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Intervention de Danielle Bousquet

Réunion du 29 juin 2010 à 9h30
Prévention et répression des violences faites aux femmes — Discussion en deuxième lecture d'une proposition de loi

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanielle Bousquet, présidente de la commission spéciale :

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, cette journée du mardi 29 juin 2010 marque une étape très importante dans l'histoire de la lutte contre toutes les formes de violences exercées à l'encontre des femmes, car notre assemblée se dirige vers l'aboutissement de travaux que nous avons menés avec la volonté d'avoir une approche globale de ces violences spécifiques, afin de mieux les prévenir, de mieux protéger les victimes et de mieux sanctionner leurs auteurs.

Comme vous le savez, la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui en seconde lecture est le fruit des travaux de la mission d'évaluation de la politique de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes, créée par le président de l'Assemblée nationale, que je tiens à saluer.

Animés par la même volonté d'agir avec détermination et de façon globale pour lutter contre ces violences prégnantes et inacceptables, les membres de la mission ont cosigné et déposé tous ensemble, en novembre 2009, la proposition que nous discutons, et qui vise un double objectif.

Nous voulions d'abord appréhender les violences faites aux femmes sous toutes leurs formes, qu'elles s'exercent au sein du couple, de la famille, ou au travail, qu'il s'agisse de violences physiques ou psychologiques, de menaces de mariage forcé ou de mutilations sexuelles.

Nous voulions ensuite renforcer la pertinence et l'efficacité de la réponse, tant civile que pénale, apportée aux victimes et garantir leur accès au droit, en nous appuyant bien évidemment sur les acteurs, notamment associatifs, qui réalisent un travail remarquable, hors du commun tant il est militant et difficile, et sans lequel le constat déjà inacceptable de la persistance de ces violences serait encore plus accablant.

Ces objectifs ont été pour l'essentiel partagés par le Sénat, qui a adopté le 24 juin 2010 cette proposition de loi, en lui apportant plusieurs modifications. Certaines représentent une avancée, d'autres sont plus discutables.

Ainsi, je regrette le nouvel intitulé du texte, qui, à mon sens, ne reflète pas la totalité de notre démarche ni notre volonté de considérer qu'il s'agit de violences de genre.

Sur ce point, il y a manifestement encore besoin de pédagogie, car ces violences sont une réalité sociale indiscutable. Elles sont commises sur des femmes du seul fait qu'elles sont femmes, et elles sont spécifiques parce qu'elles prennent leur source dans les inégalités qui persistent aujourd'hui encore entre hommes et femmes dans tous les domaines, y compris en France, pays pourtant évolué comme chacun sait.

Les chiffres sont là, indiscutables. Dans les couples, ce sont, neuf fois sur dix, les femmes qui sont touchées. Les mariages forcés et les mutilations sexuelles concernent exclusivement les jeunes filles et les femmes. Les victimes de viols sont presque toujours des femmes, et nous pourrions ainsi multiplier les exemples.

Vouloir diluer, banaliser ce type de violence, c'est nier la réalité des rapports d'inégalité entre les sexes qui ont encore largement cours en France et dans le monde, dans certains pays plus encore que dans le nôtre, alors que c'est justement l'objectif d'égalité entre les hommes et les femmes qui avait structuré notre travail.

Je regrette également que nos collègues sénateurs n'aient pas souhaité introduire dans le code civil une définition de l'intérêt de l'enfant, car je continue à considérer qu'un mari violent ne peut pas être un bon père, un père qui structure et éduque un enfant. C'est pourquoi j'aurais voulu que le Sénat affirme, aussi explicitement que nous l'avions fait, que l'intérêt de l'enfant peut justifier le refus éventuel, pour motif grave, du droit de visite et d'hébergement au parent auteur de violences.

Je regrette enfin, et c'est le seul point sur lequel je suis en léger désaccord avec le rapporteur, que la médiation pénale puisse encore être envisagée dans les cas où la victime ne bénéficie pas d'une ordonnance de protection. Je garde la conviction que cette réponse est dans tous les cas incompatible avec la réalité de la violence physique et psychologique.

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