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Intervention de François Baroin

Réunion du 22 octobre 2010 à 15h00
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 projet de loi de finances pour 2011 — Article 13

François Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état :

Ce sujet politique majeur nous a opposés pendant quatre jours. Monsieur de Rugy et monsieur Muet, vous validez, à travers vos positions politiques, le fait qu'une niche fiscale est une dépense de l'État par la voie fiscale et nécessite, dans un contexte général de réduction de nos déficits, d'être traitée comme la subvention. C'est un point de doctrine auquel vous avez fait tous deux références pour défendre vos propositions. Vous nous rejoignez donc, ce dont nous nous félicitons.

Il convient, deuxièmement, d'inscrire cet article dans la perspective générale de l'équilibre du budget. Nous sommes désormais d'accord sur le principe selon lequel une niche fiscale est une dépense de l'État par la voie fiscale. Ainsi, l'État fait un choix à un instant « T » de ne pas prélever sur une assiette fiscale telle ou telle ressource supplémentaire. Une dépense fiscale, à l'instar de la subvention, monsieur de Rugy, a pour rôle d'accompagner un dispositif dans un secteur économique ou de lancer une impulsion. Une fois le dispositif en place, l'État s'efface et le marché occupe l'espace. Or, là, le dispositif a évolué de façon très spectaculaire. Le Gouvernement se doit donc de proposer une réduction de la dépense fiscale, justifiant une moindre implication de sa part, non par souci d'économie, mais pour que l'évolution de ce marché soit équilibrée, pour éviter la surchauffe et revenir à un niveau raisonnable.

Le troisième élément concerne des sujets peut-être davantage ciblés sur l'outre-mer et qu'il sera sans doute plus pertinent d'aborder avec M. Lurel et Mme Taubira qui ont déposé des amendements sur la particularité ultramarine. Je tiens toutefois à m'appuyer sur ces points pour vous expliquer notre logique pure et pratique de la maîtrise globale de nos dépenses fiscales.

On ne peut pas continuer à alimenter une bulle, qui devient parfois spéculative et qui, sur le plan industriel, peut avoir des conséquences. L'État français n'est pas là pour favoriser la création d'emplois en Chine par ses choix fiscaux. Nous ne sommes pas là pour créer artificiellement un secteur d'activité économique qui est menacé d'être altéré régulièrement. Nous ne sommes pas là non plus pour proposer un eldorado qui n'en est pas un. Nous avons aussi des responsabilités vis-à-vis d'EDF et des fournisseurs d'électricité. Nous devons donc réfléchir au problème de façon globale.

Ce n'est pas une remise en cause du Grenelle, qui a eu le grand mérite de dégager un consensus assez large pour reconnaître la nécessité d'orienter la société vers de nouvelles énergies non fossiles, comme celle produite par les éoliennes ou les biocarburants.

Vous contestez les biocarburants, monsieur de Rugy, le développement des filières non alimentaires, tout simplement parce que vous n'aimez pas les agriculteurs. Vous ne les aimez pas parce que vous ne les connaissez pas, parce que vous ne vous y êtes jamais intéressé, ignorant l'enjeu immense que représente l'agriculture pour notre pays, pour l'Union européenne, dans un contexte mondialisé. Le pouvoir vert, cela veut dire quelque chose. C'est un enjeu pour la solidarité mondiale, pour permettre aux uns et aux autres de vivre et de se nourrir, et c'est un enjeu pour le rôle de la France dans l'équilibre mondial.

Pour permettre à nos agriculteurs de continuer à exploiter nos terres de grande qualité, il est de notre devoir de leur offrir des débouchés à vocation non alimentaire, et donc de développer toutes les filières, du biocarburant à d'autres filières en recherche-développement. Quand on a des pôles de compétitivité dans telle ou telle région, on sait de quoi on parle. C'est un gros un effort, cela donne à l'agriculture un rôle considérable, qui permet à la France de manifester son soutien à une immense tradition française dans les futures négociations à l'échelle européenne mais aussi de parler d'égal à égal dans un concert mondial. On ne peut pas ignorer ce qui se passe en Afrique, on ne peut pas ignorer ce que souhaite la Chine, on ne peut pas ignorer le dispositif américain qui apporte des aides de façon spectaculaire. On ne peut pas ignorer ce qui se passe en Amérique du Sud, qui a fortement développé les filières non alimentaires et les biocarburants. Le taux d'incorporation y est parfois de 20 ou 30 % – je pense au Brésil, par exemple.

Bref, sur ces sujets comme sur les autres, nous ne tournons pas le dos au Grenelle de l'environnement, nous adaptons notre dispositif économique à l'évolution du marché. Nous nous situons pleinement dans l'esprit de la dépense fiscale pour donner une impulsion. Une fois que le marché est créé, il s'organise dans la liberté, mais il n'y a pas de liberté sans règles. Les règles demeurent mais le soutien de l'État diminue progressivement.

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