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Intervention de Michèle Alliot-Marie

Réunion du 3 novembre 2009 à 10h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la république

Michèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés :

Quand bien même l'on ferait abstraction de cette divergence d'appréciation sur la mobilisation du Parlement sur des questions judiciaires et pénales, j'estime que l'on ne peut pas oublier ce qui se passe dans le pays pour adapter le droit dans ses aspects les plus lacunaires.

Je ne conteste pas qu'il puisse y avoir des dysfonctionnements dans l'administration de la justice, ainsi que l'a malheureusement rappelé l'affaire Evrard. Mon rôle est aussi de veiller à l'application des textes existants. C'est la raison pour laquelle nous réfléchissons à la mise en place d'un système d'alerte sur ces dysfonctionnements.

Pour le reste, j'ai bien retenu l'idée d'un centre de recherche sur les criminels et délinquants sexuels, mais il nous faut aussi veiller à ne pas multiplier à l'envi les structures.

Comme M. Serge Blisko, je suis favorable au partage d'informations entre la justice et les médecins. Les moyens existent pour cela. Mais, en matière de psychiatrie, la difficulté tient moins à des problèmes financiers qu'à des carences en ressources humaines et en volonté de faire.

M. Bernard Debré connaît parfaitement ces sujets et il en a parlé avec beaucoup d'humanité. Je le remercie pour son analyse sur la dangerosité et lui confirme que la collégialité des médecins chargés de son appréciation constitue une piste de réflexion retenant mon attention. J'approuve également ses propos sur la prise en compte du besoin pour les détenus de conserver une vie sexuelle et sociale en prison comme moyen de mieux prévenir la récidive.

Dans la loi pénitentiaire, que vous avez récemment adoptée, l'accent a particulièrement été mis sur la préparation au retour dans la société, ainsi que sur la rénovation des établissements anciens et la conception des nouveaux de manière à mieux prendre en considération l'espace nécessaire à la socialisation des détenus. Pour aller plus loin, l'idée d'une évaluation annuelle de la dangerosité des détenus pour crimes ou délits sexuels mérite de retenir l'attention pour améliorer le suivi des intéressés. En revanche, le contrôle des prescriptions médicamenteuses en prison se heurte à la liberté de prescription des médecins ainsi qu'à des contraintes inhérentes à la situation médicale des détenus.

M. Étienne Blanc a insisté sur la nécessité d'offrir au juge une panoplie de moyens suffisante pour lui permettre de faire face à la spécificité de chaque cas. Je le remercie d'avoir souligné le fait que de nombreux criminels et délinquants sexuels demandent eux-mêmes une assistance, ce qui différencie ce type de mesures des sanctions auxquelles certains voudraient les assimiler.

J'ai noté avec beaucoup d'intérêt l'expérience de l'hôpital psychiatrique de Villejuif. C'est souvent sur le terrain que des initiatives individuelles donnent des résultats. Elles méritent d'être connues et il faut inciter à les développer.

Je partage l'analyse de M. Éric Ciotti, selon laquelle on ne saurait ignorer les réalités de l'actualité. Le Gouvernement entend, de ce point de vue, assumer ses responsabilités et son rôle. Pour ce qui concerne les propositions que vous avez formulées, M. le député, je dirai à ce stade que certaines recueillent mon accord et d'autres non. Nous y reviendrons plus en détail demain, à l'occasion de l'examen de vos amendements.

Enfin, à M. Yves Nicolin, je répondrai que sans consentement des intéressés, il ne peut y avoir prescription d'un traitement limitant la libido des détenus. Prévoir une obligation absolue se heurterait à des problèmes constitutionnels. J'observe en outre que pour être efficaces, certains traitements doivent être acceptés. C'est là aussi une garantie qu'ils soient suivis. Pour autant, l'idée d'une sanction en cas de non-acceptation d'un traitement médical pourrait constituer une réponse conciliant tout à la fois les impératifs constitutionnels et l'objectif recherché.

Pour ce qui concerne la réduction automatique des peines, je comprends qu'il s'agit d'un vrai motif d'interrogation pour l'opinion publique, qui n'en accepte pas le principe. On peut en effet se demander quel est l'intérêt d'annoncer des sanctions dont on sait qu'elles ne seront que partiellement appliquées.

Enfin, s'agissant de l'information des maires, il me semble que le sujet nécessite une étude juridique importante car les anciens détenus, à la sortie de prison, doivent aussi bénéficier d'un droit à l'oubli.

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