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Intervention de André Chassaigne

Réunion du 3 novembre 2009 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2010 — Politique des territoires

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Chassaigne :

…en passant par les assises des territoires ruraux. Il est par conséquent difficile d'en avoir une approche synthétique.

Les textes que vous soumettez à notre examen m'ont fait penser à un écrivain qui m'est cher, qui a d'ailleurs écrit un de ses romans, Le fidèle berger, dans mon petit village de Saint-Amant-Roche-Savine : Alexandre Vialatte. Une de ses expressions correspondrait assez bien à cette mission « Politique des territoires » : celle de « brimborion hétéroclite, détail perdu d'un ensemble tronqué ». (Sourires.) C'est donc à partir de certains détails de ce brimborion hétéroclite que je vais tâcher de savoir si vous envisagez de changer vraiment la politique du territoire.

Vous partez tout de même avec un handicap : il faut donner à la politique des territoires une orientation fondamentale et ainsi, d'une certaine manière, il faut choisir son côté de la barricade. Votre politique sera-t-elle conduite en fonction des intérêts des territoires et des populations, au service d'une recherche de qualité de vie, de développement économique ? C'était la conception historique de la DATAR : celle d'un territoire équilibré, générateur d'égalité entre les hommes – un des fondements de notre République. N'êtes-vous pas plutôt contraint de passer de l'autre côté de la barricade en mettant toute votre politique – malgré vous, j'y insiste – au service d'un monde où tous les aspects de notre vie devraient être régulés par la compétitivité, la recherche du profit ? Une logique selon laquelle, de la naissance à la mort et pendant les vingt-quatre heures que compte chaque jour, rien ne doit échapper au système marchand, cette marchandisation devant devenir la pierre de touche de tous vos choix politiques ! Une logique que l'on perçoit d'ailleurs très clairement dans le rapport Balladur. Cette recherche de compétitivité ne sous-tend-elle pas la réforme territoriale, à contre-courant de la politique des territoires qu'il faudrait mener ?

Comment conduire une véritable politique des territoires, quand on s'enferme dans un tel carcan ? La compétitivité condamne en effet les territoires les plus riches à se développer toujours plus, pour relever le défi d'une mondialisation qui nous écrase, tandis qu'elle voue les plus pauvres à une mort lente et annoncée, que quelques mesurettes ne suffiront pas à retarder.

Dans leur fatras hétéroclite figure, entre autres, l'aménagement territorial de La Poste. Celle-ci, au nom de la compétitivité, a considérablement réduit sa présence sur le territoire, en prétendant de manière spécieuse que les agences postales communales ou les relais Poste installés chez des commerçants rendront les mêmes services qu'un bureau de poste. Mais ce glissement de vocabulaire, qui ne rend pas compte de la réalité, ne fait illusion auprès de personne.

Comme pour la télévision numérique, on n'hésite pas à se fixer des objectifs : 95 % du territoire seront couverts par le réseau et, dans les 5 % restants, les services postaux pourront être éloignés de plus de 10 kilomètres. Mais on sait ce que dissimulent les chiffres. On me permettra de citer un exemple que je connais bien. L'arrondissement d'Ambert, l'un de deux arrondissements qui composent ma circonscription, et qui compte 55 communes, 8 cantons et une sous-préfecture, abrite 5 % de la population du Puy-de-Dôme. Dans ce département, les 5 % de la population qu'on voudrait laisser de côté représentent un arrondissement complet.

L'exemple de La Poste est intéressant à un autre titre. Lorsqu'un élu local sollicite des informations, notamment quand il s'interroge sur les critères qui justifient la transformation d'un bureau en agence postale communale ou en relais Poste, il n'obtient jamais de réponse. On n'obtient jamais les données attestant une baisse d'activité qui justifierait l'évolution du réseau. Je l'ai souligné quand j'ai demandé l'ouverture d'une mission d'information, à défaut de celle d'une commission d'enquête sur la présence territoriale de La Poste. On ne veut pas nous répondre, pas plus qu'on ne veut faire l'inventaire des services respectifs rendus par une agence postale communale, un relais Poste ou un bureau de poste. Chacun sait pourtant qu'ils ne sont pas comparables. Organiser la politique des territoires revient-il à instaurer un accès inégal aux services ?

Avec mon collègue Jean Lassalle, qui ne partage pas ma sensibilité politique, j'ai lancé l'action « Campagnes de France – grande cause nationale » et nous avons décidé de porter plainte devant la HALDE, car nous considérons que les dommages infligés aux campagnes relèvent d'une véritable discrimination.

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