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Intervention de Claude Goasguen

Réunion du 12 juillet 2010 à 18h00
Adaptation du droit pénal à l'institution de la cour pénale internationale — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaClaude Goasguen :

La notion de compétence internationale d'une cour restera sans doute à traduire dans les faits, et le restera sans que notre pays, qui veut simplement l'entourer de précautions, l'ait contestée. La plupart des reproches de la commission des affaires étrangères sont au fond d'ordre éthique plutôt que juridique. Le droit dresse parfois, hélas, des obstacles insurmontables, dont je peux prendre quelques exemples. Lorsque les Anglais ont arrêté, dans une clinique, le général Pinochet, archétype presque caricatural du criminel international, la Chambre des Lords, soucieuse d'appliquer ce droit anglo-saxon si différent du nôtre – notamment sur la notion d'imprescriptibilité –, a décidé de le transférer en Espagne. Cela fut-il le cas ? Non. Le général Pinochet fut transféré au Chili, qui souhaitait le faire condamner par ses propres juridictions.

Lorsqu'un ministre des affaires étrangères congolais a été traduit devant les tribunaux, a-t-il été condamné ? Non, car son immunité le protégeait. De fait, le problème est que le droit pénal international se heurte à ce principe tangible qu'est l'immunité des chefs d'État. C'est si vrai que la France, dans sa grande sagesse, a réformé sa Constitution pour lever toute ambiguïté à ce sujet.

L'immunité n'est d'ailleurs pas le seul problème : je pense par exemple aux principes juridiques de la territorialité – que vous avez omis, monsieur Urvoas – et de la personnalité. Doit-on abandonner l'un et l'autre ? Rien ne nous y oblige dans la Convention de Rome. Je dirais même que, en l'état actuel des choses, la prudence voudrait que nous les conservions. Le monde est en pleine mutation, et si une cour internationale devait de nouveau être saisie, les choses seraient sans doute fort différentes.

J'en prendrai un seul exemple, qui a indigné le juriste que je suis : le rapport Goldstone. Ce rapport est une véritable barre de dynamite pour l'interprétation juridique du droit de la guerre. Nous n'accepterons jamais de voir des armées nationales condamnées parce qu'elles ont attaqué des civils eux-mêmes utilisés par des terroristes. L'évolution des relations internationales, on le voit, passe par un réexamen des positions de fond, et des conventions internationales en la matière sont indispensables. Sans cela, la saisine de la CPI par le Conseil de sécurité au nom de la compétence universelle conduira, sur des sujets aussi polémiques, à faire n'importe quoi, n'importe comment : la commission des droits de l'homme de l'ONU qui a élaboré ce rapport, loin d'être représentative, est d'ailleurs une caricature de ce qui s'oppose aux droits de l'homme.

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