Et vous nous trouverez toujours au premier rang de ceux qui combattent la diffusion des idées racistes et antisémites, et des images pédopornographiques sur internet. Mais là encore, il est nécessaire d'être clair sur les moyens. De justes causes doivent-elles nécessairement renvoyer à des dispositifs de filtrage, comme le disait le Président de la République le mois dernier lorsqu'il présentait ses voeux au monde de la culture, ou à des mécanismes d'autocensure sous couvert de responsabilisation des hébergeurs, comme l'a suggéré le Premier ministre plus récemment ? Nous le contestons d'autant plus que nous considérons que la neutralité du réseau est un enjeu central pour la liberté d'expression et de communication.
A cet égard, nous nous réjouissons que l'amendement de notre collègue Tardy visant à ce que seul un juge puisse accorder le blocage de l'accès à un site ait été adopté en commission. Nous sommes néanmoins très surpris de lire dans le rapport que la rédaction de cet article devra être modifiée en séance publique. Ce serait non seulement un retour en arrière regrettable, mais, au-delà, un risque pris par le Gouvernement, puisque, en envisageant de confier à une autorité administrative ce pouvoir de sanction débouchant sur un possible filtrage de l'accès à internet, il se heurterait, à n'en pas douter, à la jurisprudence du Conseil constitutionnel.
Quoi qu'il en soit, il nous semble incontournable de préciser que la « liste noire » établie doit bien être constituée d'URL précises, et non de domaines entiers. En effet, à défaut, en voulant filtrer un site « pédopornographique », il y aura un risque non négligeable que soit bloqué non seulement une adresse mais le domaine tout entier qui contient d'autres sites parfaitement légaux. C'est d'ailleurs pour ne pas prendre ce risque trop important de surblocage qu'en Allemagne, le président Horst Köhler a refusé de promulguer la loi connue sous le nom d'Internetsperren-Gesetz.
Au-delà, comment ne pas avouer notre perplexité en constatant que vous vous attaquez, dans ce texte, uniquement aux moyens de diffusion de contenus illégaux ? Ces dispositions ne s'attaquent ainsi qu'à la manifestation, au moyen de diffusion, et non à la cause – les auteurs des contenus en question –, ni aux conséquences, celles qui affectent les victimes.
C'est sans aucun doute là que se situent toutes les limites de l'exercice que vous nous imposez soudainement à la veille des élections régionales. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)