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Intervention de Roland Muzeau

Réunion du 7 octobre 2008 à 21h30
Revenu de solidarité active — Article 2, amendements 384 398 54 351

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRoland Muzeau :

Le projet de loi prévoit que le RSA pourra être suspendu en tout ou partie par le président du conseil général si le bénéficiaire ne respecte pas les dispositions de son contrat d'insertion professionnelle résultant du projet personnalisé d'accès à l'emploi élaboré avec son référent.

S'agissant tout d'abord de la partie correspondant au RMG – équivalente au RMI, c'est-à-dire 447 euros pour une personne seule, somme qui, comme l'a très justement souligné M. Martin Hirsch, n'est pas un minimum de survie mais un minimum de « sous-vie » –, nous sommes clairement opposés au principe de sa suspension pure et simple. Comme les associations spécialisées dans le domaine de l'insertion, nous considérons que ce minimum confine à l'indigence et qu'il est contraire à la notion même de solidarité d'envisager de le supprimer à des personnes ayant la plus grande difficulté à s'intégrer socialement, et dont un grand nombre sont même dans l'incapacité de travailler. Mais notre haut-commissaire aux solidarités actives, naguère président d'Emmaüs, l'a bien dit lors de la présentation de son projet : il n'y aura pas un centime pour l'inactivité. C'est une conception de la solidarité que, vous vous en doutez, nous ne partageons pas.

Cela étant, la suspension de la partie complémentaire du RSA en cas de non-respect des délais impartis pour la signature de son contrat d'insertion sociale et professionnelle par le bénéficiaire ou en en cas de non- respect de ses engagements consignés dans ces mêmes contrats, nous semblerait acceptable si – et seulement si – le but était bien de prévenir les abus commis par des bénéficiaires qui profiteraient des droits ouverts par ce nouveau dispositif sans vouloir s'acquitter des obligations qui lui sont attachées et qui visent à son insertion ou à sa réinsertion sociale et professionnelle.

Cependant, vous nous permettrez de penser, la formulation du texte mettant l'accent sur les sanctions, que ces dispositions ne poursuivent pas uniquement cet objectif de prévention des abus. En revanche, elles permettront de pousser gentiment vers la sortie du dispositif RSA un nombre important de bénéficiaires en grande précarité, incapables – et pas forcément de leur propre fait – de respecter des engagements présentés comme « librement consentis ». Sur ce dernier point, nous sommes curieux de voir ce que seront, en pratique, ces contrats, et dans quelle mesure le bénéficiaire cocontractant aura une réelle latitude pour négocier ces dispositions.

L'attribution du RSA étant conditionnée par l'existence d'un contrat conclu entre le bénéficiaire et son référent désigné par le service public de l'emploi, il n'est pas concevable que la décision de suspension du RSA ne suive pas le principe d'une procédure contradictoire.

Ce nouveau dispositif s'adresse à des populations rencontrant parfois de grandes difficultés qui peuvent rendre délicats la signature ou le respect du contrat. Les bénéficiaires ne peuvent être tenus pour responsables du report, de l'annulation – voire de l'inexistence – d'actions de formation ou d'insertion. Les personnes en situation de grande précarité résidant dans des zones peu fournies en emplois, ou encore les femmes seules élevant un ou plusieurs enfants et confrontées à l'absence de service public de garde, ne seront pas toujours en mesure de s'acquitter de leurs obligations contractuelles. Notons au passage que la promesse de campagne du Président de la République de mettre en place le droit opposable à la garde d'enfant est restée au stade de promesse. Une expression populaire illustre bien la situation en la matière : le Gouvernement met la charrue avant les boeufs !

Il est donc indispensable de tenir compte de ces difficultés lors d'une procédure de suspension. C'est le sens de l'amendement de mes collègues Vercamer et Préel que nous avons soutenu en commission.

De même que tout salarié peut se faire assister par un représentant du personnel ou, si l'entreprise en est dépourvue, par une personne extérieure, nous souhaitons que les bénéficiaires du RSA, dont l'objectif est la réinsertion par l'emploi, puissent être assistés du représentant d'une association de lutte contre l'exclusion afin de les aider à faire valoir les raisons qui ont présidé à leurs manquements.

Cet amendement participe de la logique d'accompagnement personnalisé des bénéficiaires les plus en difficulté, logique portée certes par ce projet, mais surtout par de nombreuses associations : face au couperet de la sanction, il est souhaitable que le bénéficiaire puisse se faire assister pour sa défense.

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