Je soutiens la motion de renvoi en commission de Valérie Fourneyron pour plusieurs raisons.
D'abord, nous légiférons dans la précipitation, et même dans la fébrilité, comme l'a montré ce qui s'est passé lors du vote sur la motion de rejet préalable de Gaëtan Gorce. Pourquoi cette fébrilité ? Elle ne correspond nullement à un motif d'intérêt général, bien au contraire : la seule urgence à laquelle elle réponde est celle des opérateurs privés qui veulent se partager le marché juteux de la publicité sur les jeux en ligne – et de l'ouverture des paris sur la coupe du monde de football qui commencera le 11 juin. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Il n'est pas digne de la représentation nationale de se soumettre ainsi à une pression qui n'est ni celle des Français, ni celle du sport – amateur ou professionnel –, mais uniquement celle des intérêts financiers en jeu. Comme l'a rappelé Valérie Fourneyron, le rapporteur nous a affirmé en commission – et il l'a répété tout à l'heure – qu'il convenait de légaliser ce qui existe de manière illégale, car il fallait, pour assécher le marché illégal, faire naître un autre marché, légal.
Nous pourrions vous accorder le bénéfice du doute si vous luttiez effectivement contre la prolifération des sites illégaux qui existent d'ores et déjà en France. Or, rien n'a été fait pour enrayer cette prolifération. Au contraire, l'impression dominante est que l'on a laissé se développer ces sites pour justifier a posteriori la légalisation et l'ouverture à la concurrence des paris en ligne.
Enfin, vous prétendez que cette loi n'est pas demandée par les opérateurs privés, étant donné que ceux-ci n'auraient aucun intérêt à payer des taxes pour faire ce qu'ils faisaient auparavant sans verser aucune dîme. Mais l'important n'est pas de savoir combien ils vont payer – encore qu'il soit malheureux que le déficit budgétaire soit aujourd'hui à un niveau tel que l'État soit obligé de faire, in fine, les poches des gens qui se trouveront pris dans des mécanismes d'addiction au jeu. L'important est de savoir que ce que les opérateurs vont payer à l'État n'est rien au regard du marché publicitaire énorme qu'ils vont se partager. Au Royaume-Uni, le marché publicitaire des jeux en ligne représente sept milliards d'euros. Les intérêts financiers sont énormes, et c'est sous la pression de ces intérêts que nous légiférons aujourd'hui, plutôt qu'au nom de l'intérêt général.
Nous considérons donc que l'ensemble des amendements que nous avons déposés pour prévenir les conflits d'intérêts, lutter contre l'addiction, maintenir le niveau de financement du sport amateur, doivent être réexaminés, et nous voterons le renvoi en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)