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Intervention de André Chassaigne

Réunion du 12 novembre 2009 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2010 — Justice

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Chassaigne :

Monsieur le président, monsieur le ministre chargé des relations avec le Parlement, mes chers collègues, même avec une hausse de 3,4 %, le budget 2010 de la justice – 6,8 milliards d'euros – reste l'un des plus faibles d'Europe. Un rapport de la Commission européenne ne classe-t-il pas l'efficacité de notre justice au trente-cinquième rang européen ? Je doute qu'avec ce budget concernant six programmes nous parvenions à améliorer ce classement.

L'analyse des différents programmes permet de constater que c'est l'administration pénitentiaire qui, avec 2 699 millions d'euros inscrits au programme 2, engloutit la majeure partie de la hausse de ce budget. Certes, sont prévues des créations de postes, mais elles ne sont pas pour autant à la hauteur des besoins de cette direction. Les 1 113 créations d'emplois prévues sont largement insuffisantes compte tenu de la création des nouveaux établissements.

À terme, force est de constater que les effectifs dans les prisons existantes ne seront pas renforcés. Le Gouvernement est-il sourd, ou fait-il semblant de ne pas entendre les mouvements de protestation des travailleurs sociaux, des personnels de surveillance, et de ne pas voir le délabrement du système judiciaire et pénitentiaire ?

Enfin, et alors qu'il avait été question d'améliorer les conditions de détention des détenus, seulement 17,3 % du budget alloué à l'administration pénitentiaire sera dédié à l'action 2 de ce programme, l'accueil et l'accompagnement des personnes placées sous main de justice dans des conditions dignes et satisfaisantes.

Quant à l'objectif 3 du programme – développer les aménagements de peine –, ce ne sont que 262 agents, toutes filières confondues, qui viendront renforcer les SPIP, les services pénitentiaires d'insertion et de probation. Au regard de la loi pénitentiaire qui vient d'être votée, cela reste largement insuffisant et ne permettra certainement pas d'améliorer les conditions de détention soient et de les rendre respectueuses de la dignité humaine.

Le programme 1 concerne la justice judiciaire – 2 838 millions d'euros –, avec pour objet essentiel la mesure des délais de procédure prévue dans le projet annuel de performance. Toujours cette même culture de gestion, incompatible avec les missions assignées à la justice, et maintes fois dénoncée par notre groupe.

Quant au programme « Accès au droit et à la justice », il faut remarquer que le budget alloué à l'aide juridictionnelle et à l'accès au droit est en baisse constante depuis trois ans. Il s'élève à 297,8 millions d'euros, en recul de 25 millions, alors même que les prévisions du nombre de bénéficiaires sont en progression de 3 % par rapport à 2009. Quelle baguette magique permettra de renforcer l'accès au droit et l'aide aux victimes ?

Par ailleurs, comment, avec ce budget, le plein exercice de tous les droits de la défense dès la première minute de la privation de liberté va-t-il pouvoir être mis en place, ainsi que l'exige l'arrêt du 13 octobre dernier de la Cour de justice de Strasbourg ?

Ce budget n'est pas à la hauteur des ambitions affichées par le Gouvernement et constitue, à périmètre constant, un réel désengagement de l'État en matière d'aide juridictionnelle.

Enfin, le programme « Protection judiciaire de la jeunesse », avec 776 millions d'euros est amputé de 10 millions. Les mesures destinées aux mineurs délinquants représentent 71,35 % du budget contre seulement 9,26 % pour celles consacrées aux mineurs en danger ou aux jeunes majeurs. Pour mémoire, l'année dernière, le rapport était de 62 % contre 19 %.

Ce projet de budget confirme les orientations du Gouvernement qui privilégie, pour les jeunes en délicatesse avec la justice ou en danger, le répressif sur l'éducatif.

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