Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, nous allons examiner le projet de loi de modernisation agricole dans un contexte où le monde rural est en crise et où l'agriculture, qui en est une composante essentielle, souffre beaucoup.
Le premier aspect est d'ordre culturel : certains de nos collègues qui pensaient que le travail pouvait se partager – je pense aux 35 heures – ont oublié que les agriculteurs, liés par leur temps de travail à la contrainte de l'élevage des animaux, par exemple, n'en ont en aucun cas bénéficié.
L'écart de cadre de vie entre la profession agricole et les autres catégories sociales s'est donc accentué. Pis encore, les structures qui se sont regroupées dans le cadre de groupements et qui employaient du personnel en appliquant cette mesure ont vu combien cette dernière les pénalisait aussi dans la gestion de ces groupes.
Nous comprenons les inquiétudes, voire le désespoir de beaucoup de nos agriculteurs aujourd'hui. La baisse de la rémunération de leur production, parfois et même souvent le travail à perte, exaspèrent. Et pourtant, l'agriculture française est une des toutes premières du monde, un des fleurons de notre économie. Encore faut-il que nos agriculteurs – voyons dans ce « nos » de l'affectif et non du possessif – puissent vivre décemment et envisager l'avenir pour eux et pour les jeunes en cours d'installation.
Et c'est le coeur du problème : le présent certes, mais il faut aussi se préoccuper de l'avenir. Sous l'impulsion de la France, de notre Président et de vous-même, monsieur le ministre, et avec le soutien d'autres pays européens, la politique européenne agricole sera maintenue, mais comment sécuriser le revenu de nos agriculteurs qui ont fait et font encore des investissements considérables ? Ces investissements, ils les ont faits certes pour améliorer leur outil de travail, mais aussi pour tendre vers une agriculture durable.
En effet, les mises aux normes des bâtiments d'élevage, même si elles ont pu donner droit à des subventions, se sont révélées coûteuses pour eux. Beaucoup d'entre eux, couverts de dettes, ont du mal à faire vivre leur famille avec des revenus trop aléatoires. Nous allons essayer de sécuriser ces revenus à travers la contractualisation.
Je viens précisément d'une région, le sud de l'Aveyron, où la contractualisation est une réalité depuis plusieurs dizaines d'années. Le système de confédération de Roquefort, dans le cadre d'une AOC, associant les producteurs et les industriels, permet par la discussion de fixer annuellement le prix du lait de brebis et assure un revenu décent aux agriculteurs.
Dire que tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes serait stupide. L'année dernière, les négociations ont été rudes dans un contexte de crise mais ont fini par aboutir. Ce « filet de sécurité », si j'ose m'exprimer ainsi, est intéressant, car il privilégie la négociation et la contractualisation.
Nous n'attendons pas tout de la LMA mais dans un contexte difficile, où les consommateurs ne voient pas réellement de baisse des prix des produits, on ne comprendrait pas que nous ne fassions rien pour établir de nouvelles règles du jeu.
Les transformateurs industriels, les distributeurs gagnent leur vie : ne baissons pas les bras et faisons en sorte que ceux qui ont semé puis récolté, élevé et engraissé, puissent vivre décemment de leur travail.
La LMA ne résoudra pas tout, mais il s'agit de ne pas être fataliste. Ne rien faire eût été suicidaire. La LMA arrive à point nommé pour créer de nouvelles règles et encourager une agriculture durable et puissante afin qu'elle reste une des toutes premières forces économiques de notre pays et que nous soyons fiers, dans les prochaines années, d'installer encore et toujours de nombreux jeunes agriculteurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)