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Intervention de Guy Geoffroy

Réunion du 9 février 2010 à 17h00
Commission spéciale chargée d'examiner la proposition de loi renforçant la protection des victimes et la prévention et la répression des violences faites aux femmes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuy Geoffroy, rapporteur :

Il y a un an, à la même époque, la mission d'évaluation de la politique de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes a commencé ses travaux. L'important travail qu'elle a effectué a abouti à la rédaction d'un rapport qui a été approuvé de manière unanime. Parce que celui-ci ne devait pas rester lettre morte, une proposition de loi, signée par l'ensemble des membres de la mission, a été déposée le 27 novembre.

Le travail que nous avons engagé n'était pas sans précédent législatif ni politique. Déjà, en 2006, j'avais eu l'honneur d'être le rapporteur d'une proposition de loi votée à l'unanimité par les deux assemblées. Bien que, depuis lors, on ait eu l'occasion d'évaluer sa pertinence et son efficacité, certaines améliorations étaient nécessaires. C'est donc tout naturellement que, saisi par le collectif des associations de défense des femmes, le président de l'Assemblée nationale a créé une mission d'évaluation.

Avant de rendre son rapport, celle-ci a auditionné plus d'une centaine de personnes. Elle a dressé un état des lieux global des violences faites aux femmes, ainsi qu'un bilan de la législation et de la réglementation en vigueur. Elle s'est rendue sur le terrain. Elle a ensuite formulé soixante-cinq propositions fixant un dispositif cadre intégrant différentes dispositions de nature constitutionnelle, législative et réglementaire, dont découlent les articles de la proposition de loi.

Je remercie les membres de la mission et de la commission spéciale chargée d'examiner la proposition de loi, ainsi que ceux qui leur ont permis de mener à bien un travail de grande qualité. Les échanges avec le Gouvernement ont été fructueux. Un consensus fort s'est dégagé entre toutes les familles représentées à l'Assemblée nationale.

Nous avons cherché à prendre en compte toutes les formes de violences faites aux femmes : au sein du couple, dans l'espace public, au travail ou dans la famille. Les problèmes les plus divers ont été évoqués : accès au droit, autorité parentale, impact des violences sur les enfants témoins et, à ce titre, victimes des violences, problèmes liés au logement, aux ressources ou à la régularité du séjour, prévention, éducation au respect, prise en charge des auteurs des violences, coordination entre les différents acteurs, notamment entre le civil et le pénal, et entre les pilotages national et local.

La proposition de loi est constituée de trois chapitres traitant respectivement de la protection des victimes, de la prévention des violences et de la répression.

La protection des victimes étant notre première préoccupation, l'article 1er crée la possibilité pour le juge de prendre, dans l'urgence, une ordonnance de protection des victimes, afin d'éviter que la situation dans laquelle elles se trouvent ne se dégrade. Le juge disposera désormais de pouvoirs plus étendus que ceux que lui confère déjà l'article 220-1 du code civil. Cette ordonnance de protection est le pivot du texte.

Les articles 3 et 4 portent sur l'exercice de l'autorité parentale par le parent violent.

Les articles 5 à 7 tendent à prendre en compte la situation des femmes étrangères, souvent empêchées par les règles du droit au séjour de faire valoir leurs droits.

L'article 8 vise à consolider le dispositif par la modification du délit de dénonciation calomnieuse, contrepartie nécessaire à la création de nouvelles incriminations pénales, notamment celle de violences psychologiques. Ainsi, les victimes n'auront pas à craindre de se voir injustement attaquées en justice, ce qui libèrera leur parole.

Le chapitre II est consacré à la prévention des violences faites aux femmes, qui appelle un accompagnement des services de l'État. C'est pourquoi, l'article 11 concernait la formation, en matière de prévention et de prise en charge des violences faites aux femmes, de tous les professionnels en contact avec celles-ci.

Les articles 13 et 14 visent à renforcer la lutte contre les incitations, dans les médias, aux violences faites aux femmes. Désormais, le Conseil supérieur de l'audiovisuel pourra être saisi par les associations de défense des droits des femmes.

L'article 15, déclaré irrecevable par le président de la Commission des finances, contient une proposition à laquelle nous sommes très attachés : la création d'un Observatoire national des violences faites aux femmes. J'insiste à mon tour auprès de Mme la ministre d'État pour que le Gouvernement permette, par voie d'amendement, que nous le discutions. Cet article pourrait être avantageusement complété, afin que soit encouragée la production de statistiques sexuées.

La troisième partie du texte vise à combler certaines insuffisances de la législation actuelle, en précisant les incriminations pénales permettant de punir les violences faites aux femmes.

L'article 17 crée le délit de harcèlement au sein du couple. Si, chaque année, 150 à 160 femmes meurent de violences conjugales, elles sont incomparablement plus nombreuses encore à subir un harcèlement systématique, qui vise à les détruire.

L'article 18 définit, pour mieux le sanctionner, le délit de contrainte au mariage, première forme de violence qui s'exerce avant même que le couple ne soit formé. Le juge des enfants se verra confier des pouvoirs étendus afin d'éviter la conclusion de mariages forcés. Le cas échéant, leurs auteurs seront punis.

Enfin, nous avons souhaité supprimer, dans les situations où s'exercent des violences conjugales, le recours à la médiation pénale, sans pour autant affaiblir dans d'autres domaines la portée de cette procédure indispensable. La Chancellerie nous a aidés à trouver un dispositif approprié, aux termes duquel la victime qui sollicite une ordonnance de protection, refusera par là même le recours à la médiation pénale.

Je me félicite de l'excellent travail que nous avons pu mener avec le Gouvernement, comme je me réjouis que le Premier ministre ait approuvé le dispositif cadre auquel nous sommes attachés, et déclaré la lutte contre les violences faites aux femmes « Grande cause nationale 2010 ».

Les amendements que nous allons examiner sont issus de la réflexion que nous avons continué de mener depuis le 27 novembre. Loin d'altérer notre volonté initiale, ils visent au contraire à lui donner un meilleur fondement juridique et à porter notre travail à son point d'achèvement. Ainsi, le 25 février, nous pourrons voter une proposition de loi efficace et attendue tant par les victimes que par les associations qui les soutiennent.

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