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Intervention de Olivier Dussopt

Réunion du 2 décembre 2009 à 10h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivier Dussopt :

Avec ce projet de loi, dû à l'obligation de transposer une directive européenne, on ne peut que regretter le sort réservé à la proposition de loi déposée par notre groupe sur le même sujet et examinée en séance le 15 octobre. J'ai bien compris que le président de notre Commission s'exprimait à titre personnel sur le sujet du fichier national, mais cela rend d'autant plus dommage que le Gouvernement, en réservant le scrutin sur notre proposition de loi, ait empêché la tenue d'un débat contradictoire qui, à défaut d'aboutir à un texte, aurait pu faire avancer la réflexion.

Dans le présent projet de loi, le Sénat a abouti à trois avancées partielles. La première concerne la fiche déclarative qui doit être signée par l'emprunteur et le prêteur dans le contrat de crédit, mais qui ne s'applique qu'aux crédits souscrits sur le lieu de vente ou par des moyens de communication à distance. Cette fiche devrait être soigneusement formatée, sans quoi les prêteurs multiplieront les critères et les engagements sur l'honneur afin d'atténuer le plus possible leur responsabilité. La deuxième est que chaque échéance permette de rembourser un minimum du capital emprunté. C'est une avancée importante, mais dont nous regrettons que les modalités soient renvoyées à un décret. C'est la loi qui devrait préciser le lien entre le capital emprunté et la proportion qui doit être remboursée à chaque échéance. Nous vous proposerons même d'aller plus loin en empêchant de recharger le crédit. Ces deux mesures sont de nature à empêcher que l'emprunteur soit tenu indéfiniment par ses crédits. La dernière avancée est l'engagement d'une réflexion sur un fichier des emprunteurs, mais qui prendra trois ans. C'est immédiatement qu'il faut créer un fichier positif, comme l'envisageait notre proposition de loi. Au lieu de cela, l'article 27 se contente de réformer le système existant – y compris le FICP, qui ne prévient ni n'empêche rien et se contente de recenser les incidents de paiement.

Le présent texte est inférieur à notre proposition de loi du 15 octobre. Ainsi, nous demandions la suppression du crédit renouvelable, dont nous connaissons le succès populaire, mais que nous ne considérons pas du tout comme un instrument favorisant la consommation : il s'agit plutôt d'un piètre substitut au traitement de la question du pouvoir d'achat. Les établissements se servant de ce type de crédits pour fidéliser leurs clients, les achats qu'ils financent se déplacent progressivement des biens d'équipement à des dépenses de la vie quotidienne. Dès lors, en situation de surendettement, il n'y a plus de bien qui serve de contrepartie au crédit. Cette suppression du crédit renouvelable était accompagnée de deux mesures, tendant, d'une part, à encadrer et à faciliter l'accès au crédit à la consommation classique – qui présente l'immense avantage immense d'être toujours appuyé sur un bien hypothécable – et, d'autre part, à mettre en place un véritable crédit social. Un tel dispositif relève de la responsabilité des pouvoirs publics. Compte tenu du niveau minime d'incidents de paiement dont font état les organismes de crédit, ce risque pourrait être pris en compte dans le dispositif public, de la même façon que sont garantis, par exemple, les risques d'impayés en matière locative. Ce crédit social faciliterait l'équipement des ménages en leur évitant des taux usuraires et en veillant à l'encadrement et à la prévention nécessaires.

Nous présenterons à la Commission des affaires économiques des amendements visant à délier la rémunération du vendeur du bien de celle du vendeur du crédit et à interdire ainsi le double commissionnement, à renforcer les sanctions applicables en cas d'abus de faiblesse et à sortir le crédit renouvelable, s'il devait être maintenu, du régime juridique de communauté des biens puisqu'il arrive qu'un des membres du couple ne soit pas informé des crédits souscrits par son partenaire.

Certaines dispositions du Sénat concernant le taux d'usure posent aussi problème. Ce taux serait ainsi défini non pas par rapport au type de crédit, mais à son montant, en différenciant les crédits inférieurs à 3 000 euros de ceux compris entre 3 000 et 6 000 euros ou supérieurs. Une telle définition pourrait mener à une hausse du taux d'usure moyen pratiqué pour les crédits à la consommation. Il faut donc se montrer extrêmement vigilant sur ce sujet. Nous proposerons à la Commission saisie au fond que le taux d'usure ne soit pas uniquement fixé en fonction du montant emprunté, mais qu'il soit aussi limité par rapport au taux du marché interbancaire, afin de l'empêcher de dépasser l'acceptable.

Enfin, les articles 2 et 3 concernant l'information de l'emprunteur ne nous paraissent pas suffisants. Une véritable politique de prévention ne peut pas se contenter de la simple transposition de la directive en la matière. Dire qu'un crédit doit être remboursé ne suffira jamais ! Il faut en particulier renforcer les pouvoirs des commissions de surendettement. Les amendements du rapporteur à ce propos semblent intéressants, de même qu'en matière de limitation du crédit renouvelable, mais nous souhaitons également permettre la réactualisation des plans de redressement élaborés par la commission de surendettement, ce qui n'est pas possible aujourd'hui, même en cas de changement dans la situation du débiteur.

Au final, le compte n'y est pas, mais nous espérons beaucoup des amendements qui seront présentés et du débat pour conforter les quelques avancées de ce texte.

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