Elu d'un territoire à dominante rurale, je salue la présence au Gouvernement d'un ministre de plein exercice en charge de l'espace rural et de l'aménagement du territoire. À l'heure où la tourmente économique frappe plus durement certains de nos territoires, l'ambition d'un aménagement stratégique et durable du territoire français est plus que jamais d'actualité.
Au-delà des aspects spécifiquement budgétaires qu'a décrits mon collègue Jean-Claude Flory, rapporteur spécial de la commission des finances avec lequel nous avons mené plusieurs auditions particulièrement riches, je tiens à exprimer ma très vive préoccupation, sans doute partagée sur de nombreux bancs, quant au traitement de trois sujets : l'aménagement numérique du territoire – internet à très haut débit et téléphonie mobile –, la dynamisation de la ruralité et des services au public en milieu non dense, la présence médicale sur l'ensemble du territoire.
S'agissant de l'aménagement numérique du territoire, je reconnais les efforts accomplis par les gouvernements successifs et j'attends beaucoup du texte sur la fracture numérique qui viendra bientôt en discussion. Mais alors que s'achève la première décennie du XXIe siècle, il est impératif que chacun de nos concitoyens puisse utiliser son téléphone portable ou accéder à internet en tout point du territoire. Des moyens suffisants doivent être dévolus à cet objectif. On ne peut plus se contenter d'études statistiques partielles qui présentent des résultats exagérément optimistes. Est-il prévu de mobiliser à cet effet des ressources issues du futur grand emprunt ?
La revitalisation des espaces ruraux s'inscrit dans une politique volontariste – pôles d'excellence rurale, socle de services au public en milieu rural, mutualisation des ressources. Cependant l'efficacité de ces mesures varie fortement selon les régions. Un effort d'harmonisation devra être réalisé et telle pourrait être l'une des priorités des assises des territoires ruraux. Au cours de votre audition par la commission du développement durable, vous avez, monsieur le ministre, développé l'idée centrale selon laquelle les territoires à aménager forment un ensemble, au sein duquel il est vain d'opposer la ville et la campagne. Je partage pleinement cette approche car, pour moi, la mission première de l'aménageur est d'instaurer une solidarité réelle entre les territoires afin de tirer profit des atouts de chacun.
Pour ce qui est du socle de services au public, sur le territoire national, le statut de La Poste fait débat dans le cadre du projet de loi en discussion au Sénat. J'ai bien noté la détermination de Christian Estrosi, ministre de l'industrie, qui a déclaré devant le Sénat : « il y a un engagement ferme et irrévocable du Gouvernement : pas un euro de capitaux privés ne rentrera au capital de La Poste ». Néanmoins, monsieur le ministre, pouvez-vous nous assurer que, compte tenu de sa mission de service public, La Poste disposera de suffisamment de moyens financiers pour faire face à la concurrence rendue obligatoire par la directive européenne et pour maintenir sa présence sur l'ensemble du territoire ?
Alors que la progression des « déserts médicaux » se poursuit dans les zones où la population est la moins dense, tout comme dans certaines banlieues désavantagées, les objectifs fixés par la loi Hôpital, patients, santé et territoires, votée cette année, doivent être réalisés. Face à la situation critique qui affecte certaines zones, il importe qu'une place importante soit réservée aux projets de pôles de santé ou de maisons de santé dans la prochaine vague de pôles d'excellence rurale annoncée par le Premier ministre en septembre dernier.
En outre, je souhaite que la profession médicale elle-même s'implique davantage pour contribuer à la bonne couverture de l'ensemble de la population. Il importe qu'elle manifeste une volonté forte d'organisation et de cohésion, en incitant notamment les nouvelles générations de médecins à s'installer là où l'on en a le plus besoin, plutôt qu'en zone saturée. Comme on l'a rappelé en commission, les études médicales restent largement financées par l'État et il me semblerait donc parfaitement naturel que les médecins fraîchement diplômés soient affectés dans les sites menacés de désertification. Il y va de la sécurité de chacun, quel que soit le lieu où il réside, quel que soit son âge ou sa catégorie socioprofessionnelle.
À l'instar des précédents, le projet de loi de finances pour 2010 décline la mission « Politique des territoires » en deux programmes. Le programme 162, « Interventions territoriales de l'État » se divise lui-même en quatre actions, qui concernent la reconquête de la qualité de l'eau en Bretagne – pour répondre aux exigences communautaires relatives à la teneur en nitrates –, l'accélération du programme exceptionnel d'investissements en faveur de la Corse, la préservation du Marais poitevin et la réduction de l'exposition des populations de Martinique et de Guadeloupe au chlordécone.
S'agissant de l'action « Eau et agriculture en Bretagne », les progrès accomplis sont considérables et il semble que la réalisation des objectifs fixés à sa création, en 2006, est désormais en voie d'achèvement. Est-il envisageable, monsieur le ministre, de la prolonger d'une autre manière en imaginant une action ciblée contre la prolifération des algues vertes dans certaines zones ? Face à ce phénomène, l'État doit apporter toute son aide et assumer toute sa responsabilité en veillant à trouver des réponses appropriées qui ne mettent pas en péril le devenir économique des bassins d'emploi concernés.
Le programme 112, « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire », dont l'intitulé et le périmètre ont été stabilisés d'un exercice à l'autre, retrace principalement les crédits d'intervention et de fonctionnement de la délégation interministérielle à l'aménagement des territoires, la DIACT. Au cours de son audition par les rapporteurs, le ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire a fait part de sa volonté de redonner à la délégation son appellation d'origine de DATAR, ce dont je me félicite.
Pour conclure, je salue la volonté du Gouvernement de conduire une politique d'aménagement durable du territoire particulièrement dynamique, ainsi que sa décision de renforcer sensiblement les dotations en autorisations d'engagement au titre de 2010. Ainsi, alors que la loi de programmation des finances publiques pour 2009-2012 prévoyait pour 2010 un montant de 307,4 millions d'euros en autorisations d'engagement, celles-ci ont été portées à 345,7 millions d'euros, ce qui représente une progression remarquable de 12 %.
Mes chers collègues, l'ensemble de ces éléments ont conduit la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire à émettre un avis favorable à l'adoption des crédits de cette mission, et je vous invite à faire de même. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)