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Intervention de Olivier Dussopt

Réunion du 27 octobre 2010 à 11h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivier Dussopt :

Comme notre collègue Bernard Derosier et le ministre l'ont déjà fait remarquer, les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » représentent peu par rapport à la totalité des crédits qui concernent les relations entre l'État et les collectivités. Il est utile de sortir de ces seuls 2,5 milliards d'euros de crédits pour s'inscrire dans un débat plus large, qui s'est ouvert avec la réforme des collectivités mais aussi avec la conférence sur les déficits publics du 20 mai dernier, qui ont fait l'objet d'un certain nombre d'annonces avant et sans doute après l'examen de ce budget.

Ma première interrogation concerne la fusion entre la dotation globale d'équipement (DGE) des communes et de la dotation de développement rural (DDR). À la suite des assises des territoires ruraux, il avait été préconisé la création d'une dotation unique d'aide aux investissements ; cependant, des inquiétudes portent sur son montant et ses modalités d'attribution. Vous avez annoncé, Monsieur le ministre, que son montant serait de 615 millions d'euros en 2011 ; or, selon les chiffres mentionnés dans le bleu budgétaire du projet de loi de finances pour 2010, 492 millions d'euros étaient attribués à la part communale de la DGE et 131 millions d'euros à la DDR, soit un total de 623 millions d'euros, ce qui fait une baisse de 8 millions d'euros en 2011. Dans le même temps, la nouvelle dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) verrait son champ d'action et les projets éligibles élargis, ce qui conduira mécaniquement à rendre l'accès à ce financement plus difficile.

Dans un second temps, j'ai entendu et lu à de nombreuses reprises dans la présentation de ce budget que les dépenses des collectivités territoriales, et en particulier du bloc communal, auraient augmenté de 40 % entre 1985 et 2010, hors transfert de compétence. Si on admet ce chiffre, j'aurais voulu qu'on nous précise quelle part de cette hausse relève de l'inflation, qui a été au moins égale à 1,8 ou 2 % par an sur cette période. Je souhaiterais que l'on nous apporte des éclaircissements sur ce calcul lors de l'examen en séance publique.

En troisième lieu, j'ai lu et entendu que le gel des dotations sur les trois prochaines années ne serait qu'un moindre mal, car l'augmentation moyenne annuelle des dotations de l'État aux collectivités territoriales aurait été de 2,3 % sur les dix ou quinze dernières années. J'aurai voulu savoir quelle part de cette hausse moyenne relève de la compensation des dégrèvements de fiscalité locale décidés par l'État, au bénéfice notamment des entreprises, et qui ont réduit d'autant les recettes fiscales des collectivités territoriales ; cela remet en perspective le gel demandé aux collectivités pour les trois années à venir. Car en 2010, sur les 99 milliards d'euros de concours aux collectivités, 21 milliards correspondent à des compensations et à des exonérations.

Je voulais aussi aborder deux points qui ne relèvent pas directement de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », mais qui font partie des dispositifs du budget à destination des collectivités. Le premier concerne les collectivités situées en zone rurale : l'article 65 du présent projet de loi de finances vient réduire les avantages accordés aux entreprises et aux employeurs installés en zone de revitalisation rurale, ce qui pourra s'avérer dramatique pour les entreprises intervenant dans le domaine médico-social, pour l'aide aux personnes âgées ou l'aide à domicile, en employant énormément de personnel. Je voudrais savoir si le Gouvernement envisage de revenir sur cette mesure, déjà annoncée dans le cadre de budgets précédents, mais sur laquelle à chaque fois le Gouvernement était revenu lors de l'examen des crédits correspondants.

Ma dernière inquiétude concerne le fait que le gel des dotations aux collectivités territoriales, qui va se traduire par une baisse des dotations et notamment de la DGF pour beaucoup d'entre elles, s'accompagne d'un gel ou d'une baisse d'autres dotations ou crédits d'intervention. Les efforts annoncés sur les dotations de solidarité urbaine apparaissent contradictoires avec la circulaire adressée le 17 décembre par le directeur général de l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances qui informe les préfets et les acteurs de la politique de ville d'une baisse de 12 % des crédits d'intervention de l'État dans le cadre des contrats urbains de cohésion sociale : je ne voudrais pas que les éléments rassurants concernant la DSU soient en réalité contrariés par une baisse des financements qui participent à la politique de la ville sur ces territoires.

En écho et en réponse aux propos du rapporteur pour avis, nous ne donnerons pas un avis favorable sur les crédits de la mission, et plus généralement sur l'évolution de l'ensemble des concours de l'État aux collectivités territoriales. Comme l'a rappelé Bernard Derosier, il y a un certain nombre d'éléments inquiétants, notamment de baisse de dotations alors que les dépenses correspondantes sont dynamiques.

Mais nous ne voulons pas non plus faire l'économie d'un lien avec le projet de loi de réforme des collectivités territoriales, et notamment son article 35, qui va aussi encadrer les financements, limiter l'intervention des régions et des départements au profit des projets d'envergure régionale ou départementale et interdire le cumul des subventions pour les communes de plus de 3 500 habitants. Il y a là un véritable système qui se met en place pour étrangler les collectivités territoriales, qui fait suite à l'absence de compensation intégrale des transferts liés à l'acte II de la décentralisation. Les collectivités territoriales sont soumises à l'effort de redressement budgétaire, traitées comme les coresponsables de l'état des finances publiques, alors que la dette des collectivités territoriales représente 10 % du total de la dette publique et est gagée par des investissements. Tout cela ne justifie pas l'austérité et parfois la brutalité avec lesquelles elles sont traitées en matière budgétaire.

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