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Intervention de Patrick Devedjian

Réunion du 21 octobre 2009 à 16h15
Commission des affaires économiques

Patrick Devedjian, ministre chargé de la mise en oeuvre du plan de relance :

Pas du tout ! Vous qui connaissez parfaitement la question du logement, monsieur le Bouillonnec, vous savez que, si les projets ne sont pas réalisés dès leur création, leur coût augmente. Quelques années plus tard, chacun des acteurs – l'État, les collectivités, les opérateurs sociaux – prétend avoir apporté sa part et le dossier est bloqué. Cette situation est particulièrement fréquente dans les dossiers relevant de l'ANRU.

Je n'ai aucune gêne à le reconnaître, l'État a engagé 350 millions dans le cadre du plan de relance afin de démarrer des opérations prêtes et presque totalement financées. Si nous avions dû construire des projets nouveaux, nous aurions investi en 2011 ! Nous sommes le seul pays qui ait investi 75 % de son plan de relance en 2009, et si nos résultats sont meilleurs que ceux des autres, c'est que nous avons fait porter notre effort sur le coeur de la crise.

Monsieur Brottes, vous m'avez traité d'agitateur, mais cela ne me vexe pas. Que n'ai-je entendu tout au long de l'année ! Que le mois de janvier était dur, mais que le mois de février le serait plus encore, et que le mois de mars serait carrément catastrophique, et ainsi de suite jusqu'en décembre.

Que font les agents économiques en pareil cas ? Ils n'investissent pas. C'est là que l'État intervient, pour que les personnes s'engagent à sa suite.

L'un des premiers chantiers de restauration des monuments historiques que nous avons lancés concernait la rénovation de la Maison Carrée, à Nîmes. Nous avons contacté de très petites entreprises spécialisées dans la restauration, dont les personnels sont très qualifiés – la formation d'un sculpteur de pierre dure sept ans ! Ces entreprises se trouvaient au bord du dépôt de bilan. J'ai rassuré les personnels, leur demandant de « tenir bon » en attendant les commandes. J'ai en effet joué les agitateurs pour leur donner de l'espoir. Finalement, les commandes ont été passées et ces entreprises ont été sauvées. En accord avec chaque préfet et son équipe – le trésorier-payeur général, le Médiateur du crédit, le directeur de la Banque de France –, nous avons remboursé la TVA et anticipé les versements du crédit d'impôt recherche pour soulager la trésorerie des entreprises.

Les 23 milliards d'euros que nous avons injectés dans l'économie sont sortis des caisses de l'État. En fait, il ne s'agit pas d'agitation, monsieur Brottes, mais d'argent frais !

Il y a de la psychologie dans l'économie, j'en veux pour preuve que les entrepreneurs peuvent être pessimistes ou optimistes. S'ils sont pessimistes, ils s'abstiennent d'investir et ils licencient. S'ils sont un tant soit peu optimistes, ils attendent et, éventuellement, ils investissent. Nous avons donc essayé d'être réactifs et, pour cela, nous avons utilisé des projets déjà prêts.

Vous regrettez, madame Marcel, que le Gouvernement n'ait pas financé les projets de votre département. J'entends ce reproche depuis le début de l'année !

Nous avons également recherché un effet multiplicateur. Car, lorsqu'il engage un euro, l'État invite les entreprises – privées et publiques –, les collectivités locales, et les opérateurs sociaux à le suivre. En injectant 23 milliards d'euros, l'État a entraîné des investissements considérablement plus importants. Les 350 millions de l'ANRU ont entraîné 4 milliards de dépenses, qui sont passées des caisses des entreprises aux salaires de leurs employés.

Monsieur Letchimy, séparer l'investissement de la consommation est une erreur, car l'un et l'autre sont liés. Placer de l'argent dans une entreprise et lui fournir du travail est un investissement, mais ce sont aussi des salaires, ceux-ci étant directement liés à l'augmentation de la charge de travail. Et ces salaires se traduiront par de la consommation. On ne peut donc pas dire que les investissements soient perdus pour la consommation : ils y arrivent, mais après avoir fait un détour. D'où la nécessité d'une administration dédiée à la relance, car l'investissement allonge le circuit économique et arrive plus tard dans le porte-monnaie des consommateurs. La prime de 200 euros versée au titre du RSA à 4,1 millions de foyers a un effet immédiat sur la consommation. Lorsque le soutien passe par les entreprises, le chemin est plus long, mais l'effet multiplicateur de la dépense est renforcé.

Selon vous, monsieur Brottes, tout le monde est favorable au fonds stratégique d'investissement. Soit. Mais est-il efficace ? Il s'agit d'un fonds stratégique, non d'un fonds de soutien aux entreprises en difficulté. Sa mission est de soutenir les entreprises qui représentent un atout pour l'avenir de l'économie française. En France, nous avons la chance d'avoir des « pépites », des PME et parfois des TPE de très grande qualité, dont certaines sont des leaders mondiaux. Sans l'intervention du FSI dans son capital, l'entreprise Nexans, leader mondial du câble, aurait pu dès demain être rachetée en bourse par un fonds d'investissement venu de n'importe où, appréhendée, contrôlée, et éventuellement liquidée, sa technologie aurait été récupérée et exportée, son personnel mis à la porte, la recherche captée et transférée. La vocation du FSI est d'empêcher cela en prenant une participation dans les entreprises stratégiques, celles qui représentent un potentiel de croissance et de développement que nous voulons conserver dans notre pays.

Dans le cadre des opérations de relance, l'État a naturellement engagé des financements croisés avec un certain nombre de collectivités. Les responsables d'une collectivité locale ne me diront pas le contraire : monter une opération à financements croisés est souvent la seule manière de réaliser un investissement. Mais elle prolonge considérablement les délais et favorise les financements contraints – certaines collectivités se sentent obligées de participer à un investissement, pour faire comme les autres ou parce que cet investissement correspond à leurs choix politiques.

Non, la réforme des collectivités territoriales et la clause générale de compétences ne nuiront pas à la relance, bien au contraire. Lorsqu'une collectivité ayant la compétence exclusive et l'État noueront un partenariat, ils éviteront au moins le tour de table. Les partenaires auront donc beaucoup plus de moyens sur un champ plus restreint. Je suis moi aussi président d'une collectivité…

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