…« et qui, quand ces nécessités seront transformées, est appelée, comme nous le proclamons, à faire place à un type nouveau de propriété collective sociale. »
Je vous invite à réfléchir, madame la ministre, à ces propos prononcés à cette tribune même, le 4 mars 1904, car leur actualité est éblouissante. À la différence des États-Unis ou du Royaume-Uni, vous refusez de considérer que les sommes que l'État consacre aux banques devraient constituer autant de moyens d'entrer dans le capital de ces établissements pour les inciter à changer de pratiques et sortir de la logique qui nous a menés à la catastrophe. Et la même chose pourrait valoir pour le secteur industriel. Eh oui, nationalisation n'est pas un gros mot !
Vous vous avancez sur certains terrains, madame la ministre, mais je vous soupçonne d'être contrainte de cautionner des propos que vous ne partagez pas – mais pourriez-vous agir autrement quand ils viennent de Sa Majesté Impériale ?
Ainsi en va-t-il du plan automobile. Le 5 février, lors de l'émission Face à la crise, Nicolas Sarkozy martèle qu'il a obtenu un engagement de PSA et de Renault : « Je veux qu'on arrête les délocalisations et que, si possible, on relocalise. » Quatre jours plus tard dans les salons de l'Élysée, il paraphe des accords de soutien à la filière automobile et annonce que les deux entreprises françaises ont promis de ne fermer aucun de leurs sites durant cinq ans et de tout faire pour éviter des licenciements. Mais patatras ! un document de votre ministère, adressé à la Commission européenne, fait la lumière sur le dossier. Et en fin de compte, cela montre, comme dirait la sainte église catholique, que vous péchez par omission : vous ne dites pas de contre-vérités ; seulement vous ne dites pas tout.
Permettez-moi de citer ce document : « Les engagements pris par les deux constructeurs bénéficiaires du plan automobile répondent à une obligation de rendre compte, sans pour autant constituer de clause opposable au sens contractuel du terme. » Autrement dit, PSA et Renault ne sont soumises à aucune obligation : elles peuvent empocher la manne de l'État sans respecter les contreparties. « Les engagements de maintien d'activités en France sont sans incidence sur les stratégies d'implantation de production », est-il encore écrit dans la note de Bercy, démonstration que les promesses du Président ne sont que des rodomontades dont il est coutumier. « L'engagement des industriels de tout mettre en oeuvre pour préserver l'emploi et les compétences est une forme de reconnaissance de leur responsabilité mais ne définit qu'une obligation de moyens et non de résultats. » Plus loin, on peut lire que « l'absence de mise en oeuvre d'un plan social en 2009 n'exclut pas des ajustements d'effectifs, sous la forme notamment… » – appréciez l'adverbe – « …de départs volontaires ».