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Intervention de Sébastien Huyghe

Réunion du 18 mai 2010 à 21h30
Application de l'article 65 de la constitution — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSébastien Huyghe :

Monsieur le président, madame la ministre d'État, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, permettez-moi au préalable de m'associer, ainsi que l'ensemble du groupe UMP, au satisfecit délivré par mon collègue Michel Hunault à l'action de la majorité et du Gouvernement en matière de justice, à un peu plus de la moitié de la législature. Nous sommes très heureux d'y avoir contribué, notamment par la révision en profondeur de la Constitution, révision qui, de l'avis d'une majorité de nos concitoyens, a permis des avancées majeures en leur faveur.

Le projet de loi organique que nous examinons est inspiré par la volonté de donner au Conseil supérieur de la magistrature une composition et des attributions adaptées à l'évolution des institutions et de la société, conformément à l'esprit de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008.

Si la nouvelle rédaction de l'article 65 de la Constitution prévoit des modifications extrêmement détaillées, le projet de loi organique apporte des précisions supplémentaires concernant la composition et le régime des incompatibilités, les règles de fonctionnement du Conseil supérieur de la magistrature, ainsi que des règles relatives à la matière disciplinaire. Enfin, il précise les conditions de la mise en oeuvre de la saisine du CSM par le justiciable, disposition fondamentale qui permettra de rapprocher le citoyen et la justice.

La plupart des dispositions ont été adoptées en termes identiques par les deux assemblées. C'est notamment le cas de la composition du CSM et de ses règles d'organisation et de fonctionnement.

Le Sénat a apporté un certain nombre de modifications au texte voté par l'Assemblée nationale.

Tout d'abord, il a introduit deux nouvelles dispositions qui ont fait l'objet d'une adoption conforme par notre commission des lois.

La première consiste à abroger la disposition selon laquelle les questions prioritaires de constitutionnalité sont transmises par les juridictions de première instance à une formation spéciale de la Cour de cassation, présidée par son Premier président. Le Sénat a souhaité que le soin de trancher ces questions soit laissé aux formations de droit commun de la Cour. L'objectif est de ne pas imposer des charges trop lourdes au Premier président de la Cour de cassation. Les formations de droit commun de la Cour de cassation peuvent se voir confier le soin de se prononcer sur le renvoi au Conseil constitutionnel des questions prioritaires de constitutionnalité, à l'instar de ce qui existe pour le Conseil d'État.

La seconde consiste à remplacer, au sein de la commission d'avancement, le Premier président de la Cour de cassation par le doyen des présidents de chambre de ladite Cour et le procureur général près la Cour de cassation par le plus ancien des premiers avocats généraux. Cette disposition, animée par le même souci de ne pas surcharger le Premier président, s'explique aussi par la volonté de préserver l'indépendance de la commission d'avancement par rapport aux formations du CSM chargées de se prononcer sur les nominations. Dans la mesure où le Premier président et le procureur général sont appelés à présider les formations du CSM compétentes pour les nominations de magistrats, il semble en effet préférable qu'ils ne conservent pas leur place dans la commission d'avancement.

Si ces modifications apparaissent opportunes, d'autres appellent de notre part un certain nombre d'observations.

Le Sénat avait introduit en première lecture un article relatif à l'autonomie financière du CSM. Cet article, supprimé par notre assemblée, a été rétabli par les sénateurs. Sans que nous soyons opposés à cette idée, et bien que nous souscrivions au souci de doter le CSM d'un budget suffisant, il est apparu aux membres de la commission des lois de notre assemblée que cette mesure risquait de pénaliser l'institution. Néanmoins, le souci d'assurer le fonctionnement autonome du CSM a conduit la commission à adopter un amendement de son rapporteur visant à confier au président de la formation plénière du CSM la fonction d'ordonnateur de ses crédits, comme c'est le cas notamment pour le Conseil constitutionnel.

Ensuite, le Sénat a voté en première lecture une extension du champ des incompatibilités pour l'avocat, en lui interdisant d'exercer son activité de conseil pour une partie engagée dans une procédure ou de plaider devant les tribunaux. Avec le soutien du Gouvernement, l'Assemblée nationale a supprimé cette extension du champ des incompatibilités. Le Sénat l'a rétablie en deuxième lecture, mais en la limitant à une interdiction de plaider.

La disposition introduite par le Sénat semble paradoxale. Dans la mesure où le constituant a voulu qu'un avocat soit membre du CSM, il apparaît contradictoire de lui faire perdre dès sa désignation sa capacité à exercer sa profession. Par ailleurs, les sanctions en cas de manquement aux obligations déontologiques apportent des garanties suffisantes. Il n'y a donc pas lieu de craindre les quelques cas où l'avocat aurait à plaider devant des magistrats dont il a eu à connaître du dossier.

Enfin, le Sénat a prévu en deuxième lecture d'imposer des règles de déontologie plus strictes, par la sanction des obligations déontologiques et par la mise en oeuvre de la règle du déport. En première lecture, il avait ajouté les exigences d'indépendance, d'impartialité et d'intégrité qui s'imposent aux membres du CSM et consacré la règle du déport du membre sur l'impartialité duquel existe un doute. Ce même article confie au président de chacune des formations du CSM le soin de veiller au respect de ces obligations par des mesures appropriées.

L'Assemblée nationale a supprimé cette dernière disposition, mais a accueilli favorablement le principe de l'article en ajoutant l'exigence de dignité.

En deuxième lecture, le Sénat a tenu compte des critiques adressées à sa position et proposé un mécanisme de sanction collégial, selon une règle de majorité exigeante. Ainsi, la suspension temporaire ou la démission d'office pourra être prononcée par la formation plénière du CSM, saisie par le président d'une des formations et se prononçant à la majorité de ses membres, à l'encontre d'un membre ayant manqué à ses obligations déontologiques.

La commission des lois de notre Assemblée a proposé de revoir l'échelle des sanctions applicables, en substituant à la suspension temporaire l'avertissement. Cela permettra entre autres d'éviter une rupture dans l'exercice des fonctions de membre du CSM.

Par ailleurs, le Sénat a prévu que, dans le cas où le président d'une formation du CSM l'estime nécessaire, la question du déport d'un des membres de la formation sera discutée et tranchée à la majorité de ses membres. Cependant, cette modification peut être assimilée à une mesure d'exclusion temporaire, inadaptée à cette institution. Il convient donc de supprimer cette mesure et de conserver la règle de déport qui s'applique dans toute juridiction.

Madame la ministre d'État, mes chers collègues, la réforme du CSM est à n'en pas douter un élément majeur et nécessaire de la révision constitutionnelle de juillet 2008. C'est pourquoi le groupe UMP votera ce texte avec enthousiasme. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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