En Allemagne, le déficit public se réduira. En France, il s'aggravera : telle est la situation.
Je souhaite revenir sur deux sujets que le président de la commission des finances a déjà abordés.
Le premier est le bouclier fiscal.
Notre opposition, totale sur ce sujet, n'est pas nouvelle. Ce n'est pas le vote de cette loi de finances rectificative qui nous fera changer d'avis. Du reste, nos concitoyens trancheront le débat en 2012. En revanche, nous continuerons à débattre sur la mise en oeuvre du bouclier fiscal. Nous persistons à ne pas comprendre pourquoi et au nom de quelle légitimité, des revenus perçus effectivement par un contribuable ne sont pas intégralement pris en compte dès lors qu'il s'agit de calculer si oui ou non le bouclier fiscal doit être activé.
En ce qui concerne les dividendes, l'abattement de 40 % n'a rigoureusement aucune légitimité, car ce sont 100 % des dividendes qui ont été perçus. Faire croire que de l'impôt aurait déjà été acquitté sur ces dividendes – alors que c'est la société qui l'aurait fait et non le contribuable – était un artifice auquel la commission mixte paritaire ne s'est pas laissée prendre. Cela étant, elle a dû trouver un compromis que je juge pour ma part regrettable.
En effet, en loi de finances initiale, nous étions parvenus, à l'Assemblée, à corriger une malfaçon évidente en revenant sur cet abattement et en estimant, à juste titre, qu'il fallait prendre en compte la totalité – et non 60 % des dividendes – pour le calcul du bouclier fiscal. La solution en sifflet imaginée à titre de compromis par la commission mixte paritaire peut en satisfaire certains.
Pour notre part, elle ne nous satisfait pas car, au moins jusqu'en 2012, elle laissera persister une formidable inégalité de traitement entre contribuables, avec un traitement de faveur à l'égard de certains de nos compatriotes dont il est tout de même difficile de dire que c'est d'abord vers eux que la solidarité nationale doit jouer. Au fond, en votant cette disposition, la majorité s'apprête à faire un magnifique cadeau de Noël à certains dont je ne suis pas sûr que ne pas le leur faire eût radicalement changé les fêtes qu'ils s'apprêtent à passer et l'année prochaine qu'ils s'apprêtent à vivre.
Le second sujet sur lequel je souhaite revenir, déjà évoqué par le président de la commission des finances, est la politique de lutte contre les paradis fiscaux, ce que l'on appelle les États non coopératifs.
Incontestablement, la situation est en voie d'amélioration et la volonté politique, notamment celle du ministre du budget, Éric Woerth, tout à fait déterminante. Nous n'en sommes pas moins très inquiets de la situation dans laquelle s'est mis notre pays lors d'une affaire dont nous avons été informés cet été, lorsque nous avons appris du ministre lui-même qu'il disposait d'une liste – longue de 3 000 noms, nous avait-il dit – de contribuables français connus de l'administration pour s'être rendus coupables non de posséder un compte à l'étranger, mais de ne pas l'avoir déclaré.
L'évolution de cette affaire ne nous semble pas satisfaisante : si une partie de l'action judiciaire du procureur Éric de Montgolfier ne pourra être entachée de la moindre illégalité, puisque le blanchiment est avéré, celle qui concerne la fraude fiscale paraît en revanche difficilement exploitable.
Cette question est délicate à aborder pour un parlementaire, fût-il de l'opposition, car personne n'a intérêt à ce que cette affaire dégénère. Ce n'est notamment pas le cas de notre pays, au nom de ses relations bilatérales avec la Confédération helvétique. Or celle-ci a interrompu le processus de ratification d'une nouvelle convention fiscale qui aurait justement permis une coopération parfaitement efficace entre nos deux administrations, au profit de l'administration fiscale française.
Il ne serait pas raisonnable de poursuivre. Permettez-moi néanmoins de m'interroger à cette tribune, au nom du groupe SRC : quelle sera l'issue de cette affaire – que l'on avait pu croire bien engagée –, s'agissant sinon des opérations de blanchiment, du moins des manoeuvres de fraude fiscale ?
Je sais qu'Éric Woerth a défendu de manière très convaincante, notamment au Sénat, l'idée qu'il ne faudrait pas aller plus loin. Je le dis à quiconque ici aurait la même attitude, car je ne souhaite pas l'embarrasser davantage alors qu'il n'est pas là pour répondre : nous sommes nombreux à douter de l'issue heureuse de cette affaire et, en définitive, du processus engagé lors du G20 de Londres afin de convaincre les États non coopératifs, parfois grâce à de solides arguments, de changer de comportement. En effet, il va de soi que, si notre pays est obligé de céder aux arguments helvétiques, la lutte contre le blanchiment et la fraude fiscale, c'est-à-dire les politiques gouvernementales lancées avec force lors du G20 de Londres, pourraient en être tout entières compromises.
Mes chers collègues, je vous donne rendez-vous lors de l'examen de la loi de règlement, qui livrera la vérité budgétaire ultime de cette année 2009. Je vous le répète, l'opposition est très préoccupée de la situation budgétaire du pays. Ni le déficit structurel, qui n'a pas diminué, ni le déficit né de la crise, qui est considérable, ne semblent devoir connaître d'amélioration l'année prochaine. Au contraire, la dette s'alourdira davantage encore : loin de se limiter à 8,5 % – contre 8,2 % cette année –, le déficit public risque d'être plus proche de 9 % que de 8 %. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)