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Intervention de Jean Gaubert

Réunion du 8 avril 2010 à 15h00
Réforme du crédit à la consommation — Article 1er a, amendement 14

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean Gaubert :

Madame la ministre, nous entrons directement dans le vif du sujet, puisque l'article 1er A porte sur la redéfinition du taux d'usure, que vous venez d'évoquer. Cet article part certainement d'un bon sentiment, mais, lorsque l'on se réfère au rapport de notre collègue sénateur Dominati, on constate qu'il ne va pas forcément dans le bon sens, puisqu'il se traduira, certes, par une toute petite baisse du taux de crédit le plus élevé – appliqué aux petites sommes –, mais aussi par une hausse très importante du taux des crédits intermédiaires, qui concernent des sommes comprises entre 3 000 et 6 000 euros. Cette disposition ne me semble donc pas aller dans le sens que nous souhaitons, à savoir contenir le taux d'usure dans des proportions raisonnables.

Je vous rappelle que, dans son excellent rapport sur le crédit à la consommation, le médiateur de la République indique que, lorsque le taux de crédit dépasse 10 %, les gens ne peuvent plus rembourser. Or, actuellement, c'est le cas : ils ne peuvent plus rembourser. Il faut donc trouver un moyen de le leur permettre. Il ne suffit pas de dire qu'ils doivent rembourser ; encore faut-il qu'ils le puissent. Si le taux de certains crédits demeure à hauteur de 20 %, ils n'y parviendront pas.

Par ailleurs, je souhaiterais apporter plusieurs éléments d'analyse portant sur l'ensemble de l'article.

Le premier concerne la responsabilité des banques et, surtout, leur engagement. En effet, celles-ci ne comprennent pas qu'on vienne les embêter alors qu'en matière de crédits à la consommation, les défaillances sont peu nombreuses : 2 %. Mais si le nombre de défaillances est si bas, pourquoi prêtent-elles à des taux aussi élevés ? Avec un tel pourcentage de défaillances, les taux actuels, qui frisent ou dépassent 20 %, ne sont plus justifiés.

En outre, si les défaillances sont si peu nombreuses, c'est parce que les moyens de coercition des banques sont très puissants, et cela ne signifie pas que les foyers endettés ne rencontrent pas de difficultés. Au reste, les élus locaux que nous sommes sont bien placés pour le savoir. Que ce soit en tant que président d'un office HLM ou en tant que maire d'une commune, nous savons les difficultés que certaines personnes rencontrent pour payer leur loyer, la cantine scolaire de leurs enfants, leurs impôts locaux, et j'en passe. Puisque les moyens de coercition dont elles disposent permettent aux banques de récupérer l'argent, je ne vois pas comment elles peuvent justifier le fait de fixer des taux d'intérêt aussi élevés. C'est pourquoi nous proposerons, dans des amendements qui viendront en discussion ultérieurement, d'autres méthodes pour calculer le taux d'usure.

J'ajoute que celui-ci devrait être indexé sur le taux de l'argent, ce qui n'est pas le cas actuellement. Que je sache, il y a deux ans, lorsque le taux de la BCE et les taux interbancaires atteignaient 5 %, le taux d'usure n'était pas plus élevé qu'aujourd'hui, alors que les banques se financent actuellement à 1,5 %, 2 % maximum. On ne s'étonne plus qu'en une année, elles soient parvenues à « restaurer leur situation », comme elles disent ; beaucoup de chefs d'entreprise et de familles seraient heureux de pouvoir restaurer aussi vite une situation terriblement compromise. Si les banques y sont parvenues, c'est parce qu'elles se sont payées sur les gens qui ont besoin du crédit, plus d'ailleurs que sur ceux qui font seulement des dépôts.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous jugeons que l'article 1er A n'est pas convenable. Peut-être conduira-t-il à augmenter l'encours de prêts – nous y reviendrons quand nous aborderons la question du fichier positif –, mais il contribuera aussi à accroître les difficultés de nos concitoyens. Or, j'ai cru comprendre en vous écoutant, madame la ministre, que ce n'était pas votre objectif.

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