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Intervention de Jean-Paul Garraud

Réunion du 17 novembre 2009 à 15h00
Réduction du risque de récidive criminelle — Discussion d'un projet de loi après engagement de la procédure accélérée

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Garraud, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république :

D'un fichier, effectivement, le terme ne me fait pas peur.

C'est une disposition qui reprend d'ailleurs la préconisation n° 13 de mon rapport de 2006. Ce nouveau fichier aura donc pour objet de centraliser l'ensemble des informations relatives à la santé et à la personnalité obtenues pendant une procédure judiciaire ainsi que pendant l'exécution de peines ou de mesures de sûreté, afin de faciliter la connaissance de la personnalité et l'évaluation de la dangerosité des personnes poursuivies ou condamnées pour l'une des infractions pour laquelle le suivi socio-judiciaire est encouru. Pour mieux juger les individus, il faut mieux les connaître et faire en sorte que l'autorité judiciaire ait entre les mains tous les éléments et les expertises psychiatriques et médico-psychologiques.

L'article assortit la constitution et le fonctionnement de ce nouveau fichier de plusieurs garanties. Ainsi, un décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, définira les modalités et conditions de fonctionnement du répertoire. Il précisera notamment les conditions dans lesquelles les magistrats et experts peuvent consulter ce répertoire ou être destinataires des informations qui y figurent. La trace des interrogations et consultations sera conservée dans des conditions définies par ce même décret. Le décret fixera également la durée de conservation des informations inscrites dans le répertoire et les modalités de leur effacement.

Enfin, l'article prévoit l'effacement immédiat des données en cas de décision de classement sans suite – hormis les cas où cette décision est fondée sur une irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental –, de décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement.

Un nouvel article 5 ter a été adopté afin d'améliorer l'efficacité des dispositions relatives à l'injonction de soins et à la surveillance judiciaire. Il clarifie et complète les règles relatives à l'injonction de soins applicables aux auteurs d'infractions de nature sexuelle, afin de renforcer l'efficacité et la cohérence de cette mesure tout en facilitant sa mise en oeuvre.

S'agissant de l'incitation au suivi de soins par les délinquants sexuels, cet article prévoit, dans le respect du principe du consentement aux soins, que la personne qui refuse de commencer ou de poursuivre le traitement médicamenteux prescrit s'exposera, selon sa situation, au retrait de ses réductions de peine, à la réincarcération ou au placement en rétention de sûreté – les incitations sont fortes. Il prévoit également que le refus de la personne de commencer ou de poursuivre le traitement médicamenteux anti-libido qui lui est prescrit par le médecin traitant devra être signalé par ce dernier à l'autorité judiciaire, directement ou par l'intermédiaire du médecin coordonnateur. La pluridisciplinarité de la démarche est ici essentielle : la médecine informe l'autorité judiciaire afin que celle-ci puisse prendre toutes les mesures qui s'imposent et que prévoit le texte.

La commission a adopté un article 5 quater tendant à rendre plus fréquente et plus effective, notamment en matière criminelle, l'interdiction pour un condamné de paraître, après sa libération, dans les lieux où réside ou travaille sa victime, ce qui permettra de renforcer la prise en compte des intérêts des victimes et de mieux prévenir tout acte de récidive. Pour les auteurs de crimes sexuels ou violents visés à l'article 706-47 du code de procédure pénale, le prononcé de l'interdiction de rencontrer la victime sera obligatoire, sauf décision spécialement motivée de la juridiction. L'autorité judiciaire dispose de la souveraineté nécessaire pour justifier cette décision.

Un nouvel article 5 quinquies a été adopté afin d'améliorer les procédures d'enregistrement et de contrôle des délinquants sexuels enregistrés au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes, le FIJAIS. La fréquence à laquelle les personnes qui sont inscrites au FIJAIS doivent justifier de leur adresse est abaissée d'un an à six mois. La mise en oeuvre du régime de justification renforcé à l'encontre d'une personne condamnée pour un crime ou un délit puni de dix ans d'emprisonnement devient possible sans attendre le caractère définitif de cette condamnation. Enfin, la fréquence de la justification d'adresse auprès du commissariat ou de l'unité de gendarmerie pour les personnes soumises au régime de justification renforcé est abaissée de six à trois mois.

L'article 8 a été modifié pour compléter les informations figurant au casier judicaire en matière de mesures de sûreté. Les décisions d'irresponsabilité pénale seront inscrites au casier judiciaire non seulement lorsqu'une mesure de sûreté aura été prononcée, mais aussi lorsqu'une hospitalisation d'office aura été ordonnée. Les décisions de placement sous surveillance judiciaire, de rétention et de surveillance de sûreté, ainsi que les décisions prolongeant ou renouvelant ces mesures, feront également l'objet d'une inscription au casier judiciaire. Celui-ci doit comporter le maximum de renseignements.

Enfin, la commission a précisé dans un nouvel article 8 ter les conditions d'entrée en vigueur de la loi, en indiquant expressément que les dispositions sur la surveillance judiciaire et sur la surveillance de sûreté prévues par le présent texte sont immédiatement applicables dès son entrée en vigueur.

Ces dispositions, mes chers collègues, représentent à mes yeux un juste équilibre entre les impératifs de sécurité pour nos concitoyens, de fermeté et d'humanité pour les délinquants.

Rapporteur de la loi pénitentiaire, j'ai encouragé tous les aménagements de peine pour ceux qui s'inscrivaient réellement dans la voie de la réinsertion. Rapporteur du présent projet de loi, je souhaite encourager toutes les mesures de sûreté pour ceux qui représentent toujours de réels dangers pour nos concitoyens.

En 2006, j'écrivais ces quelques lignes en conclusion de mon rapport intitulé « Réponses à la dangerosité » : « Fondée sur la dangerosité et non sur la culpabilité, la mesure de sûreté en milieu ouvert ou en milieu fermé entourée d'un certain nombre de conditions et de garanties dans son prononcé et son exécution est une nécessité.

« Dépasser les clivages, décloisonner les compétences, faire évoluer les idées reçues, tout en respectant scrupuleusement nos principes constitutionnels et les exigences de la convention européenne des droits de l'homme, telles ont été les règles de conduite qui ont présidé à l'élaboration du présent rapport. Contenir la dangerosité n'est ni un projet modeste ni un projet médiocre. Vivre ensemble en sécurité est un véritable projet « politique », au sens noble du terme, autour duquel il doit être possible de rechercher et d'obtenir un consensus unanime. Nos concitoyens le réclament.

« Notre histoire législative et judiciaire est riche d'exemples que nous avons su diffuser à travers le monde, à commencer par les codes civil et pénal. Aujourd'hui, nous connaissons dans le domaine, objet de notre mission, un certain retard. À nous de le combler. »

Eh bien, mes chers collègues, à l'issue d'une évolution législative volontaire et courageuse, aujourd'hui, c'est exactement ce que nous allons faire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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