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Intervention de Pierre Gosnat

Réunion du 12 novembre 2009 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2010 — Culture

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Gosnat :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, si ce projet de budget de la culture pour 2010 est en hausse, un examen un peu plus approfondi permet de relativiser fortement cette augmentation.

Si l'on s'en tient, en premier lieu, à l'examen des autorisations d'engagement, on s'aperçoit qu'elles s'élèvent pour 2010 à 2 878 millions d'euros alors qu'elles s'élevaient, en 2008, il y a deux ans, à 2 877 millions d'euros. En 2010, l'État consacre ainsi 100 000 euros supplémentaires en autorisations d'engagement au budget de la culture. Mais compte tenu de l'inflation, c'est un budget en baisse par rapport à 2008 qui nous est présenté.

Bien sûr, en crédits de paiement, on peut constater un apport d'environ 100 millions d'euros par rapport à l'année dernière. Il est à noter que cette centaine de millions d'euros est entièrement absorbée par les crédits « Patrimoines ».

C'est donc une certaine vision de la culture qui se fait jour ici : celle qui préfère soutenir le patrimoine plutôt que le spectacle vivant.

En effet, l'action « Soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant » ne bénéfice que de 18 millions d'euros supplémentaires, soit une augmentation de 0,3 %, quand le taux d'inflation prévu pour cette année est de 1,2 %. On le voit, très classiquement, la droite privilégie la conservation – encore que… – mais toujours au détriment de la création contemporaine, de l'emploi et de la culture vivante.

Une telle distribution des crédits pose question, après la Berezina du texte HADOPI, rejeté par l'opinion publique, par la représentation nationale lors de la première lecture et par le Conseil constitutionnel. Alors qu'une seconde version a été bricolée à la hâte, soi-disant pour soutenir à tout prix la création, les lignes budgétaires montrent que celle-ci n'est pas prioritaire dans l'action du Gouvernement.

En effet, l'action « Économie des professions et des industries culturelles » perd 4 millions d'euros, en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement, soit une baisse de 10 % ! Une partie de cette baisse s'explique par la baisse de la dotation prévue par la HADOPI elle-même : 6,7 millions prévus en 2009, seulement 5,3 millions en 2010. La surenchère du chef de l'État en la matière était-elle de pure façade ? Les moyens alloués, en tout cas, ne reflètent pas l'intention affichée par l'exécutif de soutenir la création.

Il convient de rappeler que le dispositif HADOPI, en plus de prévoir des sanctions exorbitantes pour les internautes, ne rapportera pas un seul centime aux artistes et à la création. Alors que deux ministres de la culture successifs n'ont cessé de dire le contraire, ce PLF nous donne une nouvelle occasion de le constater.

Quant au programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », il enregistre une chute de ses crédits de paiement de 10 millions d'euros intégralement retirés à l'action en faveur de la culture.

Ce programme, qui concerne notamment l'enseignement et l'éducation artistique et culturelle, voit les crédits alloués aux dépenses de personnel se comprimer de 12 millions d'euros, conséquence logique de la fameuse révision générale des politiques publiques.

La RGPP suscite la plus vive inquiétude des personnels du ministère de la culture et des opérateurs qui dépendent de sa tutelle. Les établissements publics, qui concentrent 70 % des emplois et des moyens budgétaires consacrés à la culture, sont d'ores et déjà confrontés à d'importantes difficultés du fait de la réduction des crédits et du dogme du non-remplacement d'un poste sur deux d'agent partant à la retraite.

Les opérateurs, dans les musées et les établissements publics culturels, sont la cible de la deuxième vague de la RGPP. Comme l'a écrit François Fillon à propos du Centre Pompidou, ces établissements publics devront « faire mieux et moins cher ». Cela signifie en réalité qu'ils devront compenser la diminution drastique des crédits alloués par l'État en développant leurs propres sources de financement, à travers la gamme classique des outils du libéralisme marchand : commercialisations, filialisations, financiarisation, marketing, produits dérivés. J'ai appris par la presse il y a quelques jours qu'un accord venait d'être conclu entre le ministère de la culture et le ministère du tourisme pour mettre à la disposition des plus fortunés des bâtiments historiques emblématiques, type le château de Fontainebleau, afin de les transformer en résidences hôtelières de luxe. C'est tout simplement une injure faite au peuple.

En conclusion, votre politique n'est pas du tout l'idée que nous nous faisons de la culture, qui doit être vivante, accessible à tous, partagée et solidaire. Le propos du Chef de l'État selon lequel la culture doit être la réponse de la France à la crise économique semble bien loin à l'heure de la RGPP, du désengagement de l'État et de la HADOPI.

Pour toutes ces raisons, nous voterons contre ce budget.

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