Même si vous n'avez plus la maîtrise de l'ordre du jour, vous êtes, monsieur le ministre, responsable de la qualité du travail du Parlement, à laquelle nous sommes particulièrement attentifs. Nous n'avons hélas que peu de bons points à vous décerner en la matière tant nous nous trouvons contraints de travailler dans l'urgence.
Si nous avons adopté hier à l'unanimité un texte également relatif à la révision constitutionnelle et portant sur la question prioritaire de constitutionnalité, je doute que celui-ci connaisse le même sort. Vous dites qu'il s'inspire des propositions du comité Balladur. Ce dernier poursuivait trois objectifs, auxquels on peut souscrire : clarifier les compétences du Président de la République et du Premier ministre en matière de nomination, circonscrire le champ des nominations susceptibles d'être encadrées, élaborer une procédure efficace et transparente. Or, tels ne sont pas les choix qui ont été faits par le constituant, qui a en fait créé une procédure factice dans la mesure où le Parlement, compte tenu du critère de majorité retenu, ne dispose pas véritablement de la capacité de s'opposer aux propositions présidentielles. Nous l'avons d'ailleurs constaté à l'occasion des nominations auxquelles nous avons participé ces derniers mois car, si la procédure a été exemplaire pour la nomination du contrôleur général des lieux de privation de liberté, on a vu en revanche ce qu'il en était pour la composition de la commission prétendument indépendante chargée de se prononcer sur les projets de délimitation des circonscriptions législatives ou de répartition des sièges de députés ou de sénateurs.
Par ailleurs, les conditions de renvoi à la loi organique sont particulièrement floues puisque l'on ignore largement les critères de définition du périmètre et du champ des nominations.
Pour sa part, l'étude d'impact jointe à ce projet est tout simplement indigente. Je ne comprends pas pourquoi elle ne comporte pas la liste des nominations auxquelles procède actuellement le Président de la République en vertu des décrets pris depuis 1958.
Enfin, le constituant n'a pas clarifié les compétences entre le Président et le Premier ministre.
Au total, s'agissant de l'encadrement du pouvoir de nomination du Président de la République, la révision constitutionnelle est donc bien loin des propositions du comité Balladur.
Je m'interroge en particulier sur les critères qui ont été retenus par le gouvernement. Ainsi, même si c'est sur proposition, notamment du Conseil d'État, que le Président de la République nomme une partie des membres de la commission pour la transparence financière de la vie politique, c'est bien lui qui choisit sur la liste qui lui est soumise. On comprend donc mal pourquoi cette commission, qui participe à l'évidence à la garantie des droits et libertés, n'est pas visée par les présents projets.
Enfin, si le Gouvernement entend aller vite pour mettre en oeuvre la révision constitutionnelle et si nous ne pouvons que nous réjouir que le conseil des ministres ait adopté le projet relatif au Défenseur des droits, vous savez quelle est notre impatience de nous voir soumis le projet de loi organique relatif à l'article 11 et au référendum.