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Intervention de Gilbert Le Bris

Réunion du 5 novembre 2009 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2010 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGilbert Le Bris :

Le constat est simple : rien, dans le projet de loi de finances, ne concerne ces missiles. Le Livre blanc et la loi de programmation ne contenaient pas davantage de grande réflexion sur ce point. Or la véritable question qui va se poser pour la France se résume par la formule suivante : en être ou ne pas en être ? (Sourires.)

Le 17 juillet 2009, le président Obama annonçait « un nouveau dispositif antimissile en Europe, qui sera capable de défendre les forces américaines et les alliés des États-Unis de manière plus puissante, plus intelligente et plus rapide ». C'est parfait, mais que faisons-nous, nous Européens, nous Français ? Chacun a conscience des contraintes financières et, s'il n'est pas question, même pour l'Union européenne, de viser les 10 milliards de dollars que les États-Unis consacrent à leur missile defense depuis vingt ans, il ne faut évidemment pas en rester à un montant nul.

Bien sûr, il ne faut pas créer une ligne Maginot du XXIe siècle, mais trois principes de base me paraissent devoir être retenus.

Tout d'abord, la défense de l'Europe et de la France en Europe ne se résume certainement pas à une défense des États-Unis transportée de l'autre côté de l'Atlantique. N'oublions pas nos particularités géographiques : nous sommes plus proches qu'eux de l'Iran, de la Syrie, de la Libye et d'autres pays incertains. N'oublions pas nos particularités politiques : nous sommes, en Europe, des pays qui gardent leur souveraineté et donc, sauf lorsqu'ils en décident autrement, leur autonomie de décision.

Ensuite, la défense antimissile balistique devra se faire obligatoirement avec les autres États de l'Union, bien sûr, et avec l'OTAN… of course.

Enfin, le rôle de la France est, tout en conservant l'option stratégique de la dissuasion nucléaire, d'apporter des briques technologiques à cette cohérence des niveaux nationaux, européen et de l'OTAN.

Sur ces trois bases, nous ne pouvons rester inertes en attendant une éventuelle décision de l'OTAN lors du prochain sommet de Lisbonne. Si la France veut rester une nation « cadre », comme l'on dit, il faut qu'elle soit en pointe, tant dans la réflexion de coopération avec les États-Unis, plus ouverts, désormais, avec l'administration Obama, que dans sa contribution, s'agissant de l'information et des règles d'engagement, au futur système C2 ou qu'en matière de partage industriel et technologique.

Bien sûr, notre contribution en nature pourrait concerner cette brique technologique de développement d'un système de détection annoncé permettant aussi d'identifier de manière autonome l'agresseur, ce qui aurait une utilité dans le cadre du couplage avec la décision. On s'aperçoit cependant, sur ce point, que le GS1000, traduction opérationnelle du radar M3R mis au point par Thalès, n'est pas budgétisé, non plus, d'ailleurs, que son évolution en performance, le GS1500.

Rien n'est prévu non plus, budgétairement parlant, pour apporter notre contribution en nature à un système de missiles de courte et moyenne portée. Or l'Aster Block 1 pourrait évoluer, par exemple, vers une version navale du SAD, ce qui éviterait de dupliquer le système américain dans le cadre de la défense antimissile balistique, et l'on sait que, si nous n'investissons pas dans ce domaine mais nous contentons de nous placer sous le bouclier américain, nous devrons en payer le prix, politique, bien sûr, mais aussi industriel : il sera élevé. Les industries d'outre-atlantique prennent des places qui pourraient les amener à un quasi-monopole mondial sur la défense aérienne courte et moyenne portée, en jouant tout à la fois sur le réseau de partenariat et de l'approche système globale.

Si les Européens ne veulent pas tourner les talons chaque fois qu'ils seront en concurrence avec les Américains dans ce domaine, il faut qu'ils se réveillent ! La défense antimissile balistique peut être un formidable outil de recherche-développement, à vocation duale dans plusieurs de ses aspects. Voilà une idée de plus, si tant est que l'on en cherche, pour le grand emprunt ! (Sourires sur les bancs du groupe SRC.)

Mes chers collègues, le monde est passé – c'est un constat inquiétant – de la génération SCUD à la génération Nodong, du nom de ce missile nord-coréen. Nous ne devons pas nous contenter de penser que nos M51 règlent la question. Tant en termes de stratégie de développement que de matériel adapté, c'est à nous d'être, au niveau européen, les moteurs d'une réflexion et d'une action enfin volontaire et déterminée en matière de défense antimissile balistique ! (Applaudissements.)

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