EDF est en charge d'une mission de service public et il est de mon devoir de défendre une société qui appartient au patrimoine national français. Il ne faut pas confondre la théologie et la pratique ! J'accepte, bien entendu, la concurrence, mais à condition qu'elle soit utile à la France et à nos concitoyens. À moi, ensuite, de faire du Groupe un monopole compétitif en prouvant qu'il est le meilleur dans un marché ouvert !
Par ailleurs, le texte qui nous réunit a structurellement évolué, notamment en posant un certain nombre de principes : priorité à l'investissement et à l'indépendance énergétique ; conscience des possibles effets d'aubaine spéculative ; travail en faveur de l'équilibre économique, enfin. Vendre au prix marginal, en effet, reviendrait à moyen terme à condamner le parc de production énergétique français, et c'est précisément ce qui se passerait si le coût de cession était élaboré à partir du prix de revient comptable – défini à partir des infrastructures dont le coût est déjà amorti – et non du prix de revient économique. N'importe quel gestionnaire de PME fait la différence. Mettre à la disposition de nos concurrents, au prix de revient, une quote-part significative de notre production pour faciliter l'accès à la concurrence ne constitue-t-il pas déjà un énorme effort ? Aller au-delà serait irresponsable et je ne m'y résous pas.
En outre, il est très difficile de définir le prix d'équilibre : alors que la période de transition est de quinze ans, nous devons par exemple anticiper le coût des investissements nécessaires à la rénovation de notre parc de centrales sur deux périodes de dix ans. L'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) n'ayant pas fourni d'indications particulières à ce jour, je l'ai quant à moi d'abord estimé à 400 millions d'euros avant de prendre mes fonctions, puis à 600 millions d'euros, pour chacune des 58 tranches nucléaires sur vingt ans. C'est donc au final 35 milliards qui seront nécessaires à l'extension de la durée de vie de notre parc ! En y incluant la maintenance, la prolongation, les provisions pour démantèlement et l'ensemble des coûts d'exploitations courants, le coût de revient économique se situerait in fine autour de 45 euros. Néanmoins, durant cette phase de transition, soucieux de faire preuve de bonne volonté et désireux de nous tenir au plus près du TaRTAM indexé, nous ferons en sorte d'engager le processus, comme je l'ai déjà dit, avec un prix de départ de 42 euros. S'il devait être inférieur, cela relèverait du pillage.
Le renouvellement du parc sera quant à lui coûteux : si les technologies progressent, il en va de même du coût de revient – ainsi l'EPR, par exemple, est-il plus cher au mégawatt installé qu'une centrale classique.
S'agissant du rapport de la CRE sur les réseaux de distribution, dont cette dernière dément elle-même l'existence, je n'en ai quant à moi nulle connaissance et vous comprendrez donc que je ne puisse commenter des rumeurs, fussent-elles parées d'une aura officielle.
Cela dit, il serait absurde de prétendre que des problèmes de distribution ne se posent pas. La qualité et l'efficacité du service ne répondant pas à mes attentes, j'ai installé une nouvelle équipe. Par ailleurs, si je déplore l'organisation actuelle, je la subis comme vous et j'essaie également de faire en sorte que les nouvelles règles, que je me dois de respecter, ne pénalisent pas trop nos clients. Quoi qu'il en soit, je vous garantis que la situation va s'améliorer : ERDF recevra chaque année 2,6 milliards d'investissement, ce qui représente 50 % de plus qu'il y a trois ans.
Oui, je crois à ce texte plus équilibré et plus satisfaisant que ne l'était le projet initial sur le plan industriel. Je donne ainsi acte à la représentation nationale pour le progrès accompli, même si je souhaite que l'on complète ce texte en y intégrant notamment le prix d'équilibre, qu'il n'appartient pas à la CRE de définir. Je me félicite également des avancées concernant l'abus du « droit à la repentance » : oui, il est possible de se tromper de fournisseur mais pas tous les trois mois !
Enfin, l'ARB concerne bien entendu l'ensemble de la base, et pas seulement le domaine nucléaire.
J'ajoute que toute allusion aux télécommunications est industriellement erronée : si les infrastructures sont comparables, les capacités de production d'une centrale sont par définition beaucoup plus immédiatement limitées et la concurrence n'y peut rien.
Je dois à nos clients une électricité et des services de qualité à des conditions compétitives : pas plus que je ne peux adresser à mes collaborateurs un autre message, je ne saurais les inviter à renoncer par principe à des parts de marché pour complaire à Bruxelles. Je me refuse à adopter une telle attitude inefficace pour le pays !
Enfin, parce que la mise à disposition facile de l'outil de production d'EDF pour ses propres concurrents afin qu'ils vendent sa propre énergie – j'attire votre attention sur le caractère hallucinant du scénario – doit bien se terminer un jour, il conviendra que ces derniers anticipent la fin de cette période par une décroissance des volumes fournis, dont le niveau devra être défini.
Par ailleurs, je mesure la difficulté juridique consistant à interdire de vendre de l'électricité à l'étranger et, donc, de limiter les effets d'aubaine.
Depuis cinq ans, la dégradation du coefficient de disponibilité des centrales est particulièrement préoccupante puisque nous sommes passés de 83 % à 78 %, et même, l'année dernière, à 75 % si l'on tient compte des conséquences de la détérioration du climat social. Or, dès cette année, ce taux sera amélioré et j'espère pouvoir le porter d'ici 2013 ou 2014 à 85 %.
J'ajoute que nous sommes contraints par la disponibilité des pièces mécaniques, notamment des générateurs de vapeur, dont la production industrielle est insuffisante pour répondre à nos besoins, et que j'ai réorganisé les services de maintenance afin d'accroître leur efficacité.
Au final, nous devons préserver une vision industrielle et non financière, spéculative ou comptable de l'entreprise : l'intérêt supérieur du service public en dépend !