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Intervention de Michel Diefenbacher

Réunion du 20 octobre 2009 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2010 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Diefenbacher :

Un budget volontariste. un budget écologique, deux raisons, madame la ministre, monsieur le ministre, de soutenir le projet de loi de finances que vous nous proposez. Pour autant, tout est-il parfait ? Non, bien sûr. Deux sujets au moins méritent une attention toute particulière : les risques qui s'attachent à l'augmentation de la dette ; l'incidence de la fiscalité sur la compétitivité de nos entreprises.

Le déficit serait moins préoccupant s'il était uniquement français. Or il est mondial. Pour endiguer la crise, tous les pays du monde ont pratiqué une politique de relance, c'est-à-dire de déficit, si bien que s'est constituée sur l'ensemble de la planète une immense dette qu'il faudra bien résorber. Pour le moment, loin de se résorber, cette bulle continue à grossir, portant en elle un risque majeur, celui de faire douter un jour les investisseurs de la solvabilité des États. Ce risque n'est pas immédiat, mais qu'en sera-t-il demain ? Si le doute s'installait, s'ensuivrait une crise plus redoutable encore que celle que nous traversons aujourd'hui : remontée brutale des taux d'intérêt sur les obligations d'État, raréfaction du crédit, récession généralisée. Cette crise de confiance, je le crains, n'est pas une hypothèse d'école.

La notation de pays comme la Grèce, le Portugal, l'Irlande, la Norvège n'a-t-elle pas d'ores et déjà été revue à la baisse ? Que dire de la crise de l'Islande ou la Californie ? Et comment interpréter la récente remontée des cours de l'or, phénomène dont on sait qu'il est souvent annonciateur de crises obligataires ?

Si je crois nécessaire d'évoquer ce sujet, ce n'est pas pour jouer les Cassandre, mais afin que chacun dans cet hémicycle mesure que jamais il n'a été aussi important ni aussi urgent d'assainir nos finances publiques. Pour ce faire, il faut non pas reprendre l'escalade des impôts mais traquer les dépenses qui ne concourent pas directement à la reprise économique, dépenses de fonctionnement le plus souvent, mais aussi parfois dépenses d'investissement.

L'exercice est difficile, nous le savons tous. Néanmoins madame la ministre, monsieur le ministre, s'il est un domaine dans lequel nous devons, collectivement, faire mieux, c'est bien celui-ci.

C'est à cet exercice que nous sommes appelés dans la préparation non seulement du budget 2010 mais aussi de la loi de financement de la sécurité sociale et, plus tard, de la réforme territoriale, tant il est vrai que réforme de l'État, réforme des collectivités territoriales et réforme de la protection sociale sont indissolublement liées.

Ma seconde observation concerne la fiscalité des entreprises.

Bravo au Président de la République et au Gouvernement pour la suppression de la taxe professionnelle. Tout le monde en parlait. Personne ne l'avait fait. Encore faut-il veiller à ce qu'une autre taxe, la taxe carbone, ne vienne pas, à terme, compromettre dans les secteurs les plus consommateurs d'énergie les gains tirés de la suppression de la taxe professionnelle.

Le réchauffement climatique, les menaces qu'il comporte pour l'équilibre de la planète, les engagements pris par la France à Kyoto, ceux du candidat Nicolas Sarkozy et de ses concurrents lors de la campagne présidentielle, tout militait pour la création de la taxe carbone. Cette taxe, il faut le rappeler, sera intégralement compensée aux ménages comme aux entreprises. Elle a donc pour objet non pas de renflouer les caisses de l'État mais de changer nos comportements en matière de consommation d'énergie « carbonée ».

Cette taxe existe dans les pays scandinaves depuis plus de quinze ans. Si elle n'y a compromis ni la croissance ni l'emploi, c'est parce qu'elle s'est accompagnée dans la durée de mesures incitatives pour les entreprises les plus consommatrices et les plus exposées à la concurrence internationale. Le dispositif que nous propose le Gouvernement va dans ce sens : des mesures particulières d'exonération ou d'atténuation sont prises en faveur de l'agriculture, de la pêche, des transports de passagers ou de marchandises. Il faut, bien entendu, s'en féliciter.

Ce dispositif soulève toutefois trois questions.

Premièrement, qu'en sera-t-il dans la durée ? La taxe carbone est compensée aujourd'hui et devra l'être demain. Mais une chose est de trouver des exonérations adaptées sur la base d'un tarif de 17 euros la tonne de C0 2, autre chose sera de le faire lorsque ce tarif approchera les 100 euros la tonne, niveau qui devrait être atteint en 2030. La réflexion sur l'adaptation de la fiscalité des entreprises et des ménages n'est pas achevée.

Deuxièmement, qu'en sera-t-il de l'harmonisation européenne ? La création de la taxe carbone n'est pas une mesure ponctuelle mais l'amorce d'une réorientation profonde de notre fiscalité afin qu'elle porte moins sur la production et davantage sur la pollution. S'agissant d'une évolution de fond, il serait plus que souhaitable qu'elle fasse l'objet d'une véritable harmonisation à l'échelle de l'Union européenne. La France, lors de sa présidence, s'y était essayée. Elle n'a pas réussi. Espérons que la réunion de Copenhague sera l'occasion de faire converger nos positions.

Troisièmement, qu'en sera-t-il de l'application de la taxe carbone aux frontières extérieures de l'Europe ? L'enjeu est majeur : c'est celui de l'égalité des conditions de concurrence avec notamment les États-Unis et les pays émergents. Il est clair que si l'Europe sait se montrer plus vertueuse, elle sera mieux armée pour faire valoir ses intérêts.

Lutte contre la crise, poursuite des réformes, préparation de l'après-crise, c'est ce triptyque qui guide le Gouvernement et inspire sa majorité. Madame la ministre, monsieur le ministre, mes encouragements vous accompagnent. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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