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Intervention de François Loncle

Réunion du 13 novembre 2009 à 9h30
Projet de loi de finances pour 2010 — Aide publique au développement

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Loncle :

Mes chers collègues, je vais vous donner huit bonnes raisons de ne pas voter ce budget.

Premièrement, sur le plan strictement budgétaire, comment ne pas dénoncer les dérives immobilières du ministère mises à jour par le rapport de la Cour des comptes, si cher au bon M. Séguin ? L'argent perdu à l'occasion de ventes et de déménagements dignes du Topaze de Pagnol aurait pu abonder un budget qui en a bien besoin.

Deuxièmement, la montée en puissance du concept d'approche globale de l'aide nous inspire une certaine inquiétude. Contrairement à ce qu'a prétendu M. Joyandet, qui a fourni des explications embarrassées lors de la réunion de la commission élargie, la France a bel et bien soutenu l'Italie, contre l'Espagne et le Royaume-Uni, dans son renoncement aux engagements d'aide publique au développement.

Troisièmement, le montant de l'APD stagnera bel et bien en 2010 à hauteur de 0,44 % du revenu national brut, alors même que la France s'était engagée avec ses partenaires européens à la porter à 0,51 % en 2010, pour atteindre le taux de 0,7 % en 2015. Cette promesse non tenue augure mal du respect de l'objectif ultime. Puisqu'on a fait état du classement de la France, je rappelle que notre pays arrive malheureusement au treizième rang pour la participation au programme des Nations unies pour le développement.

Quatrièmement, en ce qui concerne l'immigration et le codéveloppement, la CIMADE et notre collègue Jean-Pierre Dufau ont rappelé que, depuis 2007, les ONG sont préoccupées par l'évolution de la coopération française. Soumise à une obligation de résultat en matière de régulation des flux migratoires, notre coopération conditionne désormais l'aide par l'acceptation de conventions migratoires par les pays en voie de développement.

Cinquièmement, pour les programmes d'aide et de coopération destinés à l'Afghanistan, les dix-sept ONG françaises présentes sur le terrain s'interrogent sur la dérive qui consiste à subordonner l'humanitaire au militaire.

Sixièmement, les ONG regrettent l'évolution qui consiste à privilégier, au détriment des dons, les prêts à des pays à revenu intermédiaire et émergents, qui accompagnent un soutien aux entreprises françaises. Cette politique, qui relève du commerce extérieur, devrait passer par d'autres canaux que ceux de la coopération.

Septièmement, la participation des ONG à la politique de coopération répond à une attente traditionnelle de leur part. Elles demandent en effet que la France se rallie au comportement des pays membres de l'OCDE, dans lesquels, en moyenne, 5 % de l'aide passent par des canaux associatifs, contre seulement 1 % en France.

La huitième raison de nous opposer à ce budget tient à la politique africaine menée la France, depuis l'exécrable discours prononcé à Dakar par Nicolas Sarkozy au début de son quinquennat. On ne sait ni où va ni ce qu'est cette politique, faute de savoir qui la conduit. Est-ce M. Guéant, M. Guaino ou un conseiller occulte comme M. Bourgi ? Pour des raisons domestiques, le ministre des affaires étrangères s'en est écarté. Quant à M. Joyandet, il fait ce qu'il peut : il exécute.

En Mauritanie, la France, par l'intermédiaire de son ambassade, a soutenu le candidat putschiste. Au Niger, alors que la Commission européenne sanctionne les dérives du Président Tandja, nous tardons à le faire, voire ne le voulons pas. Au Gabon, on sait ce qu'il en est de la succession d'Omar Bongo. Enfin, en Guinée, c'est le drame absolu. En commission, le ministre des affaires étrangères nous a avoué qu'il ne savait pas si le capitaine Dadis Camara était ou non responsable de la mort tragique de 180 personnes fusillées pour être allées protester au stade de Conakry contre les agissements d'un président potiche.

Il est grand temps de redresser la situation et de mettre fin à la dégradation de l'image de la France en Afrique. C'est pourquoi nous tirons la sonnette d'alarme et nous voterons contre le budget.

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