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Intervention de Jean-Yves Le Bouillonnec

Réunion du 16 décembre 2009 à 21h30
La poste et les activités postales — Reprise de la discussion

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Yves Le Bouillonnec :

Et lorsque j'ai demandé des explications, on m'a parlé de rationalisation, de modernisation, de procédures supprimant le plus possible l'intervention humaine. Nous sommes capables de comprendre cela, monsieur le ministre, car nous ne sommes pas totalement dépourvus d'intelligence. Mais quand j'ai posé la question : « A-t-on progressé dans le service public ? », je n'ai pas obtenu de réponse affirmative. Et pour cause : on n'a pas fait progresser le service public, on n'a fait que répondre à la seule volonté de réduire les coûts.

L'exigence de rentabilité doit bien sûr faire partie de la stratégie, mais elle ne doit pas être le premier des objectifs. Et c'est ce qui s'est passé dans ma commune.

Avec cette réforme, vous faciliterez la désertification des banlieues, ce qui est d'autant plus grave qu'en parallèle, les réformes des collectivités territoriales et de la taxe professionnelle, ainsi que les reculs des mécanismes de péréquation et de solidarité territoriale assèchent toutes nos stratégies locales. Ainsi, l'État, renonçant à ses missions régaliennes, aura demain totalement disparu de ces territoires. Qui assumera effectivement une présence aux côtés des habitants, les collectivités ne pouvant plus elles-mêmes remédier aux carences coupables de l'État, faute de moyens à apporter aux populations pour leurs services essentiels ?

Quel message adressez-vous à ces populations ? Vous préparez purement et simplement, sans le moindre scrupule, une France à deux vitesses. D'un côté, la France des coeurs de ville, ou des coeurs de vie, qu'animeront des stratégies purement lucratives. De l'autre, la France des banlieues précaires et des zones rurales, de plus en plus isolées, dont la puissance publique aura déserté les territoires et abandonné les habitants.

À l'heure où nous parlons du désenclavement des quartiers et de la lutte contre la ghettoïsation des banlieues, comment ne pas s'étonner de cette réforme qui enfermera un peu plus encore les habitants, alors que le temps est pourtant bien venu de leur donner d'autres signes forts de l'intérêt que nous devons leur porter ?

L'ouverture des quartiers passe par le maintien et le développement des services, comme ceux de La Poste, qui joue un rôle essentiel pour le maintien du lien social et le développement équilibré des territoires.

Après la réforme hospitalière, qui accentue les inégalités territoriales dans l'accès aux soins, après la banalisation du livret A qui menace la pérennité de l'épargne populaire, et en attendant la réforme des collectivités, qui va accroître le déséquilibre entre grandes métropoles, d'une part, et communes périurbaines et rurales, d'autre part, votre réforme du statut de La Poste symbolise votre politique libérale, qui laisse aux lois du marché le soin de déterminer les territoires viables, rentables et ceux condamnés à l'abandon. L'exemple que je vous ai donné tout à l'heure l'illustre bien.

Vous faites souvent référence à la transposition de la directive européenne, mais vous oubliez souvent de rappeler la définition de cette notion de service public : « Le service public est un service universel, reconnu dans les traités et les directives communautaires, dont l'objectif est de garantir le droit d'accès de chaque habitant, en tout point du territoire européen, à des services de communication de qualité, d'organiser la cohésion économique, sociale et territoriale de l'Union européenne, le lien social, de développer les conditions du développement durable. »

Avec cette réforme, vous allez à contresens du modèle républicain français, qui fait de l'égalité entre les citoyens sa finalité. Vous cassez un peu plus encore les mécanismes de péréquation permettant la solidarité entre les territoires et la population. Vous condamnez le développement harmonieux des territoires et l'aménagement équilibré de notre pays.

C'est pourquoi nous combattons cette réforme du statut de La Poste qui, sous le prétexte fallacieux de la moderniser, ouvre la voie à sa privatisation. Et même si elle ne dit pas son nom, elle en porte tous les stigmates et les dérives, au détriment de nos concitoyens.

Pour défendre La Poste, les communes rurales et les banlieues mènent un même combat, celui de leur avenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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