Ce projet de transformation en société anonyme, parce qu'il ouvre la voie à une privatisation future de La Poste et met en difficulté un service public essentiel, nous semble également remettre en cause notre Constitution et, notamment, le préambule de la Constitution de 1946, selon lequel « tout bien, toute entreprise, dont l'exploitation a ou acquiert les caractères d'un service public national ou d'un monopole de fait, doit devenir la propriété de la collectivité ».
Une telle menace est tout à fait réelle. Elle a été prise très au sérieux par un grand nombre de nos concitoyens.
En réponse à ce projet de loi, une consultation citoyenne de très grande ampleur s'est déroulée du 27 septembre au 5 octobre. À l'issue de cette consultation, plus de 2 300 000 de votants se sont prononcés pour le maintien actuel du statut de La Poste. Cette mobilisation citoyenne a illustré l'attachement viscéral de nos concitoyens aux services publics et à La Poste en particulier.
Quoi qu'en dise le Gouvernement, le projet de loi en discussion, relatif à l'entreprise publique La Poste et aux activités postales, dont le premier article vise à transformer cette entreprise en société anonyme, est le préalable à une privatisation future du groupe La Poste.
La meilleure solution pour garantir le service public postal est naturellement de maintenir le statut actuel.
Vous êtes conscient de l'impopularité de votre projet, monsieur le ministre, et nos concitoyens, échaudés par les expériences passées, comprennent bien que le changement de statut préfigure la privatisation qui est programmée dans un second temps.
Pourquoi refuser la privatisation annoncée par le présent projet de loi de l'entreprise publique La Poste ? Pour conserver le lien social.
La Poste est bien souvent le dernier service public présent dans certains territoires. Dans un grand nombre de villages, le guichet jaune et bleu reste le dernier représentant de l'administration, et le passage du facteur le dernier contact régulier avec la société. On ne peut que rappeler l'importance de ce lien social et convivial. Il est important de ne pas voir disparaître les bureaux de poste. Le facteur doit continuer à porter le courrier dans les endroits les plus isolés de nos territoires.
Dans la course à la rentabilité, le passage du facteur, y compris auprès des personnes les plus fragilisées, sera bientôt remis en cause. À l'heure actuelle, leur parcours est déjà ajusté contrôlé, chronométré. Nous risquons d'aboutir à une concentration encore plus forte qu'aujourd'hui des services postaux sur les pôles urbains et donc à la dévitalisation de nos territoires ruraux et de nos campagnes.
Pourquoi refuser la privatisation ? Pour conserver l'emploi et le territoire.
Éducation, justice, santé, énergie, poste… En France, les services publics emploient environ 30 % des salariés et représentent également 30 % de l'activité économique. C'est dire si leur avenir est une question cruciale, d'autant que, depuis la Libération et le programme du Conseil national de la Résistance, les Français ont placé les services publics au coeur de la nation et de l'identité nationale.