Sont-ce les obligations, et notamment les formalités, qui constituent un obstacle ou un frein trop important ?
Il existe aussi la déclaration d'insaisissabilité, faite devant notaire, qui permet à l'entrepreneur de rendre insaisissables les biens de son patrimoine personnel. Là aussi, 10 000 déclarations seulement ont été faites en 2009. C'est peu, mais la protection n'est que partielle, en tout cas insuffisante.
Bref, tous ces dispositifs n'ont eu que peu de succès.
Le nouveau statut qui permettra à l'entrepreneur de déclarer lui-même la part du patrimoine affectée à son entreprise pourrait concerner près de 1,5 million de personnes, c'est-à-dire la moitié des chefs d'entreprise en France, ce qui a été salué par plusieurs organisations comme l'UPA – l'union professionnelle artisanale – ou la CGPME.
Cela étant, l'UPA a émis quelques réserves ; elle souhaite notamment qu'il n'y ait pas un excès de formalisme, que cela n'entraîne pas des coûts, des formalités comptables trop importantes. Elle a aussi souligné le fait qu'il fallait empêcher les établissements bancaires d'exiger une caution autre que celle relevant du patrimoine affecté à l'entreprise.
La confédération générale des petites et moyennes entreprises, sans doute un peu plus prudente, a parlé d'une initiative potentiellement heureuse. Mais elle a tenu à préciser que l'efficacité réelle de cette mesure dépendra pour une bonne part du comportement des acteurs bancaires. Je souhaite, monsieur le secrétaire d'État, que vous précisiez une nouvelle fois la solution que vous avez évoquée tout à l'heure lors de la séance de questions d'actualité. Il ne faut pas transférer le risque que font courir à leur patrimoine les entrepreneurs en leur faisant gager leur patrimoine personnel lorsqu'ils contractent un emprunt auprès d'une banque. J'ai entendu ce que vous proposiez avec OSEO, mais il me semble nécessaire que vous apportiez des précisions sur ce sujet.
J'évoquerai maintenant les limites du projet.
Pouvez-vous nous expliquer clairement, monsieur le secrétaire d'État, ce qui justifie à vos yeux la suppression pure et simple de la déclaration d'insaisissabilité, alors que le Syndicat des indépendants souhaitait manifestement la maintenir ?
Je voudrais aussi relever que la séparation entre patrimoine privé et patrimoine professionnel n'est pas toujours aisée et peut même être considérée comme quelque peu théorique pour certains types d'activités. Imaginons, par exemple, le cas d'un commerçant qui achète une maison lui servant à la fois de local commercial et de lieu d'habitation.
Je voudrais, à l'occasion de ce débat, revenir sur la création du statut d'auto-entrepreneur. Pierre Gosnat l'a évoqué, mais vous ne lui avez pas répondu. Je n'ai pas sur ce sujet une approche idéologique, mais j'estime que cette mesure a été un peu trop souvent « survendue ». L'idéologie était d'ailleurs peut-être plus de votre côté. Je me souviens de ce que disait, il y a quelques années, Alain Madelin, dont vous étiez l'un des proches. Il affirmait vouloir remplacer le contrat de travail par un contrat de prestations commerciales. On pourrait donc voir le statut d'auto-entrepreneur comme le lointain descendant de cette approche.
Il y a eu environ 320 000 créations en un an, mais 60 % des auto-entrepreneurs n'ont déclaré aucun chiffre d'affaires pour les neuf premiers mois de l'année. Tout ceci reste donc virtuel et théorique. Il y a un problème de suivi, d'accompagnement des auto-entrepreneurs. Il ne faudrait pas entretenir l'illusion qu'il est possible de créer une entreprise, sans avoir un capital ou une activité durable qui dépasse le simple statut d'auto-entrepreneur.
Selon une étude du journal Les Échos, nombre d'auto-entrepreneurs naviguent à vue : seuls 23 % d'entre eux ont effectué une étude de marché, 29 % ont chiffré leurs investissements et 19,5 % ont un prévisionnel de chiffre d'affaires.
Je ne reviendrai pas sur la relative précarité ou instabilité à laquelle peut contribuer le statut d'auto-entrepreneur.
Monsieur le secrétaire d'État, je souhaite que vous nous apportiez des réponses sur tous ces points afin de nous éclairer. En fonction de vos réponses, nous adapterons notre vote, sachant que, de toute façon, nous ne voterons pas contre votre texte qui constitue une indéniable avancée.