Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, même si le budget de la mission « Enseignement scolaire » demeure le premier de l'État, permettez-moi de le trouver peu ambitieux.
Ce manque d'ambition, nous n'estimons pas forcément, comme vous nous en faites souvent le grief, qu'il porte sur les moyens budgétaires, même s'il ne faut pas sous-estimer cette dimension. À force de supprimer des postes de fonctionnaires, de réaffecter les enseignants des RASED ou de laisser dans l'incertitude les EVS ou les AVS, les bonnes intentions que vous affichez sont réduites en poussière.
Améliorer la qualité de l'enseignement, comme le Gouvernement prétend le faire, donner la chance à tous d'acquérir des règles de vie, des savoirs, des démarches de pensée et des valeurs, rien de cela ne peut se faire dans une école au rabais.
Ce sont les choix budgétaires que vous faites, monsieur le ministre, qui vont précocement, dès la maternelle, infléchir le destin de chacun et déterminer en grande partie la qualité des femmes et des hommes de la France de demain.
Au moment où certains, mus par des calculs populistes, veulent nous enfermer dans un débat sur l'identité nationale, les choix que vous faites, monsieur le ministre, devraient valoriser le travail des enseignants qui, à la suite de Fernand Braudel, montrent au quotidien que l'identité de la France n'est pas un dogme politique mais le fruit d'une perpétuelle et féconde interrogation, nourrie par les apprentissages, les échanges et les apports des valeurs républicaines.
Monsieur le ministre, au regard du coût d'une scolarisation, sans parler de l'aspect humain, quelle logique trouvez-vous à scolariser des jeunes qui, dès leur majorité, s'ils ne sont pas naturalisés, sont renvoyés dans leur pays, souvent dans la plus grande insécurité ?
Politique du chiffre pour l'immigration, politique du chiffre pour l'école… Nous ne souffrons que trop de cette logique comptable qui transparaît de plus en plus dans les écrits du ministère et qui tend à faire de l'école un lieu de « barbarie douce » pour reprendre le titre de l'ouvrage du sociologue Jean-Pierre Le Goff.
Il faut une véritable ambition pour l'école. Or celle-ci est absente de votre budget et de votre politique. Les chiffres sont éloquents à cet égard : 16 000 suppressions de postes prévues en 2010, 13 500 en 2019, 45 000 depuis 2003, malgré une augmentation des effectifs du premier degré de plus de 15 000 élèves. La situation devient à ce point critique que l'on fait appel, dans certaines académies, à des contractuels ou à des retraités pour assurer les remplacements.
M. Chatel et M. Sarkozy n'ont eu de cesse d'annoncer la promotion de l'enseignement des langues. Pourtant, les crédits pédagogiques ont baissé de moitié en un an alors que leur apprentissage est préconisé dès le CP.
M. le ministre de l'éducation nationale comme le Président de la République n'ont pas assez de mots pour dire leur attachement au sport à l'école. Dans les faits, depuis quatre ans, 3 300 postes d'éducation physique ont été supprimés au point que dans 5 % des établissements, les horaires normaux de cours d'EPS ne peuvent être assurés pour toutes les classes !
Le temps de parole qui m'est imparti ne suffit pas à citer la liste des laissés pour compte de ce budget, qui compte pourtant des acteurs indispensables de la communauté éducative comme les médecins de santé scolaire, les assistantes sociales ou les infirmières.
Pour ce qui est des réformes annoncées à grand bruit, celle, imposée, du bac pro, celle du lycée, après le rapport Apparu, mis en concurrence avec le rapport Descoings, on peut dire que, comme soeur Anne dans Barbe bleue, nous ne voyons rien venir, rien de nouveau ne poudroie à l'horizon.