Cette proposition n'est pas nouvelle. Vous la retrouverez dans le manifeste des petites villes de France. Vous la trouverez aussi dans la contribution de l'association des petites villes de France aux assises de la ruralité. C'est une piste de travail pour que l'État, comme opérateur ou actionnaire unique de sociétés publiques, joue son rôle de garant de l'aménagement du territoire, et donc de l'égalité.
Dans cette tâche, l'État ne peut pas toujours se désengager ou se désintéresser. Les collectivités territoriales font de leur mieux, mais vont souffrir longtemps face aux coups de boutoir de la réforme de la taxe professionnelle ou du projet de réforme territoriale. Elles souffrent déjà du désengagement du Gouvernement et de l'État, à travers la baisse des dotations. Elles ne pourront pas non plus pallier la diminution de la présence postale et des services, consécutive à la transformation en société anonyme de l'actuel établissement public industriel et commercial La Poste.
Bien plus qu'une idéologie, c'est la cohésion territoriale qui se joue en partie sur ce projet de loi : la solidarité des villes avec leurs campagnes, la solidarité de l'ensemble des usagers de La Poste, quel que soit le lieu où ils habitent.
Comment imaginer que les zones urbaines puissent se passer des zones rurales, ou l'inverse ? Les territoires ruraux sont tout à la fois les lieux de production alimentaire, mais aussi les lieux de villégiature des urbains. Ce sont souvent, on l'oublie, des lieux de production industrielle et de développement d'activités essentielles. Le maintien dans les zones rurales d'un haut niveau de service public est impératif. Je crains que le projet de loi que vous nous proposez d'adopter ne contribue, au contraire, à diminuer ce niveau.
Monsieur le ministre, je vais conclure. Face à cette réforme, qui pose plus de questions qu'elle n'apporte de solutions, notre groupe, mais aussi l'ensemble de la gauche, propose une alternative : elle consiste en un maintien du statut actuel, accompagné d'une bonne identification des besoins des usagers et des territoires auxquels doit répondre le service public postal, et de la mise en place par l'État d'un financement enfin suffisant et pérenne et d'une régulation efficace.
Cette solution alternative n'est pas seulement celle de la gauche parlementaire. Elle est aussi et avant tout celle de plus de 2,2 millions de citoyens qui se sont exprimés et dont tous les élus de gauche, dans cet hémicycle, sont aujourd'hui les porte-parole.
Contrairement à ce qu'affirment certains membres du Gouvernement, notre position n'est pas conservatrice. Pour reprendre la terminologie gouvernementale, elle est au contraire moderne, au bon sens du terme, car elle tient compte, non seulement de notre culture du service public, mais aussi d'une bonne compréhension de la profonde crise actuelle, qui devrait conduire le Gouvernement à mettre en veilleuse l'idéologie libérale qui inspire son action quotidienne.
En nous positionnant ainsi, nous sommes fidèles à nos valeurs et nous défendons le plus ancien et le plus emblématique des services publics, lesquels constituent dans leur ensemble le patrimoine de tous, et en particulier de celles et ceux qui n'en ont pas ! (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)