…et une anomalie au regard des efforts de la France qui « s'est activement engagée dans la reconnaissance des droits des victimes tout au long des négociations pour l'établissement de la CPI », selon les termes mêmes de l'avis qu'elle a rendu le 15 mai 2003. Pourquoi donc avoir réintroduit ce monopole ?
Pour finir, l'amendement voté par le Sénat renverse le principe de complémentarité prévu par le statut de la CPI, en subordonnant les poursuites en France à la condition que la CPI ait expressément décliné sa compétence.
Cette disposition est contraire au statut lui-même, dont les articles 17 et 18 prévoient justement que la Cour ne peut agir qu'en cas de défaillance des juridictions nationales.
La disposition que tend à introduire cet amendement doit, à l'évidence, être supprimée, afin que les crimes définis par le statut de Rome soient soumis au même régime procédural que les autres crimes internationaux, pour lesquels est déjà admise une compétence extraterritoriale des juridictions françaises : torture, terrorisme, crimes internationaux commis au Rwanda ou en ex-Yougoslavie.
Le maintien d'un tel verrouillage va envoyer au monde un message désastreux : celui d'une France souhaitant ménager les bourreaux qui voudraient se rendre sur son sol et n'ayant aucune intention véritable de participer au système judiciaire international créé par le statut de Rome pour lutter contre les atrocités qui heurtent la conscience de l'humanité tout entière.
Cet amendement ne saurait être maintenu : il serait inconcevable que la patrie qui avait une tradition en matière des droits de l'homme se dote des critères de compétence les plus restrictifs d'Europe…