Le projet de loi organique soumis aujourd'hui à notre examen constitue la deuxième étape de la réforme du Conseil économique et social – désormais Conseil économique, social et environnemental –, engagée lors de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008. Cette entreprise de modernisation sera poursuivie par l'adaptation des textes réglementaires dans des délais contraints, puisque nous avons prolongé le mandat des membres du Conseil jusqu'au 30 septembre 2010 par le vote de la loi organique du 3 août 2009. Il reviendra ensuite au Conseil nouvellement constitué d'adapter son règlement intérieur en conséquence des modifications de la loi organique et de ses textes d'application.
Le projet de loi offre une traduction aux trois axes de modernisation décidés lors de la révision constitutionnelle : l'élargissement de la compétence du Conseil aux questions environnementales, la création d'une saisine parlementaire et l'instauration d'une saisine par voie de pétition.
Les articles 1er à 3 du projet de loi organique adaptent les missions du Conseil à sa nouvelle compétence environnementale. L'article 1er précise qu'il assure la participation des principales activités du pays à la politique économique, sociale et environnementale de la Nation et peut faire part des adaptations qui lui paraissent nécessaires dans ces trois domaines, pour lesquels l'article 3 mentionne qu'il contribue à l'évaluation des politiques publiques.
L'article 2 tire pour sa part les conséquences de la création, lors de la révision constitutionnelle, de nouvelles saisines. En plus des saisines déjà prévues par le texte en vigueur, le Conseil devra obligatoirement être saisi sur les projets de loi de programmation à caractère environnemental et pourra l'être sur tout problème à caractère environnemental et sur les projets de loi de programmation définissant les orientations pluriannuelles des finances publiques.
Le même article précise la mise en oeuvre de la nouvelle saisine parlementaire. Comme cela avait été évoqué lors de la révision constitutionnelle, il est proposé que la saisine du CESE se fasse par l'intermédiaire des présidents de l'Assemblée nationale ou du Sénat. Le rapprochement du CESE et des assemblées parlementaires se traduit également par l'adaptation de plusieurs autres dispositions de l'ordonnance de 1958, visant à permettre aux présidents des assemblées de demander des études aux sections du CESE, d'obtenir la tenue de séances spéciales et d'être destinataires des procès-verbaux des séances tenues pour répondre à une saisine parlementaire.
L'article 12 du projet de loi organique s'inscrit dans la même démarche de rapprochement des assemblées parlementaires et du Conseil en proposant que, comme les membres du Gouvernement, les parlementaires puissent avoir accès à l'assemblée du Conseil et aux sections et y être entendus lorsqu'ils le demandent.
Le troisième axe de la réforme consiste à rapprocher le Conseil des citoyens, par la mise en oeuvre d'une saisine par voie de pétition prévue par l'article 69 de la Constitution et la réactualisation de la composition du Conseil pour le rendre plus représentatif.
Les modalités fixées par l'article 4 du projet de loi organique pour la mise en oeuvre du droit de pétition se caractérisent par leur souplesse. Elles reposent sur les capacités d'organisation des acteurs de la société civile, à qui est confiée la collecte des 500 000 signatures, et donnent au CESE l'entière responsabilité de l'ensemble de la procédure. Le droit de pétition sera largement ouvert, puisque pourront être signataires toutes les personnes majeures, de nationalité française ou résidant régulièrement en France. Cette procédure étant entièrement nouvelle dans notre droit, il est pour l'heure impossible d'avoir une idée précise de l'usage qui en sera fait. Il me paraît donc nécessaire de ne pas l'enfermer dans un cadre trop strict et de laisser le Conseil développer les procédures les plus adaptées au vu de l'expérience des premières pétitions.
L'article 6 du projet de loi organique fixe la nouvelle composition du Conseil et instaure une règle de parité. Conjuguées avec la limitation à deux mandats consécutifs prévue par l'article 8, ces dispositions se traduiront par un renouvellement du Conseil beaucoup plus important qu'auparavant.
Comme cela avait été évoqué dès l'exposé des motifs du projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions de la Ve République, deux nouvelles catégories de membres font leur apparition au Conseil : d'une part, les jeunes et les étudiants ; d'autre part, les associations et fondations agissant dans le domaine de la protection de l'environnement. Le Constituant ayant, sur la proposition vertueuse de notre président, plafonné dans la Constitution le nombre de membres du CESE, d'autres catégories de membres voient leur représentation réduite. C'est en premier lieu le cas des entreprises publiques, des Français établis hors de France, du logement et de l'épargne, dont la représentation est supprimée. Un effort important est également consenti par les représentants du monde agricole, dont la représentation est réduite de cinq sièges au titre des exploitants agricoles et de six sièges au titre de la mutualité et des coopératives agricoles.
Dans ce contexte, peu de catégories parmi celles qui sont déjà représentées au CESE voient leur représentation augmenter. C'est toutefois le cas des professions libérales, qui passent de trois à quatre sièges, et des associations autres que les associations familiales et environnementales, qui passent de cinq à huit sièges.
Au cours des dernières semaines, j'ai pu mesurer la difficulté qu'il y a à proposer une nouvelle composition à effectif constant et, plus encore, de la tâche qui attend le Gouvernement avec la rédaction des décrets d'application qui devront répartir les sièges entre les organisations.
Le compromis proposé par le Gouvernement peut toujours paraître perfectible. Je relève en particulier qu'il se traduit par une diminution sensible du poids des employeurs au sein du futur conseil, puisque la suppression des dix sièges des entreprises publiques et de cinq des vingt-cinq sièges des exploitants agricoles n'est compensée que par l'augmentation d'un siège pour les professions libérales. La place accordée aux entreprises privées et publiques, à l'artisanat et aux professions libérales, malgré l'augmentation dont ces dernières ont bénéficié, ne me paraît pas totalement correspondre à leur poids dans l'emploi ou dans la production de richesses.
Après y avoir longuement réfléchi et en avoir discuté avec M. Jacques Dermagne, président du Conseil économique, social et environnemental, j'ai cependant le sentiment qu'il y aurait plus d'inconvénients que d'avantages à modifier ce que M. Dermagne a comparé à un château de cartes, dont l'équilibre global est susceptible d'être mis en péril par toute modification. L'augmentation d'une catégorie est en effet susceptible de susciter des demandes reconventionnelles d'autres catégories et de relancer les discussions sur la répartition des sièges entre les organisations représentatives de la catégorie concernée.
Je ne vous proposerai donc pas d'amendements modifiant la répartition des sièges entre les différentes catégories, mais je demanderai au Gouvernement de compenser la diminution du poids des employeurs au Conseil en désignant prioritairement parmi les personnalités qualifiées en matière économique des personnes ayant une expérience dans le monde de l'entreprise, de l'artisanat ou des professions libérales.
Les autres dispositions du projet de loi organique consistent en une actualisation de dispositions existantes qui n'appelle pas de commentaire particulier. Selon moi, cependant, la désignation de membres de section par le Gouvernement devra être mieux encadrée qu'elle ne l'est aujourd'hui, afin que la nomination de ces personnalités réponde réellement à un besoin du Conseil.
Je conclus, mes chers collègues, en vous invitant à adopter l'ensemble du projet de loi organique.