Monsieur le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, je trouve que le déroulement de la séance est cruel avec vous puisque nous recommençons nos travaux cet après-midi de la même façon que nous les avons achevés ce matin, c'est-à-dire en mettant le doigt là où ça fait mal. Ce n'est cependant que le hors-d'oeuvre puisque nous examinerons tout à l'heure l'amendement de M. Piron qui risque d'aggraver vos souffrances, non pas que vous soyez en désaccord avec son contenu, mais que celui-ci sera exhibé devant l'opinion publique.
J'en viens à l'amendement n° 323 . Le plafonnement des niches fiscales est absolument nécessaire pour des raisons morales – même si notre conception de la morale n'est pas exactement la même que celle de la bande du Fouquet's –mais aussi compte tenu des volumes financiers qui échappent à l'impôt, et du désastreux déficit de l'État. Cédant à l'optimisme le plus béat, vous imaginez, monsieur le ministre, qu'il sera contenu à 90 milliards d'euros alors que, vous le savez, ces dernières années vous avez toujours dépassé vos objectifs, si je puis dire, et les déficits ont crevé les plafonds que vous aviez fixés.
Les mesures prises jusqu'à présent ont été essentiellement d'ordre symbolique, avec un plafonnement fixé à 20 000 euros, auxquels s'ajoutent 8 % du revenu imposable. Le traitement déterminé de la question de la dépense fiscale liée aux niches est une nécessité si l'on veut restaurer un peu de justice fiscale s'agissant d'une masse financière qui a dépassé, d'après la Cour des comptes, 140 milliards d'euros en 2009, c'est-à-dire bien plus que le déficit, et de quelques milliers de foyers fiscaux très aisés. Ces foyers fiscaux que vous chérissez, pour lesquels vous n'avez jamais assez de tendresse, qui sont de fait exonérés du paiement de l'impôt sur le revenu et qui, parfois, bénéficient même d'une restitution de la part du Trésor public. On a l'exemple de mamie Liliane ou de l'héritière des Galeries Lafayette.
L'analyse de l'impact des niches fiscales selon les niveaux de revenus de leurs bénéficiaires fait apparaître qu'elles sont particulièrement profitables aux plus hauts revenus, ce qui est préoccupant quand on sait qu'elles se multiplient au rythme moyen de quatorze créations par an depuis 2003 et que les choix politiques du Président de la République sont de nature à impulser une accélération de ce rythme avec les lois TEPA et de modernisation de l'économie, ou avec la baisse de la TVA sur la restauration.
Ce projet de loi de finances pour 2011 n'y change rien fondamentalement, malgré la multiplication des effets d'annonce. En réalité, vos poursuivez vos objectifs, à savoir des objectifs de classes, en organisant une régressivité de fait de l'impôt par le jeu des réductions des crédits d'impôt.
Cet amendement vise à rétablir un peu de justice fiscale et à faire respecter l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen que j'ai déjà cité. C'est pourquoi, nous proposons de supprimer la part proportionnelle du plafond.