L'objectif que poursuit le Gouvernement est de garantir l'accès de tous au numérique. À cet égard, le terme de TNT est trompeur car il semble sous-entendre l'utilisation de la voie hertzienne, alors que celle-ci n'est pas exclusive de celle du satellite. Il convient donc de définir des conditions équitables d'accès au numérique sur tout le territoire, quelle que soit la technologie utilisée. À cet égard, il ne sera techniquement pas possible d'accéder partout au numérique par voie hertzienne ; économiquement, ce n'est d'ailleurs pas toujours la meilleure solution : elle peut même s'avérer beaucoup plus chère que la voie satellitaire en cas de morcellement de territoires. Rappelons par ailleurs qu'il n'y a aucun problème de qualité de la transmission numérique, contrairement à l'analogique : la qualité de la transmission numérique reste toujours très bonne, qu'elle se fasse par voie hertzienne ou via un satellite ; elle peut même être meilleure car la bande passante est plus large et on a toutes les chaînes disponibles en haute définition. Tout le monde n'aura donc pas accès au numérique avec la même technologie, même si on s'efforcera de privilégier le plus possible la voie hertzienne. Pour ce faire, la meilleure solution est de pousser au maximum la puissance des émetteurs d'ores et déjà prévus. Cela permettra en effet d'augmenter en moyenne nationale de 1,6 % la couverture numérique hertzienne et jusqu'à 3 ou 4 % dans certains départements. Cette solution n'est cependant pas neutre financièrement : elle représente un surcoût d'environ 30 % pour les chaînes. Elle est toutefois plus efficace que la création de nouveaux émetteurs qui ne permettrait qu'une progression de 0,3 % de la couverture numérique du territoire. Il convient en outre de souligner, sur un sujet auquel citoyens et élus sont particulièrement sensibles, que ce choix n'impactera pas les objectifs de réduction de l'exposition aux champs électromagnétiques : les émissions en mode numérique étant dix fois inférieures en puissance aux émissions en mode analogique, il existe en effet une marge suffisante pour en augmenter la puissance. Il s'agit là du premier amendement du Gouvernement.
S'agissant ensuite de l'accompagnement des particuliers par la création d'un fonds destiné aux personnes âgées et handicapées, je rappelle qu'il s'agit d'un fonds d'aide technique et non financière. Un fonds de prise en charge financière existe déjà par ailleurs pour les personnes les plus démunies : ainsi, les coûts du passage au numérique pour les personnes exonérées de la redevance audiovisuelle sont bien pris en charge par la collectivité, y compris lorsqu'il s'agit d'acquérir un adaptateur à 25 euros. Le fonds technique, doté de 50 millions d'euros, sera destiné à venir en aide aux personnes qui ne se sentent pas en mesure de procéder à la sélection et à l'installation des équipements nécessaires. Il permettra de financer le déplacement à domicile de techniciens qui pourront prodiguer des conseils et également accompagner les personnes éligibles aux aides financières dans leurs démarches administratives. À titre expérimental, une opération de ce type a été menée dans la Manche en partenariat avec La Poste préalablement à l'extinction programmée le 18 novembre des émetteurs du Nord Cotentin.
Enfin, un fonds « bis » sera créé afin d'accompagner financièrement les personnes qui recevaient la télévision analogique par voie hertzienne, c'est-à-dire par le biais d'une antenne râteau, et qui auraient besoin de s'équiper en récepteur satellite. Les élus se sont fortement mobilisés en faveur de ces populations qui pourraient effectivement ne pas comprendre qu'elles ne peuvent plus désormais recevoir la télévision de la même manière et ressentir le passage au numérique comme une régression. Le Premier ministre avait proposé que la moitié des citoyens ayant les revenus les plus faibles voient le coût de l'acquisition d'une parabole et son installation pris en charge. Il a finalement arbitré en faveur d'une prise en charge sans condition de ressources à hauteur de 250 euros pour l'équipement de la résidence principale. Cela représente un coût pour l'État de 96 millions d'euros. Ce sont donc 56 millions d'euros qui s'ajoutent aux 40 millions d'euros initialement prévus afin de couvrir 100 % des publics concernés, y compris les personnes exonérées de la redevance audiovisuelle qui n'étaient auparavant pas comptabilisées dans l'aide envisagée par le Premier ministre.
Enfin, le Gouvernement a trois autres propositions à vous soumettre qui concernent la gouvernance territoriale du système. Tout d'abord, il convient en effet de tenir compte du souhait des collectivités locales de conserver leurs émetteurs en les numérisant. Généralement, mieux vaut paraboliser que numériser un émetteur, d'un point de vue financier, mais le choix inverse peut être fait par certaines collectivités, auquel cas un accompagnement financier sera mis en place. La question de savoir si celui-ci passera par le FCTVA ou par le fonds « bis » n'a pas été tranchée. Si le fonds « bis » devait être retenu, les moyens destinés au financement de paraboles sur le territoire de la collectivité concernée seraient réorientés vers le financement de la numérisation de l'émetteur. Le travail est en cours et la solution sera prochainement arrêtée. En revanche, il s'agira d'un accompagnement financier sur le capital, par sur l'entretien de l'émetteur. Je voudrais par ailleurs revenir un instant sur l'attitude de TDF pour dire que je n'ai pas du tout apprécié la démarche de cette entreprise auprès des élus, qui était en partie fondée sur l'ambiguïté de son statut. Or je tiens à rappeler que TDF est bien désormais une entreprise privée, et qu'elle a tendance à maximiser le cash-flow et à proposer des solutions reposant sur le leasing des émetteurs, ce qui n'est pas toujours dans l'intérêt des collectivités. Quant aux chiffres que TDF a diffusés, il ne s'agit pas de chiffres publics officiels et certains se sont avérés faux. D'ailleurs, l'entreprise n'assume plus aujourd'hui toutes les informations qu'elle a diffusées sur la question. Par exemple, lorsque TDF explique qu'en numérisant deux émetteurs côte à côte qui touchent 1 000 personnes, on touchera 2 000 personnes, c'est faux : cela dépend du taux de recouvrement des deux émetteurs, au final on peut très bien n'en toucher que 1 300. Le secrétariat d'État est évidemment à la disposition des députés pour leur donner tous les chiffres publics disponibles permettant de comparer les taux de couverture des départements en mode numérique, en mode numérique avec puissance augmentée, en mode analogique, en mode analogique dégradée, ainsi que les taux de parabolisation.
Le Gouvernement souhaite également proposer un renforcement du GIP France Télévision Numérique autour d'une direction technique et d'une direction politique afin de résoudre le problème de déclinaison territoriale que pose le système actuel. Même si le GIP est fortement présent sur le terrain, c'est avec une démarche un peu technique qui ne constitue pas toujours la meilleure interface avec les élus.
Enfin, j'ai une troisième proposition, qui a été élaborée de concert avec M. Jean Dionis du Séjour et vous sera formellement présentée lors de l'examen du texte en séance : elle vise à organiser un pilotage local du basculement au tout numérique. Le secrétariat d'État ne dispose pas de directions décentralisées, le CSA n'a pas de déclinaison territoriale : c'est pourquoi il faut créer des lieux de concertation au niveau régional, au niveau départemental, voire au niveau communal, qui pourraient être des lieux d'élaboration de conventions avec le GIP. Celui-ci a une très grande souplesse de fonctionnement et peut passer des conventions avec une mairie par exemple éloignée de tout afin que la parabolisation se fasse en une fois.