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Intervention de Éric Woerth

Réunion du 20 juillet 2010 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la république

Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique :

À mon sens, l'augmentation du taux de cotisation n'amputera pas le pouvoir d'achat des fonctionnaires. On constate au contraire que celui-ci a fortement augmenté durant ces dernières années, pour peu qu'on considère non ceux qui entrent dans la fonction publique ou qui en sortent, mais l'évolution de la rémunération des personnels qui restent en place. L'augmentation des salaires a même été beaucoup plus importante dans le secteur public que dans le secteur privé. L'augmentation du glissement vieillesse-technicité (GVT) a représenté 2 % dans une période de faible inflation. Les retours catégoriels relatifs au non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux sont également importants. L'augmentation du point d'indice intervenue durant les dernières années a été plutôt forte, elle aussi, puisqu'elle s'élève à 0,8 %, pour une inflation quasiment nulle. Pour les catégories A, B ou C, l'allongement de la carrière permet l'accession à de nouveaux grades. L'augmentation annuelle de 0,27 point de la cotisation des fonctionnaires ne remettra pas en cause celle de leur rémunération, même compte tenu de la stabilisation du point d'indice décidée pour 2011.

Il y a quinze jours, M. Tron et moi-même avons mené une négociation en deux temps sur les rémunérations pendant les trois prochaines années. Pour respecter ses engagements, l'État a assuré une augmentation de 0,5 % en 2010, alors que le contexte aurait pu justifier qu'il la remette en cause. Certes, le point d'indice sera gelé en 2011, mais d'autres pays ont pris des mesures plus sévères en ce domaine. De plus, l'augmentation du salaire des fonctionnaires ne se réduit pas à la valorisation du point d'indice. Il faut tenir compte des promotions catégorielles ou de l'évolution dans les grilles.

Enfin, la garantie individuelle du pouvoir d'achat assure une augmentation au moins égale à l'inflation. C'est pourquoi l'augmentation de la cotisation ne sera pas compensée. Si elle l'était, les fonctionnaires et les employés du secteur privé cotiseraient à un taux différent, pour un salaire et une retraite égaux.

On constate actuellement, pour la seule fonction publique, un déficit du régime des pensions de 15 milliards d'euros. Or l'État ne peut pas toujours suppléer au manque de cotisations. Où trouver une telle somme ? Ce n'est pas aux salariés du privé de la verser ! L'augmentation des cotisations évitera que le déficit ne se creuse. Le sujet a été longuement débattu avec les syndicats de la fonction publique. On pouvait jouer sur d'autres facteurs, et modifier par exemple la période de référence considérée – les six derniers mois ou les vingt-cinq meilleures années – pour calculer le montant de la pension. Nous avons privilégié la solution la plus juste.

Pour ce qui concerne le minimum garanti, il est exact que nous allons changer les règles. Nous prévoyons un alignement au système du secteur privé, qui ne comprend pas le versement d'un minimum total, quel que soit le nombre de trimestres effectués. Cela dit, quand on observe la manière dont est calculé le minimum garanti, on réalise qu'il monte fortement dans un premier temps, et qu'il privilégie ceux qui ont des carrières courtes. Nous poursuivrons dans cette voie. Par ailleurs, nous ne toucherons pas à son montant, qui est d'un peu plus de 1 000 euros, alors que le minimum contributif, dans le secteur privé, est de 800 euros. Autant dire que le décalage actuel entre le minimum garanti et le minimum contributif va perdurer. Mais il faut tenir compte du fait que, si le minimum garanti n'évolue pas, le système de la décote ne sert à rien.

Nous avons essayé de résoudre la situation des infirmières sans revenir sur la négociation qui s'est tenue il y a quelques mois. Celles qui opteront pour la catégorie A, dans le cadre de la réforme LMD, consentiront un effort pour leur retraite, puisqu'elles accepteront de partir à soixante ans au lien de cinquante-cinq. Celles qui arrivent actuellement dans la fonction publique seront traitées comme tous les autres fonctionnaires. Quant à celles qui n'ont pas opté pour la catégorie A, elles partiront à cinquante-sept ans au lieu de cinquante-cinq. Pour elles, l'allongement de la durée du travail sera la même que pour les autres catégories. Quant à la pénibilité de leur travail, elle sera prise en compte dans le cadre du régime de pénibilité du secteur public, comme c'est le cas aujourd'hui.

Madame Mazetier, je partage votre préoccupation en ce qui concerne la retraite des femmes. Je ne conteste pas que le montant de leurs pensions soit inférieur à celle des hommes. Je note cependant que cette différence est inférieure à celle que l'on constate pendant la période d'activité, que nous sommes en train de réduire. En fait, les inégalités actuelles reflètent celle des carrières, qui se sont déroulées au siècle précédent.

Aujourd'hui, le nombre de trimestres effectués par les femmes nées dans les années soixante-dix est supérieur à celui des hommes du même âge. De fait, leur carrière est moins morcelée et plus linéaire que celle des hommes, sauf en cas de temps partiel subi. D'autre part, lorsqu'elles ont un enfant, elles bénéficient de majorations de leur durée d'assurance, par exemple d'une majoration de deux ans dans le secteur privé.

Les retraites des femmes ne sont inférieures à celles des hommes que parce que leurs salaires ont été inférieurs. Même si des améliorations, certes timides, ont été apportées à cet égard, nul ne se satisfait de cette situation ; mais on ne peut demander à un texte sur les retraites de régler tous les problèmes sociaux qu'a pu rencontrer une tranche d'âge au cours de sa vie.

Il est normal d'utiliser le FRR, et je ne comprends pas que vous en fassiez un tel sujet de polémique. Ce fonds a été créé par Mme Aubry, en 1999, pour absorber le pic de déficit prévisible à l'horizon de 2020 compte tenu des évolutions démographiques. Mais, à l'époque, le pays ne se projetait pas dans une réforme des retraites. Or notre réforme, en reportant l'âge de la retraite, apporte une réponse au problème démographique. Le taux de déficit par rapport au PIB que prévoyait le COR étant malheureusement constaté vingt ans à l'avance, il est d'autant plus logique d'utiliser le FRR. Il serait tout de même curieux d'accumuler des réserves d'un côté et des déficits de l'autre sans effectuer la jonction entre les deux. Le décaissage progressif du FRR permettra d'assurer le pontage de la résorption du déficit des retraites sur la période 2011-2018, au cours de laquelle la réforme montera en charge.

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