J'ai mis à la disposition de la police cinquante agents du fisc – je les ai rencontrés – qui exerceront, à partir des renseignements collectés auprès des services de police, leur mission de taxation des revenus des délinquants. Cela vient donc en complément de la participation des agents du fisc aux groupes d'intervention régionaux, où ils assistent les autres services et collectent des renseignements.
Mais pour frapper les délinquants sur leurs revenus, nous devons aussi adapter notre législation. Le projet de collectif prévoit donc un paquet cohérent de mesures.
Il faut renforcer les échanges d'information entre les agents des impôts et les services de police, en autorisant les communications spontanées ; c'est l'objet de l'article 11 de ce collectif qui revient sur certains secrets professionnels mal compris.
Il faut ensuite que cette information puisse être exploitée. Pour cela, nous proposons d'adapter nos procédures de contrôle pour les activités illégales. Aujourd'hui, curieusement, il est plus facile de taxer les activités légales dissimulées que les activités illégales. Ainsi, les activités occultes peuvent être immédiatement taxées d'office, pas les activités illégales, pour lesquelles l'administration fiscale est tenue de mettre en demeure le contribuable de déposer une déclaration d'impôt ! Autre exemple, le délai de reprise fiscale n'est que de trois ans pour les activités illégales contre dix ans pour les activités occultes.
Au-delà des procédures, il faut que nous disposions d'une base d'imposition adaptée : dans de trop nombreux cas aujourd'hui, l'administration n'est pas en mesure d'identifier le revenu taxable des trafiquants, car les trafics se font en liquide, sans laisser de trace sur les comptes bancaires. Nous changeons donc concrètement les choses.
Soit les délinquants sont appréhendés avec des produits illégaux. Ils seront alors taxés sur la base de ces produits. Concrètement, cela veut dire que les personnes qui se livrent par exemple à des trafics de stupéfiants seraient présumées, sauf preuve contraire, avoir perçu un revenu d'un montant égal à la valeur de la drogue, et taxées sur cette base. Ce pourrait être le cas également pour le trafic d'armes ou la fausse monnaie.
Soit la police ne parvient pas à appréhender les trafics, mais elle signale au fisc que tel ou tel mène un train de vie considérable et qui ne s'explique pas. Le Gouvernement vous proposera un amendement qui permettra de taxer ces trafiquants sur la base de leur train de vie, mais avec une liste modernisée de signes extérieurs de richesse, comprenant par exemple les dépenses de voyages, ou encore de bijoux.
On ne peut plus accepter que les délinquants qui vivent de la drogue, de la contrefaçon, du trafic d'armes ou de faux billets, ou encore de la contrebande de tabac ou d'alcool, ne soient jamais taxés alors que tout cet argent leur donne un train de vie considérable. Il va de soi que, parallèlement, les procédures pénales à leur encontre se poursuivent.
Les autres mesures du collectif ont une nature plus technique, ce qui est habituel.
Sans entrer dans un inventaire exhaustif, je signale quelques-unes d'entre elles. Elles visent à poursuivre la modernisation de notre administration, à transposer en droit français certaines exigences du droit communautaire, en ouvrant a des entités européennes des régimes purement nationaux, ou en alignant les conditions de taxation des uns et des autres.
Au titre de cet effort de modernisation, l'obligation de déposer des déclarations ou de payer par voie électronique va être élargie. C'est une source d'efficacité pour l'administration fiscale : des coûts réduits, un service plus rapide et plus sûr pour les contribuables, des possibilités accrues de recoupement des informations. À compter d'octobre 2010, toutes les entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 500 000 euros seront tenues de télédéclarer et de télépayer leur TVA et leur impôt sur les sociétés ; ce seuil sera abaissé à 230 000 euros en octobre 2011. Cela représente 175 000 entreprises en plus qui télérègleront leur impôt sur les sociétés et 508 000 en plus pour la TVA.
Nous sollicitons par ailleurs l'autorisation du Parlement de procéder à la réforme du statut du conservateur des hypothèques par voie d'ordonnance. C'est peu habituel et le Parlement n'aime guère cette procédure, mais il s'agit de la disparition d'un régime et d'une réforme techniquement complexe, compte tenu de la multiplicité des textes, fiscaux et non fiscaux, législatifs et réglementaires, à adapter. L'ordonnance permettra de gagner du temps.
S'agissant des mesures d'adaptation au droit communautaire, le régime d'intégration fiscale, qui permet à une entreprise d'être imposée sur ses bénéfices consolidés, est modernisé. Il permettra, comme l'exige la Cour de justice des Communautés européennes, d'intégrer une sous-filiale qu'une société détient à plus de 95 % par l'intermédiaire d'une filiale établie dans un autre État de l'Union européenne.
La taxation de dividendes perçus par des organismes sans but lucratif est rénovée
Réactivité face à la crise, avec la mise en oeuvre rapide du plan de relance ; maintien des repères, en conservant le cap de la maîtrise des dépenses et de la clarification des comptes, ce que nous prouvons en 2009 même si la chute brutale des recettes occulte d'autres évolutions ; cohérence entre les discours et les actes, avec les mesures que nous présentons pour lutter plus efficacement contre les fraudes, dans les paradis fiscaux ou sur le territoire français contre l'économie souterraine. Voilà, mesdames, messieurs les députés, les trois principes qui orientent l'action du Gouvernement ; voilà les trois principes sur lesquels nous avons construit ce collectif très dense, ce qui explique le nombre d'amendements dont il fait l'objet. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)