À travers ces deux amendements, je souhaite à nouveau poser la question des dépenses fiscales et du plafonnement des niches. Leur objet est tout simplement de rendre notre système fiscal plus juste.
Ces amendements proposent un impôt minimum alternatif, afin d'éviter que le recours aux niches fiscales ne permette à certains contribuables – souvent les plus aisés, bien sûr – d'échapper totalement au paiement de l'impôt sur le revenu.
En effet, et malgré le travail que nous avons réalisé ensemble, monsieur le rapporteur général, le plafonnement global introduit dans la loi de finances pour 2009 n'empêche pas un contribuable aux revenus confortables de s'exonérer totalement du paiement de l'impôt sur le revenu. Il convient donc de prévoir dans le code général des impôts une disposition qui, sous réserve d'un abattement – je le fixe à 15 000 euros –, crée un plancher à la cotisation d'impôt sur le revenu.
Dans l'exposé sommaire de mon amendement, je donne l'exemple d'un contribuable dont le revenu annuel est de 120 000 euros. Il paierait, au titre de l'impôt minimum alternatif, un peu plus de 6 000 euros, alors que, dans la législation actuelle, il peut être totalement exonéré en recourant à quelques niches fiscales, et ce en dépit du plafonnement global.
Un dispositif analogue à celui que je propose existe aux États-Unis. Il s'agit de l'alternative minimum tax. Je reconnais que cet impôt minimum fait l'objet de critiques, au motif qu'un nombre croissant de contribuables américains y sont soumis. Mais cela résulte en grande partie de la politique qui a été menée par l'administration américaine. Elle n'a pas fait évoluer ce dispositif, d'où les difficultés actuelles.
Mais le même impôt minimum alternatif existe au Canada, où il est peu contesté. Il fonctionne très bien, et permet d'éviter un certain nombre d'injustices.
Je profite de la présentation de ces amendements pour poser au Gouvernement une question également relative à la dépense fiscale. Tout en suivant les débats article par article, je me replongeais dans l'annexe au projet de loi de finances pour 2010 sur l'évaluation des voies et moyens. Ce document est toujours intéressant. En l'occurrence, il nous éclaire sur l'évaluation de la mesure de taxation à taux réduit, au titre de l'impôt sur les sociétés, des plus-values de long terme provenant de la cession des titres de participation. Cette mesure avait été adoptée dans le cadre d'une commission mixte paritaire, c'est-à-dire à l'issue d'un examen rapide, sans évaluation préalable. Elle aurait coûté, apprend-on, 12,5 milliards d'euros en 2008, et 8 milliards en 2009, alors que l'évaluation du coût du dispositif précédent, moins favorable, était de 4 milliards d'euros pour 2008, après 3,2 milliards pour 2007.
Le ressaut est massif : une différence de 8 milliards d'euros après changement de législation. J'aimerais comprendre pourquoi un tel ressaut. Huit milliards, c'est une somme considérable. C'est plus que le coût net de la réforme de la taxe professionnelle. Cela montre bien que des conséquences extrêmement perverses et négatives peuvent être entraînées par des dispositions qui tendent à alléger l'impôt en toutes circonstances. Cette dépense fiscale me paraît étonnante, pour ne pas dire choquante.