Madame la ministre, afin que notre débat puisse être serein, sérieux et approfondi, il faut lever la procédure d'urgence. Du reste, ce débat manifeste bien que des oppositions de fond s'expriment sur le sens de l'enfermement ou de la prison. La prison doit certes être le lieu de l'exécution des peines, mais elle a également vocation à être un lieu de réinsertion, de réadaptation, de rééducation de ceux qui s'y trouvent.
Le souci des victimes et de la réparation est légitime, mais ceux qui se trouvent incarcérés ne sont-ils pas aussi les victimes d'une société qui produit ces situations ? Sauf à estimer que la cause des déviances comportementales se trouve dans les gènes – ce qui renverrait à un autre débat –, cette cause doit bien se trouver, pour l'essentiel, dans les conditions sociales dans lesquelles nous vivons. Il nous faut donc considérer les agresseurs incarcérés comme des victimes, ce qui permet d'envisager la réinsertion.
Le texte qui nous est soumis comporte deux parties, et, selon que s'exprime un député de l'opposition ou de la majorité, le déséquilibre entre ces parties change de sens. Comme l'a fort bien observé l'un de mes collègues de gauche, la première partie, consacrée aux services et à la condition pénitentiaires, est décevante, car elle ne correspond ni aux besoins des personnes incarcérées, notamment en termes d'insertion, ni à ceux des personnels de surveillance. Je rappelle à cet égard que la France est régulièrement condamnée par la Cour européenne des droits de l'homme. Pourquoi donc n'avoir intégré qu'a minima les règles pénitentiaires européennes et ne vous être pas inspirée davantage des décisions récentes du Conseil d'État, selon lequel un détenu doit conserver l'ensemble des droits attachés à la personne, à l'exception seulement de celui d'aller et venir ? L'apport du Sénat a été positif à cet égard.
Quant à l'encellulement individuel, évoqué à l'article 49, le fait qu'il ne soit pas toujours la meilleure réponse ne signifie pas qu'il ne doive pas être possible pour tous les détenus, à l'exception de ceux qui ne le souhaitent pas.