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Intervention de Geneviève Colot

Réunion du 3 novembre 2009 à 9h30
Projet de loi de finances pour 2010 — Action extérieure de l'État

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGeneviève Colot, rapporteure pour avis de la commission des affaires étrangères, pour l'action de la France en Europe et dans le monde, pour les Français à l'étranger, les affaires consulaires et la sécurité des personnes :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne détaillerai pas les crédits des deux programmes dont j'ai la charge, à savoir le programme « Action de la France en Europe et dans le monde » et le programme « Français à l'étranger et affaires consulaires ».

Je dois, en revanche, vous donner mon sentiment sur les principales évolutions proposées. J'ai à la fois plusieurs motifs de satisfaction et quelques inquiétudes.

Les crédits du programme « Action de la France en Europe et dans le monde » devraient augmenter de 6,13 %, ceux du programme « Français à l'étranger et affaires consulaires » de 4,76 %. Mais, il ne faut pas voir ces demandes d'augmentation comme reflétant un manque de rigueur budgétaire de la part du ministère. Dans le respect des préconisations du Livre blanc et des décisions prises à l'issue de la RGPP, celui-ci prévoit au contraire. de réformer profondément ses réseaux et de réduire ses effectifs et ses dépenses de fonctionnement de 2 % en 2010. Je tiens à saluer les efforts qui sont entrepris en ce sens en administration centrale comme dans les postes et à féliciter les ambassadeurs qui, dans leur très grande majorité, comprennent les enjeux de la réorganisation des réseaux et acceptent de bon gré les changements inévitables dans le fonctionnement des postes. S'il est demandé à la représentation nationale une augmentation des crédits, c'est que certaines des dépenses vont inévitablement augmenter, j 'y reviendrai.

Le mouvement de réforme en cours au ministère constitue donc mon premier motif de satisfaction. La réorganisation des postes diplomatiques en trois catégories : les ambassades à missions élargies, les mieux dotées qui sont au nombre de trente-huit ; les ambassades à missions prioritaires, qui sont les plus nombreuses – quatre-vingt-douze – et les postes de présence diplomatique simple, à format allégé et simplifié – trente-deux ambassades. La réduction de 10 % des effectifs des huit ambassades les plus importantes et un fonctionnement des ambassades plus interministériel doivent conduire à une économie de l'ordre de 380 ETP en trois ans ; 190 ETP supplémentaires devant être économisés grâce au recalibrage de la mission consulaire.

De multiples consulats ont désormais essentiellement une fonction de veille politique. Les dossiers consulaires sont traités dans un seul poste, le plus souvent dans la capitale du pays concerné, parfois même dans la capitale d'un autre État de la région. On assiste également à des mesures de regroupement, de mutualisation et d'externalisation, au moins partielles, des fonctions de soutien.

Les créations de services communs de gestion, la mise en commun de certains moyens tels que les véhicules et le recours à des prestataires de services en sont quelques exemples. En 2010, 255 ETP seront ainsi supprimés.

Cette réorganisation et ces mesures de rationalisation sont nécessaires, j'en suis consciente. Je dois néanmoins vous faire part de ma préoccupation et de celles de mes collègues de la commission des affaires étrangères face à la diminution continue des effectifs du ministère qui aura perdu 1 450 ETP en six ans. Il nous semble important de mettre un terme à ce mouvement.

Les engagements pris dans le cadre du budget triennal doivent être respectés. Mais il ne serait pas raisonnable que le ministère accepte de nouvelles réductions de ses effectifs au-delà de 2011. Monsieur le ministre, pouvez-vous vous engager à mettre, dès que possible, un terme à ce mouvement de baisse des effectifs ? Il y va du rayonnement de notre pays dans le monde.

Des économies importantes seront aussi consenties sur le « train de vie » du ministère. Les frais de fonctionnement seront réduits de 2 % en administration centrale comme dans les postes, participant ainsi à la maîtrise des dépenses publiques. Cependant, le ministère a fait une priorité du renforcement de la sécurité des postes diplomatiques et de la modernisation de ses équipements informatiques, ce qui est indispensable.

Les effectifs baissent, mais les crédits de personnel augmentent, ce qui est surprenant. En effet, le ministère a obtenu 10 millions d'euros supplémentaires sur ses crédits de personnel et cela afin de remettre à niveau une enveloppe sous-dotée depuis plusieurs années. C'est aussi un motif de satisfaction dans la mesure où cela facilitera la gestion des ressources humaines du ministère et lui permettra d'utiliser plus complètement son plafond d'emploi. Faute de crédits, les emplois étaient gelés durant les derniers mois de l'année.

Des progrès ont été réalisés également dans la gestion immobilière. Un compte d'affectation spéciale par l'intermédiaire duquel devaient transiter les produits de ses cessions avait été créé. Il devait financer les constructions et les travaux. Il ne fonctionne toujours pas comme on pourrait le souhaiter.

Cependant, le ministère a considérablement dynamisé sa gestion. Il devrait prochainement être aidé dans cette voie par la création d'une foncière de l'État à l'étranger, dont le projet est très avancé et qui pourra être mis en oeuvre lorsque nous aurons adopté le projet de loi relatif à l'action extérieure de l'État.

Sur la question des contributions aux organisations internationales, je suis partagée entre satisfaction et inquiétudes. Déduction faite des 6,7 millions d'euros de contributions transférées vers d'autres ministères, l'enveloppe dépassera 779 millions d'euros, en hausse de plus de 51 millions d'euros. Cette augmentation est donc conséquente.

Il est pourtant à craindre qu'elle ne soit pas suffisante. Pour l'exercice en cours, il manquera près de 90 millions d'euros, alors même que le niveau du dollar par rapport à l'euro est actuellement bas. Comme 70 % des contributions sont versées dans cette monnaie, la question du taux de change est essentielle. La bonne tenue du dollar au début de l'exercice explique la quasi-totalité du besoin de financement en 2009. On ne sait évidemment pas à quel niveau sera le dollar en 2010. À cela s'ajoute le risque de dépenses supérieures aux prévisions sur plusieurs opérations de maintien de la paix et la mise en place de la Mission de l'Union africaine en Somalie. Il est déjà à craindre que les 386,4 millions d'euros ouverts ne suffisent pas.

Il ne faut néanmoins pas dramatiser : la sous-dotation initiale, systématique depuis des années, pose un problème de sincérité budgétaire et complique la gestion des crédits. Mais le ministère a toujours obtenu in fine les moyens de répondre aux appels de fonds qui lui sont adressés.

Je suis en revanche véritablement inquiète en ce qui concerne le programme « Français à l'étranger et affaires consulaires », en particulier pour l'action « Offre d'un service public de qualité aux Français de l'étranger ». Cette action finance l'action sociale du ministère en faveur de nos compatriotes de l'étranger les plus modestes. L'enveloppe ouverte pour l'action sociale est en baisse de 7,5 % et sera limitée à 14,8 millions d'euros en 2010.

Cette réduction a contraint le ministère à prendre des décisions difficiles. Cette démarche est différente selon que les personnes concernées vivent dans un pays ancien membre de l'Union européenne, ou dans un pays nouvellement entrant ou du reste du monde. En effet, le ministère n'accordera plus d'allocation mensuelle aux Français qui résident dans l'un des États de l'Europe dite riche, à l'exception de l'aide aux handicapés et de l'aide à l'enfance en détresse. En application du principe de non-discrimination, ces Français peuvent bénéficier des dispositifs sociaux de leur pays de résidence.

Pour les Français vivant dans les autres pays – nouveaux États membres et reste du monde –, le montant des aides destinées aux enfants et celui de l'aide complémentaire pour les adultes handicapés sont maintenus au niveau actuel. En revanche, les allocations mensuelles vont être revues à la baisse. Le taux de base, c'est-à-dire le plafond au-dessous duquel doivent se situer les revenus des bénéficiaires, est réduit de 10 %. Cela aura un impact sur le nombre de personnes aidées et sur le montant des allocations. Environ 4 500 de nos compatriotes les plus modestes vont voir leurs faibles revenus réduits pour une économie totale de l'ordre de l,5 million d'euros. Les consulats risquent d'être contraints de leur accorder des soutiens exceptionnels pour leur éviter une trop grande précarité.

La dotation destinée au dispositif d'aide à l'emploi et à la formation professionnelle sera aussi réduite d'un quart, à 600 000 euros, malgré son efficacité. Elle a aidé 4 000 Français à trouver un emploi en 2008. Je regrette donc que nos compatriotes de l'étranger les plus fragiles soient les principales victimes des économies budgétaires demandées au ministère, alors que les sommes en jeu sont faibles et que le contexte de crise justifierait, à lui seul, largement le maintien du niveau des aides actuelles.

Monsieur le ministre, compte tenu les efforts consentis par votre ministère pour maintenir ses dépenses de fonctionnement, je n'ai pas souhaité proposer un amendement visant à transférer 2 millions d'euros du programme « Action de la France en Europe et dans le monde » vers le programme « Français à l'étranger et affaires consulaires », afin d'éviter cette baisse de l'action sociale. Il me semble néanmoins indispensable que le Gouvernement fasse un geste en faveur des Français de l'étranger les plus modestes en rétablissant les crédits à la hauteur de 2009.

Je ne peux conclure cette présentation sans aborder la question de la prise en charge des frais de scolarité des enfants français dans les lycées de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger. S'agissant de cette participation, la commission a adopté, à l'unanimité, l'amendement présenté par mon collègue François Rochebloine. Pour la troisième année, l'enveloppe destinée à cette prise en charge et aux bourses à caractère social augmentera de 20 millions d'euros. Jusqu'ici cette hausse des moyens a suffi à couvrir l'augmentation des dépenses qui porte non seulement sur la prise en charge elle-même, étendue à une classe de lycée supplémentaire à chaque rentrée, mais aussi sur les bourses à caractère social. En 2009, la prise en charge devrait coûter plus de 28 millions d'euros et les bourses devraient représenter près de 59 millions d'euros, soit 13,5 millions de plus qu'en 2007. Les prévisions pour 2010 s'établissent actuellement à 45,6 millions d'euros pour la prise en charge et 70 millions d'euros pour les bourses.

Ces évolutions résultent de plusieurs facteurs. Le principal est l'augmentation soutenue des frais de scolarité. S'y ajoute l'accroissement sensible du nombre de demandes lié à l'augmentation du nombre d'élèves français dans le réseau. Cet accroissement est dû non seulement à la qualité de l'enseignement, mais aussi à l'effet d'attraction de la prise en charge qui pousse davantage de familles françaises vers les établissements du réseau. Cet accroissement du nombre de demandes et l'augmentation des frais de scolarité risquent de se faire au détriment du nombre d'enfants étrangers qui fréquentent nos écoles.

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