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Intervention de Daniel Paul

Réunion du 8 juin 2010 à 21h30
Marché de l'électricité — Article 1er, amendement 119

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDaniel Paul :

…hors du territoire national et l'ensemble des électriciens européens pourront alors bénéficier du parc nucléaire français, de la « rente » comme on l'a improprement appelée. De ce fait, le bénéfice qu'est censée tirer de cette situation l'industrie française n'en serait plus un.

L'avantage compétitif de notre pays, résultat de dizaines d'années d'investissement et de recherche, financé au fil des années par les factures des usagers, serait bradé aux intérêts du secteur privé, d'opérateurs qui ne portent pas de projet industriel, mais essentiellement, pour beaucoup d'entre eux, un projet financier.

Les consommateurs, qu'ils soient domestiques ou industriels, n'ont rien à gagner à cette réforme puisque comme l'indiquait notre collègue Jean Claude Lenoir dans un entretien accordé, il y a quelques jours, au journal Les Échos : « On a trop longtemps entendu que l'ouverture des marchés et le développement de la concurrence allaient profiter aux consommateurs et qu'ils allaient bénéficier de la baisse de prix. On l'a dit à un moment où, de fait, il y avait une baisse conjoncturelle. Mais la vérité est qu'on ne voit pas de baisse possible compte tenu des investissements à réaliser. » Vous ai-je bien cité, monsieur le rapporteur ? (M. le rapporteur acquiesce.)

En revanche, notre pays a beaucoup à perdre, notamment en matière de sécurité des approvisionnements. Dans le nucléaire, le retour sur investissement est beaucoup plus long, car il nécessite des financements importants et s'amortit sur le long terme. Or, la marge que réaliseront les concurrents d'EDF ne sera pas utilisée pour investir dans les moyens de production d'électricité. Ce nouveau dispositif risque également d'amener EDF à reconsidérer sa stratégie. Pourquoi investir aujourd'hui dans des moyens de production, si demain ce sont des sociétés concurrentes qui en tirent bénéfice ?

Des incertitudes pèsent également sur le prix de l'ARB, l'accès régulé à la base. On sait que, pendant trois ans après la promulgation de cette loi, il sera fixé par les ministres chargés de l'industrie et de l'économie, mais ensuite ? Certains nouveaux entrants demandent qu'il soit le plus bas possible, peu importe que cela ne permette pas le renouvellement du parc de production. Certains même « exigent » que la loi fixe des « tarifs de gros qui devront être inférieurs à ceux proposés par EDF à ses clients particuliers ».

Nous savons que Bruxelles n'admettra jamais que les tarifs régulés soient différents du prix à l'accès régulé à l'électricité de base, ce qui entraînera de fait une augmentation bien réelle des tarifs pour les consommateurs. Il faudrait que vous nous expliquiez comment il pourrait en être autrement.

Cet amendement entend supprimer cette mesure dont le seul but est de doper artificiellement la concurrence, afin de soutenir l'émergence de nouveaux opérateurs qui prendront des dividendes. L'attitude du Gouvernement en la matière n'est pas responsable, alors que nous sommes en période de crise, que la précarité énergétique grandit, que de nombreuses entreprises sont en situation de fragilité et qu'une hausse des tarifs de l'énergie risque de leur être fatale.

Je pense à la SNCF. Nous avons eu, il y a quelques semaines, un débat autour de cette entreprise publique, de son évolution, que vous imposez. L'audition de son président M. Pepy par la commission des affaires économiques et par la commission du développement durable, il y a quelques jours, a confirmé les espoirs qu'il met dans son entreprise – c'est normal – mais également les grandes difficultés auxquelles elle est confrontée. Nous ne voyons pas de quelle manière, dans le contexte actuel et compte tenu de cette loi, vous pourriez permettre à la SNCF de bénéficier d'un tarif approprié. Je rappelle les propos tenus à ce sujet par Jean Gaubert.

EDF est imbattable dans son domaine et le rôle de l'État est de soutenir cette entreprise publique, en faisant en sorte que notre pays ne change pas de politique énergétique dans ce domaine. Il y va de l'intérêt des Français, de celui de son industrie et de l'attractivité de son territoire.

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