Notre amendement tend également à supprimer l'article 1er A.
De notre point de vue, la décision du Conseil constitutionnel du 21 février 2008 sur la rétention de sûreté aurait dû combler le Président de la République. Il était, en effet, quasi inespéré que le Conseil constitutionnel acceptât l'instauration d'une possibilité d'enfermement à vie, et qu'après avoir purgé sa peine sans avoir commis le moindre acte nouveau répréhensible, une personne puisse être enfermée uniquement en raison d'un comportement réputé dangereux pour elle-même ou pour autrui. Le Conseil constitutionnel a validé l'interprétation selon laquelle l'enfermement n'est pas une peine, ni même une sanction, mais une mesure de sûreté. Cela fut une grande surprise pour beaucoup de juristes, qui se demandent d'ailleurs toujours ce qu'est la rétention de sûreté si elle n'est ni une peine ni une sanction punitive.
Si nous respectons la décision du Conseil constitutionnel, il n'empêche que nous la regrettons. Selon nous, le chef de l'État aurait dû se réjouir d'un tel sophisme. Manifestement, cela n'a pas suffi. C'est pourquoi il faut un nouveau texte. Faute de pouvoir l'approuver, nous contribuerons à la réflexion.
Déduire le droit d'un fait divers est, selon nous, une impasse. Nous avons largement démontré – et les exemples, hélas ! parlent d'eux-mêmes – que votre rhétorique politique s'épuisait dans une vaine réactivité à l'événement. Plutôt que de prévoir ou de promettre une improbable société irénique, vous devriez consacrer l'énergie gouvernementale à appliquer les lois existantes, au premier chef la loi de 1998 qui avait une ambition autrement plus importante que le texte que vous proposez. Cette loi de 1998 visait à s'attaquer aux infractions sexuelles, à leur répression, mais également à leur prévention, sans attendre le premier passage à l'acte. Or, alors que nous parlons de récidive, que constatons-nous ? Que les prisons sont remplies non de récidivistes, mais de personnes coupables d'avoir commis leur premier acte d'agression sexuelle. Dominique Raimbourg a, à cet égard, rappelé en commission des lois que 8 000 personnes étaient condamnées pour agression sexuelle. La loi de 1998 a prévu les outils pour prévenir les passages à l'acte.
Ce dont nous avons besoin, c'est de moyens – et vous venez de dire, madame la garde des sceaux que vous vous y atteliez, c'est une bonne chose –, pas d'une nouvelle loi qui suscite l'inquiétude du monde médical. Permettez-moi de vous rappeler les propos du docteur Cochez, qui dirige un service spécialisé dans la prise en charge des auteurs de violences sexuelles dans un centre hospitalier de Bordeaux. Selon lui, « on ne sait pas dire qui est dangereux ou qui ne l'est pas ». Les traitements dont on parle, on ne les propose dans son centre qu'à peu de personnes au total ; lui-même ne l'a fait qu'à 20 % des malades qu'il suit. « J'angoisse – dit-il – de devenir un juge en blouse blanche. La pression mise sur les médecins n'a jamais été aussi forte. Alors que le soin doit être adapté à chaque patient, on se heurte à une loi qui systématise la prise en charge autour d'un enjeu : l'incarcération. C'est inquiétant. »
Voilà une loi que les médecins n'attendent pas. Nous disposons de tous les outils pour suivre et contrôler les délinquants sexuels. Ce qui compte, c'est de dégager des moyens, humains ou financiers, en aucune manière, de voter un nouveau texte.
C'est pourquoi nous proposons de supprimer l'article 1er A.