Il n'est plus fait référence non plus à la nécessité de protéger les revenus du travail, argument pourtant maintes fois avancé par le passé. Rappelons à cet égard que le bouclier fiscal a longtemps été présenté comme la seule façon d'éviter que l'« on » travaille un jour sur deux pour l'État. La démonstration a été apportée – et plus personne ne la conteste – que les revenus que protège le bouclier fiscal sont ceux du patrimoine et non ceux du travail. Vouloir protéger les revenus du patrimoine est une ambition qui n'a rien de médiocre, mais autant l'assumer en tant que telle.
Enfin, nous nous accordons tous sur le fait qu'un prélèvement ne doit pas être confiscatoire. Quand Gilles Carrez, Charles de Courson ou le ministre rappellent que le principe du bouclier fiscal, qui consiste à plafonner les sommes qu'un contribuable verse à la collectivité, a été instauré par un gouvernement plus proche des bancs de l'opposition actuelle que de ceux de la majorité, c'est une forme d'hommage rendu à une lucidité économique, par ailleurs contestée par d'autres. Nous n'avons pas attendu le débat sur le bouclier fiscal pour savoir que, pour un parti de Gouvernement, instaurer un prélèvement confiscatoire n'est pas la chose la plus intelligente qui soit. Quand l'ISF a été créé en 1988 sous l'autorité du Premier ministre d'alors, Michel Rocard, un plafonnement couvrant l'impôt sur le revenu et l'impôt sur la fortune a été instauré dans le même temps. Plus tard, y a été adjointe la CSG. Mais il faut rappeler que son taux se situait à 1,1 % et que la CRDS n'existait pas.
Depuis sont intervenus des changements qu'il me paraît difficile de passer sous silence. Il s'agit d'abord de la création de la CRDS et de l'augmentation de la CSG. Il se trouve que j'étais commissaire du Gouvernement, spécialisé dans ces questions, quand une motion de censure a été déposée sur la CSG. Il fallait monter l'escalier jusqu'à la tribune pour déposer un bulletin dans l'urne et les hasards de l'ordre alphabétique avaient fait que M. Marchais et M. Marcellin s'étaient succédé pour voter la censure ensemble. Certains se souviennent peut-être que ce débat avait été extrêmement animé – je me tourne vers Jean-Pierre Soisson et Henri Emmanuelli – et je me félicite du calme qui règne aujourd'hui dans notre hémicycle par comparaison avec le tumulte qui sévissait alors.