La Commission des lois s'est saisie des articles du projet de loi portant engagement national pour l'environnement dit « Grenelle II », qui traduisent l'engagement pris dans la loi dite « Grenelle I », afin que les collectivités publiques soient exemplaires en matière environnementale et que se mette en place une véritable démocratie écologique.
Le « Grenelle I » a fixé plusieurs objectifs : limiter l'empreinte écologique des activités de l'État et des collectivités territoriales ; assurer que l'État et les collectivités territoriales prennent en compte les conséquences écologiques de leurs décisions ; favoriser la participation du public à la prise de décisions, afin que tous les enjeux – économiques, budgétaires, environnementaux, sociaux... – puissent être mis en balance.
Du « Grenelle II », notre commission s'est saisie pour avis de deux séries de mesures : d'une part, l'article 26, qui oblige certaines personnes morales publiques ou privées à réaliser un bilan des émissions de gaz à effet de serre et qui rend obligatoire les plans climat-énergie territoriaux ; d'autre part, les articles 86 à 95, qui améliorent la participation du public sur les projets de travaux ou d'aménagement et les documents de planification, et qui réforment les procédures d'étude d'impact, d'évaluation environnementale, d'enquête publique et de débat public.
L'article 26 rend obligatoire la réalisation d'un bilan des émissions de gaz à effet de serre pour l'État, les collectivités locales – à l'exception des communes et communautés de communes de moins de 50 000 habitants – et les personnes morales de droit public employant plus de 250 personnes. Les entreprises de plus de 500 salariés qui exercent leur activité dans un « secteur fortement émetteur » devront également réaliser un tel bilan. Les collectivités territoriales de plus de 50 000 habitants seront en outre tenues d'élaborer un plan climat-énergie territorial, regroupant toutes les actions qu'elles envisagent pour lutter contre le réchauffement climatique ou s'y adapter. Ce plan comprendra aussi bien les actions directes de la collectivité que celles menées auprès d'autres acteurs locaux, comme les politiques d'incitation ou de sensibilisation.
Les articles 86 à 95, pour leur part, réforment les procédures de participation du public pour les rendre plus systématiques et pour faciliter la prise en compte de l'opinion du public. La plupart des modifications apportées visent à mettre notre droit en conformité avec divers textes internationaux et européens, mais aussi notre propre Constitution.
Il convient ainsi de mieux transposer la directive communautaire du 27 juin 1985 relative à l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement et celle du 27 juin 2001 relative à l'évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l'environnement.
Il faut également respecter les engagements pris dans la convention d'Aarhus sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement.
Enfin, la Charte de l'environnement, qui fait désormais partie de notre bloc de constitutionnalité, a créé un nouveau principe constitutionnel de participation des citoyens en matière environnementale. Son article 7 dispose ainsi que « Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement ».
Le projet de loi renforce donc les garanties de participation du public, notamment en consacrant dans la loi des règles qui n'étaient auparavant fixées que par décret.
Les principales modifications sont les suivantes :
– premièrement, l'obligation d'effectuer une étude d'impact sur un projet ne dépendra plus uniquement des seuils réglementaires, mais fera l'objet d'un examen au cas par cas ;
– deuxièmement, une consultation du public sera obligatoire pour tout projet soumis à étude d'impact ou évaluation environnementale, même lorsque le projet ne fait pas l'objet d'une enquête publique ;
– troisièmement, les documents mis à la disposition du public pour ces procédures de consultation seront plus nombreux, comportant notamment un résumé « non technique » des projets soumis à étude d'impact ;
– quatrièmement, l'administration sera obligée de prendre en considération les résultats de la consultation du public et devra indiquer dans sa décision d'autorisation les mesures à prendre pour éviter, limiter ou compenser les effets négatifs du projet sur l'environnement ;
– enfin, cinquièmement, des agents publics assermentés pourront inspecter les lieux des travaux à tout moment pour vérifier que les maîtres d'ouvrage respectent leurs obligations.
Les articles 90 à 94 quater, quant à eux, rationalisent les enquêtes publiques. Les régimes d'enquête publique se sont en effet accumulés au fil des lois successives, source de complexité pour les maîtres d'ouvrage. Un même projet peut faire l'objet de plus de dix enquêtes publiques régies par des législations différentes !
Pour simplifier le droit applicable, le projet de loi répartit toutes les enquêtes publiques entre deux troncs communs : d'une part, une enquête publique régie par le code de l'environnement, héritière de « l'enquête Bouchardeau » ; d'autre part, une enquête publique, régie par le code de l'expropriation, pour cause d'utilité publique, pour tous les sujets sans enjeu environnemental. L'enquête publique sera organisée selon des modalités plus souples, moins formelles, ce qui devrait limiter les risques d'annulation par le juge administratif.
L'utilisation des nouvelles technologies sera favorisée pour permettre à un maximum de personnes de s'informer et de participer, sans contraintes de distance ni de temps.
Enfin, l'article 95 réforme la Commission nationale du débat public. Il ajoute deux représentants des entreprises et deux représentants des salariés afin d'assurer la représentation de toutes les parties prenantes du Grenelle de l'environnement. Il étend la compétence de la Commission en lui permettant d'organiser des débats sur des options générales en matière de développement durable et de désigner un garant de la concertation pour les projets qui ne font pas l'objet d'un débat public. Enfin, l'article 95 améliore l'articulation entre les différentes procédures de consultation du public en prévoyant que la Commission nationale du débat public doit assurer le suivi d'un projet entre la fin du débat public et le début de l'enquête publique.
Toutes ces modifications devraient rendre les procédures de consultation du public plus effectives, plus interactives et moins formelles.