post-internat dans le secteur privé, évidemment avec les mêmes contraintes et obligations pédagogiques que dans les établissements publics de santé afin de ne pas créer un effet d'aubaine. J'aimerais connaître votre position sur ce point.

Il me paraît également indispensable de réguler la pratique quasi généralisée du post-internat. Celle-ci met à mal les efforts consentis en amont pour mieux répartir les étudiants sur le territoire et conduit, en outre, à une hyperspécialisation qui ne répond pas toujours à des besoins de santé. Un pilotage régional du post-internat peut être envisagé, mais c'est surtout le développement de l'exercice autonome au cours des études qui doit être recherché.

Plusieurs voies sont possibles : instituer une année de « seniorisation » en fin de cursus d'internat, favoriser les remplacements de médecins par les internes, ou encore développer le système des assistants partagés entre CHU et centres hospitaliers périphériques. Là encore, pouvez-vous me faire part de votre sentiment sur de telles propositions ?

Il semble enfin nécessaire de promouvoir l'installation et certains modes d'exercice. L'institution d'un guichet unique de l'installation, porté par les ARS, recueille l'adhésion des professionnels concernés. L'exercice regroupé, qui paraît très apprécié des jeunes médecins, mérite d'être encouragé. L'exercice sur plusieurs sites, avec en particulier les consultations avancées et les cabinets secondaires, devrait lui aussi être promu dès lors qu'il est organisé sur la base du volontariat.

La coopération entre professionnels de santé me paraît également être une solution intéressante pour pallier des insuffisances dans l'offre médicale, mais elle ne peut à elle seule résoudre ce problème dans les zones où toutes les professions de santé sont sous-représentées.

Une autre proposition porte sur la limitation dans le temps des possibilités de remplacement professionnel pour inciter à l'installation. Nous devons y réfléchir, tout en restant prudents : on doit aussi éviter une trop grande raréfaction du nombre de remplaçants, faute de quoi ce seraient les professionnels en exercice, notamment dans les zones sous-dotées, qui en pâtiraient.

Enfin, de nombreux interlocuteurs ont expliqué le faible attrait pour l'exercice libéral de la médecine de premier recours par la tarification à l'acte et les effets pervers qu'elle comporterait : multiplication des actes, frein aux coopérations, dévalorisation de l'acte intellectuel au profit de l'acte technique. À l'issue des auditions que j'ai menées, j'ai le sentiment que l'idée d'un recours à de nouveaux modes de rémunération, de type forfaitaire, progresse au sein de la communauté médicale.

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