C'est un débat de fond que celui qui porte sur le champ d'investigation des commissions d'enquête, notamment en ce qui concerne le périmètre du chef de l'État, et surtout celui des instances judiciaires en cours.
Le principe de précaution appliqué à la séparation des pouvoirs est une fausse bonne idée. Évidemment, cela a le mérite de la simplicité, mais cela n'a pas celui de l'efficacité du point de vue du fonctionnement démocratique.
D'abord, sur un plan très théorique – et je sais que M. Goasguen sera attentif à cette argumentation –, on met sur un pied d'égalité deux pouvoirs qui, en fait, n'existent pas : il n'y a pas de pouvoir judiciaire. Il y a une autorité judiciaire, dont la Constitution garantit l'indépendance. Lorsque l'on met à égalité la démarche du pouvoir législatif et celle du « pouvoir judiciaire », on se trompe quant au contenu de la Constitution. Il me semble que, de ce point de vue, une hiérarchie est établie : il n'y a pas de pouvoir judiciaire, il y a une autorité, dont nous assurons l'indépendance.
C'est à partir de ce débat de fond que l'on peut répondre à la question : « Que ferions-nous dans cette démarche ? » Il ne s'agit pas de se mêler des procédures judiciaires, mais nous avons, nous, en tant que pouvoir législatif, la capacité de prendre des initiatives, et de le faire sans être dépendant de l'autorité judiciaire. Nous n'allons pas prononcer, in fine, des mises en examen ou des condamnations, mais il est arrivé que des événements susceptibles d'entraîner des poursuites judiciaires aient entraîné une intervention du législateur.
Si le législateur en reste au principe actuellement en vigueur, il se prive d'un moyen d'intervenir. Dès lors, le système fonctionne à l'envers : c'est l'autorité judiciaire qui tient à sa botte le législateur, qui ne peut pas intervenir tant que la justice n'a pas achevé ses travaux.