Et plus il y a de diversité, surtout à droite, mieux c'est ! Cela montre que notre pays ne va vraiment pas bien, ce dont on ne peut se réjouir, et que certains de nos collègues, qui ne sont pas totalement autistes, pensent qu'ils auront peut-être un jour des comptes à rendre à nos concitoyens.
Le Président de la République a dit qu'on allait voir ce qu'on allait voir pour ce qui est des paradis fiscaux ! Mais, lorsqu'il nous a reçus à l'automne, à la veille du G 20 à Washington, le Président de la République nous a dit qu'il fallait intervenir sur les flux en direction des paradis fiscaux, mais que, pour les paradis fiscaux eux-mêmes, on ne pouvait pas faire grand-chose. Il y a le discours public et les actes. Le discours public vise à impressionner le bon peuple, avec des mouvements de menton et des effets de manches. Mais en ce qui concerne les actes, il ne faut pas indisposer tous ceux qui vivent de ces trafics !
Il est vrai que si l'on veut mettre en cause les paradis fiscaux, il faut s'attaquer non seulement à Monaco – même s'il faut d'abord faire le ménage chez nous –, à Panama ou aux îles Moustique, mais aussi aux États-Unis dont l'un des états est un véritable paradis fiscal, je veux parler du Delaware et l'on pourrait même en ajouter un deuxième, dans une moindre mesure. Vous savez tout cela, car vous êtes une vraie experte, pas une experte de télévision, vous connaissez la réalité de l'intérieur pour avoir vécu dans ce pays. Vous ne pouvez pas ne rien faire ou alors si vous ne faites rien, c'est que vous êtes doublement coupable, puisque c'est en connaissance de cause.
S'agissant de la situation de notre système bancaire, vous avez souligné cet après-midi, madame la ministre : « Les banques vont mieux chez nous. » Ce n'est pas l'avis de tout le monde. Un proche de l'Autorité des marchés financiers a ainsi déclaré : « Nous sommes passés entre les gouttes parce que nos banques ont été un peu moins avides » – encore que les dernières nouvelles concernant la Société générale n'ont rien de rassurant – « et que les activités de marché les plus fragilisées sont concentrées à la City. Mais demain ? On se lève tous les matins en se demandant quel sera le prochain cataclysme ».
Il paraît aujourd'hui difficile de garantir la qualité du bilan des banques et d'affirmer que les pertes révélées, liées aux produits financiers toxiques acquis par les établissements au mépris des règles de prudence et désormais invendables sur le marché, valent pour solde de tout compte.
Vous savez bien que telle est la réalité, madame Lagarde. Or tout cela n'a pas été pris en compte dans votre projet de loi de finances rectificative. Ce seul fait justifierait un renvoi en commission.
L'État met de l'argent à disposition des banques et nos concitoyens entendent sur les chaînes de radio et de télévision que celles-ci vont mal. Ce n'est cependant pas tout à fait la réalité, même si des représentants du Crédit agricole et de la Société générale ont indiqué qu'ils n'avaient pas besoin de l'argent de l'État et qu'ils refusaient tout contrôle – il semble toutefois qu'ils se soient ravisés pour ce qui est de leur capacité à tendre la main. Il y a quelque chose d'immoral dans la pratique des marges : les banques sont accusées de reconstituer leurs profits sur les prêts aux ménages et aux particuliers. De fait, dans les dernières publications de la Banque centrale, les établissements de crédit reconnaissent qu'ils ont continué d'augmenter leurs marges alors qu'ils ont dans le même temps durci les conditions imposées pour la souscription de nouveaux crédits, particulièrement pour les prêts présentant le plus de risques.
De cela, vous ne nous avez pas non plus parlé.
Il faudrait pourtant revenir sur la façon dont vous avez réglé le problème des banques. À cet égard, permettez-moi de citer Jean Jaurès qui, je le sais, fait encore frissonner le côté droit de l'hémicycle. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Certains d'entre vous, mesdames, messieurs de la majorité, l'ont peut-être lu, mais en esthètes et non en personnes convaincues de l'intérêt de ses thèses. « La propriété n'est pas un absolu que l'on puisse nier ou affirmer au nom de Dieu. Elle a des formes successives. Et lorsque l'une de ses formes a cessé d'être légitime – propriété féodale, propriété corporative, propriété de l'Église –, des formes nouvelles surgissent, comme a surgi la forme de la propriété individuelle bourgeoise qui garde sa légitimité, non pas tant qu'il plaît à Dieu, mais tant qu'elle répond aux nécessités d'un ordre économique et social déterminé …».