Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Marie-Jo Zimmermann

Réunion du 20 janvier 2010 à 15h00
Représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d'administration et de surveillance — Discussion d'une proposition de loi

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Jo Zimmermann :

, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Monsieur le président, monsieur le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, mes chers collègues, c'est avec une grande satisfaction que je présente cette proposition de loi relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d'administration et de surveillance et à l'égalité professionnelle.

Ce texte est l'aboutissement d'une démarche que j'ai engagée depuis de longues années en tant que députée et présidente de la délégation aux droits des femmes, laquelle a travaillé à son élaboration. Il n'aurait sans doute pas atteint le stade de la séance publique sans le soutien de Jean-François Copé, président du groupe UMP. Je tiens à l'en remercier et à saluer son implication constante en faveur de la cause de l'égalité entre les hommes et les femmes.

Pourquoi sommes-nous conduits aujourd'hui à proposer des mesures pour permettre à des femmes diplômées, compétentes et candidates à l'exercice de responsabilités de siéger dans des conseils d'administration ?

C'est que, près de quarante ans après l'adoption par le Parlement des premières dispositions relatives à l'égalité salariale et professionnelle, les discriminations liées au sexe persistent. Cette réalité n'est malheureusement que le reflet d'un manque plus général de considération de notre société à l'égard des femmes.

Si cette initiative a été rendue possible par la révision constitutionnelle adoptée le 21 juillet 2008, sa mise en oeuvre appellera d'autres initiatives du législateur, notamment dans le champ de la représentation sociale ou de la fonction publique. À très brève échéance, d'autres combats s'annoncent, afin de préserver la parité en politique.

La proposition de loi soumise au vote de notre Assemblée est volontairement ciblée. Elle n'a pas la prétention de résoudre la totalité des problèmes rencontrés par les femmes dans la sphère professionnelle. Son enjeu n'en est pas moins important. Il s'agit de créer un électrochoc pour mettre fin à une situation à la fois anachronique et injustifiable, qui écarte les femmes d'instances où elles ont une place aussi légitime que les hommes.

Il s'agit ensuite, en imposant une plus grande mixité dans les organes de direction des grandes sociétés cotées et des entités du secteur public, d'agir en un lieu stratégique de l'entreprise où se décident les orientations de sa politique, pour qu'elle se saisisse enfin de la question de l'égalité salariale et professionnelle.

Le jour où les conseils d'administration féminisés à 40 % délibéreront de l'égalité professionnelle sur la base du rapport de situation comparée des femmes et des hommes dans l'entreprise, les six lois que nous avons votées seront peut-être enfin respectées. Agir au niveau de la direction des entreprises doit donner un nouvel élan vers une plus grande égalité professionnelle.

Lors de l'examen de la version initiale du texte, le 22 décembre dernier, la commission des lois a reconnu la nécessité, pour le législateur, de tirer les conséquences de la modification de l'article 1er de notre Constitution. Par pragmatisme, elle a néanmoins aménagé certaines dispositions de la proposition de loi, afin d'en assouplir les modalités d'application.

C'est ainsi qu'un quota minimum de 40 % d'administrateurs ou de membres du conseil de surveillance a été substitué à l'impératif de parité totale au sein des instances de gouvernance des sociétés et des entités du secteur public. Ce faisant, le texte a été aligné sur les législations les plus en pointe sur le sujet, à savoir celles en vigueur en Norvège et en Espagne notamment.

En outre, une parité absolue aurait impliqué l'obligation de remplacer un homme par un homme et une femme par une femme, ce qui aurait été contraire aux prescriptions du droit communautaire et aurait soulevé d'importantes difficultés pratiques.

De même, la commission des lois a simplifié la phase d'ouverture des conseils à la mixité, en ne retenant qu'une étape intermédiaire trois ans après la promulgation de la loi et en alignant la durée de transition sur la durée légale du mandat des administrateurs.

En dernier lieu, la commission des lois a choisi de renforcer l'efficacité du dispositif. Elle a tout d'abord rendu plus systématique le processus de régularisation de la composition des conseils qui seraient en infraction avec les principes de mixité posés aux nouveaux articles L. 225-18-1 et L. 225-69-1 du code de commerce.

Elle a ensuite aménagé le régime des nullités des délibérations pendant la phase transitoire, en le ciblant sur les seules délibérations auxquelles ont participé le ou les membres dont la nomination aurait été irrégulière. Cette évolution est apparue plus satisfaisante pour la sécurité juridique qui doit entourer le fonctionnement des entreprises.

Au total, je crois pouvoir dire que la commission des lois a trouvé un juste équilibre entre incitation des acteurs économiques au changement et prise en considération des contraintes inhérentes à la vie des entreprises.

Certains trouveront peut-être que cela ne va pas assez loin, d'autres que l'on va trop loin. J'estime, pour ma part, que l'essentiel est d'aboutir à des avancées tangibles et opérationnelles sur un sujet qui fait l'objet d'un constat de carence partagé : sans mettre en question le fonctionnement des entreprises, il s'agit de faire entrer de façon significative des femmes dans les conseils d'administration parce qu'elles y ont leur place et que l'appel à toutes les compétences est aussi gage d'efficacité économique.

Pour cette raison, je forme le voeu que notre assemblée puisse, par un vote consensuel, exprimer son engagement en faveur de la cause des femmes. Ce serait un signal fort à l'adresse de tous ceux qui, aujourd'hui encore, contestent l'intérêt de mesures en faveur de la parité.

Ce texte poursuit un objectif d'intérêt général dont les acteurs économiques eux-mêmes ont conscience. À titre personnel, je suis fière que nous ayons choisi de porter un débat de société aussi important dans cet hémicycle. (Applaudissements sur tous les bancs.)

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion