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Intervention de Jean-Paul Lecoq

Réunion du 14 octobre 2009 à 15h00
Délimitation des circonscriptions des députés — Motion de renvoi en commission

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Lecoq :

D'un côté, on fait de nouveaux cadeaux aux plus riches ; de l'autre, on pratique de nouvelles ponctions sur le budget des ménages – et je ne parle pas de la nouvelle série de déremboursements de médicaments, de la hausse du forfait hospitalier et de l'imposition des victimes d'accidents du travail.

Nous sommes complètement dans le sujet. Mais de ce point de vue, je ne brosse que le cadre.

Je reviens à la réforme territoriale que vous appelez de vos voeux, pour laquelle nous ne pouvons que nous référer à la presse. Permettez-moi de citer des extraits d'une dépêche AFP : « La réforme territoriale comprend quatre textes. Outre un projet de loi organique, un projet de loi sur les institutions (possibilité de créer des communes nouvelles, achèvement de l'intercommunalité, création de métropoles, possibilité de fusion pour les départements et les régions, suppression de la clause de compétence générale pour les départements et les régions) prévoit la création de conseillers territoriaux.

« Ces conseillers territoriaux siégeraient à la fois au niveau du département et à celui de la région. Leur création fera passer de 6 000 à 3 000 le nombre d'élus territoriaux, ce qui inquiète de ce fait nombre d'élus UMP. »

M. Juppé, pour sa part, a considéré que cette réduction drastique du nombre d'élus serait « un peu démagogique ». Je pense que cela renvoie davantage à la volonté du Président de donner des gages au vieil antiparlementariste et au réflexe anti-élus républicains de l'extrême droite.

Mais, plus profondément, comment ne pas percevoir que, avec ce projet de rétrécissement du champ de la démocratie citoyenne, on se mettrait au service d'une logique de plus en plus ultra-étatique en faveur du capital.

Nous n'avons aucune confiance dans les projets de Nicolas Sarkozy. Ils sont, par essence, trop à son seul service. C'est ainsi qu'il conçoit la démocratie.

Notre Assemblée, monsieur le secrétaire d'État, peut-elle vous donner quitus sur le redécoupage qui sert de base à la représentation nationale, sans se préoccuper de ce que vont devenir les territoires, les modes d'élection de ses représentants, ce qui d'ailleurs touche par répercussion au mode d'élection du Sénat, assemblée constitutive du Congrès avec la nôtre, la plus haute instance après le peuple ?

Il y a là une vraie question qui justifie le renvoi en commission, car la commission doit être informée de tous ces projets afin d'en analyser les implications.

Tout indique que, au-delà des tripatouillages électoraux, des diktats du Président de la République qui, ensemble, font reculer la démocratie, il faut au contraire aller vers plus de démocratie, une République réellement démocratique et sociale.

Assurément, on le vérifie à nouveau, le scrutin majoritaire est injuste. Deux formations, avec 25 à 30 % des suffrages au premier tour, raflent la quasi-totalité des sièges au second tour. Quel que soit par ailleurs le découpage, ce mode de scrutin vise à garantir une majorité dans le cadre de la bipolarisation qui gomme les diversités politiques des partis, mais aussi, de fait, celle des citoyens.

Ce phénomène a d'ailleurs été aggravé par la décision, prise par Jacques Chirac et Lionel Jospin, d'inverser le calendrier électoral, de telle manière que le scrutin présidentiel précéderait toujours les élections législatives.

En fait, ce système aspire à la présidentialisation. La bipolarisation de l'Assemblée qui en découle réduit le champ du législatif, qui ne devient qu'un auxiliaire du président – la démonstration en est régulièrement faite ici ; j'exprime ce que certains d'entre vous n'ont pas toujours la possibilité de dire. Par ailleurs, alors que la France est de plus en plus diverse, sa représentation nationale est de plus en plus uniforme.

Plus que jamais, cela nous renforce dans l'action pour une représentation proportionnelle à tous les niveaux institutionnels. Les faits le démontrent : seul ce mode de scrutin permet effectivement l'expression de la diversité. Tous les autres les mutilent plus ou moins.

Il faut certes dégager des majorités. Mais celles-ci doivent émerger d'un accord politique entre ces diversités et non d'un seul mode de scrutin. La négation de la diversité est pour beaucoup dans la crise politique et citoyenne, à laquelle on ne pourra remédier sans une juste représentation. Dégager des majorités est une autre question, qui tient au débat, à la conviction et à la responsabilité politique.

Un vrai débat sur l'élection proportionnelle à tous les niveaux de notre République s'impose donc. Aucun autre système ne peut approcher la mise en oeuvre du principe selon lequel un citoyen égale une voix.

D'après la dépêche de l'AFP déjà citée sur la réforme territoriale, M. Fillon aurait expliqué aux journées parlementaires de l'UMP du Touquet qu'il envisageait un mode de scrutin majoritaire à un tour doublé d'une dose de proportionnelle qui devrait être de 20 %.

Je n'approuve pas le Premier ministre sur l'ensemble de la réforme, mais j'observe que lui-même est contraint de parler de « proportionnelle ». Pour lui, la dose est homéopathique, mais cela ne justifie-t-il donc pas un débat d'importance sur cette question, y compris pour la représentation nationale ? La question vous est donc posée. C'est pourquoi je le répète, je demande un renvoi en commission.

Plus que jamais, en effet, nous pensons, comme Michel Vaxès le disait en novembre 2008, que le mode de scrutin proportionnel est le seul susceptible d'assurer une juste représentation de nos concitoyens dans leur diversité. Le pluralisme, la représentation de la jeunesse, des femmes, un renouvellement régulier des élus seraient en effet facilités par l'instauration de la proportionnelle à l'occasion de chaque élection, quelle que soit sa nature. Prévoir un mode de scrutin proportionnel pour l'élection des députés répondrait parfaitement au principe posé par le dernier aliéna du nouvel article 4 de la Constitution qui dispose que « la loi garantit les expressions pluralistes des opinions et la participation équitable des partis et groupements politiques à la vie démocratique de la Nation ».

Le dernier chapitre de mon intervention concerne la question démocratique qui est centrale dans nos sociétés et à tous les niveaux, du local au mondial. Les tenants du capitalisme, pourtant en crise, continuent d'agir pour la limiter.

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