Vos écrits et les propos de M. le rapporteur le démontrent amplement. Mais il n'est écrit nulle part que le conseiller territorial est un motif d'intérêt général. De plus, vous vous heurtez à une difficulté d'ordre politique : qui dit conseiller territorial dit mode de scrutin, et une partie de votre majorité n'est pas d'accord avec celui-ci. Le motif de votre choix est donc le conseiller territorial, mais vous ne pouvez pas vraiment en parler, pour des raisons juridiques et politiques. Vous avez donc inventé d'autres motifs, et c'est pourquoi je parle de motif baladeur. Vous prétendez augmenter ainsi la participation – c'est ce qu'a dit M. Perben. Soyons sérieux. Aucune indication d'aucune sorte ne permet de penser que cela augmentera à coup sûr la participation. D'ailleurs, vous le reconnaissez vous-même. En effet, l'étude d'impact que l'article 39 de la Constitution vous oblige à produire est d'une indigence totale sur ce point. Évidemment, elle ne comporte rien sur la participation. C'est un premier motif d'inconstitutionnalité.
Le deuxième motif, encore plus substantiel, est relatif à tout ce qui concerne le conseiller territorial et le mode de scrutin. Nous devrons avoir, soit dans cette assemblée, soit devant le Conseil constitutionnel, une discussion extrêmement intéressante pour savoir si, aux termes de l'article 72 de la Constitution qui définit ce qu'est une collectivité territoriale et qui inclut désormais la région, ce qui n'était pas le cas il y a quelques années, il peut exister une collectivité territoriale qui soit soumise à la tutelle d'une autre collectivité territoriale, s'il peut exister une collectivité territoriale qui soit privée de la compétence générale, et s'il peut exister une collectivité territoriale qui ait, de fait et même de droit, les mêmes élus qu'une autre collectivité territoriale.
Ces points sont extrêmement importants.
Concernant la clause de compétence générale, la réponse est clairement négative. Un établissement public a une spécialité d'action, tandis qu'une collectivité territoriale doit pouvoir intervenir sur les domaines transversaux. En supprimant la clause de compétence générale, vous violez donc à la fois la jurisprudence du Conseil constitutionnel et celle du Conseil d'État.
À la question de savoir si des collectivités territoriales peuvent partager les mêmes élus, la possibilité en est discutée, mais semble contraire au bon sens. Par exemple, si une région, dans le cadre de sa politique d'aménagement du territoire, décidait de ne pas permettre les subventions dans certains cantons, qui peut croire qu'un élu cantonal pourrait voter une telle disposition alors qu'elle est contraire aux intérêts des électeurs qu'il représente ?
Paradoxalement, l'idée première du Gouvernement exprimée par la commission Balladur était de garder la région et de supprimer le département. Puis il est apparu que cela n'était pas possible. Alors vous avez fait machine arrière, et vous nous proposez une cantonalisation des régions qui aboutira à les détruire sans que les départements ne soient forts.